#Médicaments #Santé publique #Prise en charge #Législation #Prescription - Délivrance

Les biosimilaires : prescription et dispensation

Lorsque les brevets des médicaments biologiques arrivent à échéance, d’autres laboratoires peuvent proposer des « biosimilaires ». Ils sont présents dans de nombreux secteurs thérapeutiques. Les connaître est essentiel pour optimiser leur prescription et leur dispensation.

Jacques BUXERAUD
1
2
3
4
5
(aucun avis, cliquez pour noter)
Les biomédicaments et leur biosimilaires sont des macromolécules complexes.

Les biomédicaments et leur biosimilaires sont des macromolécules complexes.Alena Butusava / iStock / Getty Images Plus / via Getty Images

Résumé

Contrairement aux médicaments chimiques, les médicaments biologiques ou biomédicaments sont produits à partir de systèmes vivants tels que des cellules génétiquement modifiées de mammifères, de bactéries ou de levures.

Il existe des médicaments biologiques de référence et des médicaments biosimilaires.

Même si de petites différences structurales existent entre le biomédicament de référence et son biosimilaire, l’efficacité clinique est rigoureusement la même.

À ce jour, les données issues de la pharmacovigilance n’ont pas mis en évidence de différences dans la nature, la gravité ou la fréquence des effets indésirables entre les médicaments biosimilaires et leurs biomédicaments de référence, y compris en termes d’immunogénicité.

L'interchangeabilité est un acte médical qui consiste, à l'initiative du médecin prescripteur, à remplacer un biomédicament par un autre similaire. Elle peut avoir lieu à tout moment au cours du traitement et doit être raisonnée et tenir compte de l'intérêt du patient.

Le pharmacien d’officine est actuellement autorisé à substituer neuf biomédicaments.

Selon la définition du Code de la santé publique, un médicament biologique ou « biomédicament » est un « médicament dont la substance active est produite à partir d’une source biologique ou en est extraite, et dont la caractérisation et la détermination de la qualité nécessitent une combinaison d’essais physiques, chimiques et biologiques ainsi que la connaissance de son procédé de fabrication et de son contrôle » [1, 2].

En conséquence, sont considérés comme médicaments biologiques, par exemple les médicaments immunologiques (vaccins…), les médicaments dérivés du sang, les médicaments de thérapie innovante. Les antibiotiques fabriqués par certains champignons sont également des médicaments biologiques, de même la toxine botulique.

On entend souvent parler de « biothérapie » : ce terme correspond à un traitement par des médicaments biologiques (biomédicaments), mais aussi englobe les « thérapies géniques », les thérapies cellulaires et tissulaires. Cependant, le terme de biothérapie est de plus en plus réservé uniquement à l’utilisation des médicaments biologiques (biomédicaments), on parle alors de biothérapie moléculaire [3].

Quel est le processus de fabrication d’un médicament biologique ?

Contrairement aux médicaments chimiques, ils ne peuvent pas être produits par synthèse. Les biomédicaments (macromolécules complexes par leur structure chimique, leur masse moléculaire, leur taille et leur configuration) sont obtenus à partir d'organismes vivants (micro-organismes ou cellules) en y introduisant le plus souvent un gène et en le faisant s'exprimer (technologie de l'ADN recombinant). Le processus de fabrication comporte de multiples étapes avec des contrôles stricts à tous les niveaux de la production [4].

Qu'est-ce qu'un médicament biosimilaire et en quoi diffère-t-il d'un médicament générique ?

Un médicament biosimilaire est une copie d’un biomédicament de référence dont le brevet est tombé dans le domaine public. Comme son nom l’indique, il est similaire, à son biomédicament de référence, mais il n’est pas totalement identique.

Selon l’article L.5121-1 15 du Code de la santé publique (CSP), il s'agit d'un médicament « de même composition qualitative et quantitative en substance active et de même forme pharmaceutique qu'un médicament biologique de référence, mais qui ne remplit pas les conditions pour être regardé comme une spécialité générique en raison de différences liées notamment à la variabilité de la matière première ou aux procédés de fabrication et nécessitant que soient produites des données précliniques et cliniques supplémentaires dans des conditions déterminées par voie réglementaire » [2, 5].

Rappelons que le principe actif d’un médicament générique, de nature chimique, est rigoureusement identique à celui de son princeps.

Un biosimilaire est-il aussi efficace que le médicament biologique de référence ?

Même si des différences structurales existent entre le biomédicament de référence et son biosimilaire, l’efficacité clinique est rigoureusement la même. C’est pour cela que les études avant commercialisation sont nombreuses, le biosimilaire devant faire la preuve de la même efficacité clinique que le biomédicament de référence [6].

Un biosimilaire a-t-il un profil de tolérance similaire au médicament biologique de référence ?

Les données issues de la pharmacovigilance n’ont pas mis en évidence de différences dans la nature, la gravité ou la fréquence des effets indésirables entre les médicaments biosimilaires et leurs biomédicaments de référence. Compte tenu de la structure protéique du biomédicament et de son biosimilaire, le risque d’immunogénicité est systématiquement étudié. Mais, l’expérience a montré que les réactions d’hypersensibilité restent rares et, la plupart du temps, la réponse immunitaire n’est associée à aucune conséquence clinique [6, 7].

Comment sont évalués et autorisés les biosimilaires en France ?

Compte tenu de leur structure protéique, de petites différences structurales existent entre biomédicament de référence et son biosimilaire, en particulier au niveau de la glycosylation des acides aminés de la protéine thérapeutique. En conséquence, pour l'obtention de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) d’un médicament biosimilaire, il est nécessaire de produire des données précliniques et cliniques supplémentaires par rapport à celles qui sont nécessaires à l'obtention de l'AMM d'un médicament générique. C’est ainsi que le dossier repose principalement sur une notion de comparaison avec le médicament biologique de référence [78].

Quelles sont les principales classes thérapeutiques de biosimilaires actuellement disponibles ?

Les biosimilaires disponibles actuellement sont regroupés au sein d'une liste de référence des « groupes biologiques similaires », publiée et mise à jour régulièrement par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) [9].

Pour chaque dénomination commune internationale (DCI) de la substance active des différents groupes, elle fournit le nom de spécialité du biomédicament de référence et les différents noms de spécialités des biosimilaires disponibles.

Les classes thérapeutiques pour lesquelles il existe des biosimilaires sont :

Comment un médecin généraliste doit-il rédiger une prescription de biosimilaire ? Des mentions obligatoires doivent-elles figurer sur l’ordonnance ?

Tous les biosimilaires ne relèvent pas du même niveau de prescription. Seul le médecin autorisé à prescrire le médicament biologique de référence (précision mentionnée au niveau du résumé des caractéristiques du produit [RCP]) peut prescrire le médicament biosimilaire.

La majorité des biosimilaires fait l’objet d’une prescription hospitalière (initiale ou non) rédigée par un médecin spécialiste. Mais, certains d’entre eux (les insulines) peuvent cependant être prescrits par les médecins généralistes libéraux.

Il est obligatoire que la prescription d’un médicament biologique s’effectue en dénomination commune, suivie du nom de marque [10].

Des conditions spécifiques existant pour certains biosimilaires, le médecin peut indiquer sur la prescription le type de dispositif médical d’administration à privilégier pour un patient donné.

Par ailleurs, le médecin prescripteur doit informer le patient de la possibilité de substitution par le pharmacien du médicament biologique prescrit [11].

Existe-t-il des dispositifs d’incitation financière à la prescription de biosimilaires ?

Ce dispositif d’intéressement des médecins libéraux à la prescription des médicaments biosimilaires paru au Journal officiel (JO) du 25 septembre 2021 est entré en vigueur le 1er janvier 2022. Il a été renforcé dans la convention 2024-2029 signée entre les syndicats médicaux et l'Assurance maladie. Il a pour but d’accroître le recours aux médicaments biosimilaires (augmentation du taux de pénétration des biosimilaires de 80 % en 2025 pour l'ensemble des groupes biosimilaires), bien évidemment conformément aux recommandations de bonnes pratiques de la Haute Autorité de santé (HAS) [12, 13] (cf. Encadré 1).

L’intéressement annuel valorise l’augmentation du nombre de patients auxquels sont prescrits des médicaments biosimilaires au regard des indicateurs suivants (les molécules concernées peuvent être amenées à évoluer dans le temps) :

  • augmentation des initiations de traitements par médicaments biosimilaires, c’est-à-dire la prescription d’un médicament biosimilaire à un patient qui n’a eu aucune prescription de ce médicament dans les 12 derniers mois, que ce soit en biosimilaire ou biomédicament de référence ;
  • augmentation des « switchs » des médicaments bioréférents vers les biosimilaires, c’est-à-dire la prescription d’un médicament biosimilaire à un patient auquel était antérieurement prescrit le médicament biologique de référence et qui est confirmée par au moins 3 dispensations consécutives d’un médicament biosimilaire [12, 13].
Encadré 1 - Un guide pratique pour les médecins

L’Assurance maladie met à disposition du médecin un guide méthodologique complet pour l'accompagner dans la découverte et la mise en pratique de ce dispositif (définition et périmètre, modalités de calcul, de versements et de suivi).

Peut-on revenir au médicament biologique de référence si le patient ne supporte pas le biosimilaire ?

Si le patient présente des manifestations d’effets indésirables attribuées à la prise d’un biosimilaire, il est tout à fait possible de revenir au médicament biologique de référence.

Qu’est-ce que l’interchangeabilité des biosimilaires et comment cela s’applique-t-il concrètement pour le généraliste ?

Seul le médecin prescripteur autorisé a la possibilité de changer un médicament biologique (de référence ou son biosimilaire) par un autre, équivalent, en primo-prescription ou en cours de traitement. Selon l’ANSM, cette notion d’interchangeabilité peut avoir lieu à tout moment au cours du traitement, doit être raisonnée et tenir compte de l'intérêt du patient [11].

Si le médecin généraliste est autorisé à prescrire le biomédicament (insulines, énoxaparine sodique, tériparatide), il peut effectuer cette interchangeabilité.

Comment « switcher » d’un bioréférent vers un biosimilaire chez un patient ? Quelles précautions prendre, quelle surveillance ?

Trois principales conditions doivent être respectées lors du « switch » d’un bioréférent vers son biosimilaire [11] :

  • informer le patient et recueillir son accord ; ce point particulièrement important conditionne l’acceptation du traitement par le patient et donc l’observance qui en découle ;
  • assurer une surveillance clinique appropriée lors du traitement ;
  • assurer une traçabilité sur le biosimilaire concerné qui doit être inscrit dans le dossier du patient.

En cas d’effets indésirables, quel dispositif de déclaration de pharmacovigilance ?

En cas de survenue d’effets indésirables, le biosimilaire en cause est soumis, comme tout autre médicament, à la pharmacovigilance qui « a pour objet la surveillance, l'évaluation, la prévention et la gestion du risque d'effet indésirable résultant de l'utilisation des médicaments » tout au long de la vie du médicament.

La déclaration de pharmacovigilance peut être faite dès la question du rôle éventuel d’un biosimilaire dans la survenue de l’effet indésirable ou de l’incident constaté.

De plus, signalons qu’un plan de gestion des risques (PGR) est mis en place dès la demande d’AMM. Il vise à mieux caractériser, quantifier, prévenir ou minimiser les risques d’un médicament, à obtenir des informations éventuellement manquantes lors de la mise sur le marché et à surveiller le bon usage dans les conditions réelles d’utilisation [14].

Le pharmacien peut-il substituer ? Dans quelles conditions ? Quelles molécules sont concernées ?

À ce jour, le pharmacien d’officine est autorisé à substituer 9 biomédicaments dans les groupes suivants :

À l’officine, la substitution d’un médicament biologique par son biosimilaire se fait :

  • à l’intérieur d’un même groupe biologique similaire ;
  • à condition que le médecin ne s’oppose pas à cette substitution par l’apposition d'une mention expresse et justifiée portée sur l’ordonnance, tenant à la situation médicale du patient.

Le médecin prescripteur doit avertir le patient de la possibilité de substitution par le pharmacien du médicament biologique prescrit. Ceci évitera les problèmes éventuels d’hésitation, voire de refus du patient face à la substitution par le pharmacien.

Le pharmacien doit respecter les règles suivantes lors de la substitution :

  • informer le patient lors de la dispensation de la substitution effective et des informations utiles associées, dont le rappel des règles de conservation de la spécialité dispensée ;
  • mentionner sur l'ordonnance le nom du médicament effectivement dispensé ;
  • informer le médecin prescripteur quant au médicament dispensé (ces modalités d’information sont laissées à l’appréciation du pharmacien) ;
  • procéder à l'enregistrement du nom du médicament délivré par substitution et son numéro de lot par tous moyens adaptés afin de mettre en œuvre la traçabilité requise pour tous les médicaments biologiques ;
  • assurer la continuité de la dispensation du même médicament lors des dispensations suivantes [15, 16, 17, 18].

Que ce soit dans la prescription ou dans la dispensation, l’implication conjointe du prescripteur, du pharmacien et du patient (cf. Encadré 2) reste essentielle pour optimiser l’utilisation des biomédicaments et biosimilaires.

Encadré 2 - Quelques données pratiques concernant les droits du patient

La substitution par un biosimilaire obéit à un cadre réglementaire spécifique concernant les droits du patient :

  • si le médecin a prescrit un médicament biologique spécifique, celui-ci reste remboursé par l’Assurance maladie tant qu’il figure sur la liste des médicaments pris en charge (Code de la Sécurité sociale, article L.162-17).
  • le patient a le droit de refuser la substitution et d’exiger le biomédicament prescrit par son médecin. S’il souhaite continuer avec son traitement habituel, il doit en informer son pharmacien. Toutefois, il est possible pour le médecin d’apposer la mention « non substituable » sur l’ordonnance.
  • le pharmacien a l’obligation d’informer le patient de toute substitution avant de délivrer un médicament différent de celui prescrit (article L.5125-23-2 du Code de la Santé publique).
  • si après substitution le patient ressent des effets indésirables ou une baisse d’efficacité, il a le droit de demander à son pharmacien de revenir à son traitement initial. Dans ce cas, lors de la prochaine visite chez son médecin prescripteur, il pourra lui en parler afin qu’il ajuste la prescription et au besoin appose la mention « non substituable » sur l’ordonnance.

 

Commentaires

Ajouter un commentaire
En cliquant sur "Ajouter un commentaire", vous confirmez être âgé(e) d'au moins 16 ans et avoir lu et accepté les règles et conditions d'utilisation de l'espace participatif "Commentaires" . Nous vous invitons à signaler tout effet indésirable susceptible d'être dû à un médicament en le déclarant en ligne.
Pour recevoir gratuitement toute l’actualité par mail Je m'abonne !