
Entre 2019 et 2023, baisse de 95 % des initiations de traitement de 18 000 par mois à 1 000 environ.Pla2na / iStock / Getty Images Plus / via Getty Images
Le groupement d'intérêt scientifique GIS Epi-Phare publie une étude évaluant l'impact des mesures de réduction du risque de méningiome chez les patientes exposées à l'acétate de chlormadinone (LUTERAN) ou à l'acétate de nomégestrol (LUTENYL).
Depuis 2019, le nombre de prescriptions de ces progestatifs a baissé de 97 %, en raison des arrêts de traitement et d'une réduction des initiations. Le nombre de patientes était inférieur à 10 000 en 2023.
Alors que les examens d'IRM cérébrale en population exposée ont augmenté depuis 2021, le nombre de chirurgie de méningiomes intracrâniens attribuables à un traitement par chlormadinone ou nomégestrol a largement diminué, divisé par 10 en 5 ans.
Ces résultats montrent l'effet positif des mesures mises en place en France dès 2020. Néanmoins, les auteurs soulèvent des points de vigilance, notamment en cas de reports vers d'autres progestatifs, dont le désogestrel ou la médrogestone, pour lesquels un risque plus faible de méningiome est identifié.
Une récente étude pharmacoépidémiologique du groupement d'intérêt scientifique GIS Epi-Phare montre l'impact positif des mesures de réduction mises en place en France depuis 2019, pour réduire le risque de méningiome chez des patientes traitées par chlormadinone (5 mg ou 10 mg) ou nomégestrol (3,75 mg ou 5 mg).
Les résultats mettent en évidence [1, 2] :
- une diminution drastique de l'utilisation des acétates de chlormadinone et de nomégestrol (respectivement LUTERAN et LUTENYL) depuis 2020
- une réduction importante du nombre de méningiomes opérés dans la population de femmes exposées à ces deux progestatifs.
Beaucoup moins de femmes sous chlormadinone ou nomégestrol
L'analyse du GIS Epi-Phare s'appuie sur les données du Système national des données de santé (SNDS) sur la période de 2010 à 2023.
Après une diminution légère et progressive entre 2010 et 2018, on observe un effondrement des prescriptions des progestatifs chlormadinone et nomégestrol à partir de 2019 (cf. Illustration 1), année au cours de laquelle les premières alertes relatives au risque de méningiome ont été émises (cf. notre article du 12 février 2019).
Entre 2019 et 2023 :
- l’utilisation mensuelle s'est réduite de 97 %, passant de plus de 262 000 utilisatrices en 2019 à 8 800 en 2023 ;
- les initiations de traitement ont baissé de 95 %, passant de près de 18 000 par mois en 2019 à environ 1 000 par mois en 2023.
Cette chute brutale est observée dans toutes les classes d'âge.
Illustration 1 - Nombre mensuel d'utilisatrices d'acétate de cyprotérone, de chlormadinone et de nomégestrol entre 2010 et 2023 (selon la Figure A de [2])
À noter qu'en 2025, il n’y a plus de spécialités de chlormadinone, seul, commercialisées en France et uniquement seules deux spécialités de nomégestrol, seul, restent disponibles en pharmacie (LUTENYL 5 mg et NOMEGESTROL VIATRIS 5 mg).
Moins de chirurgies de méningiome dans un contexte de dépistage accru
L'étude Epi-Phare montre surtout une baisse massive du nombre de chirurgies de méningiomes intracrâniens attribuables aux acétates de chlormadinone et de nomégestrol :
- baisse de 90 % soit un nombre de chirurgies divisé par 10 en 5 ans (2018-2023) : 152 femmes en 2018 contre 15 en 2023.
Cette baisse est d'autant plus remarquable que le dépistage d'un méningiome en population exposée s'est développé, conformément aux recommandations de surveillance en vigueur pour la population exposée et initiées en 2020 (cf. nos articles du 18 juin 2020, du 13 janvier 2021 et du 13 juillet 2021). En 2023, 22
- 15 % chez les femmes traitées de plus de 1 an, par rapport à la période antérieure à 2021 ;
- 35 % chez les femmes traitées plus de 5 ans.
Pour rappel, l’ANSM recommande la réalisation d’une IRM cérébrale pour toute personne au bout d’un an de traitement lorsque celui-ci nécessite d’être poursuivi.
Selon les auteurs, « environ 150 interventions de neurochirurgie intracrânienne sont ainsi évitées chaque année » grâce à ces mesures de surveillance et à un diagnostic plus précoce (cf. Illustration 2).
Illustration 2 - Nombre de méningiomes opérés annuellement chez les femmes en France selon l'exposition dans l'année précédente à l'acétate de chlormadinone, de nomégestrol et de cyprotérone (2010-2023) (selon la Figure B de [2])
Report, cumul, surveillance : les points de vigilance soulevés par les auteurs
Pour les auteurs, la diminution de la chirurgie du méningiome attribuable à l’acétate de chlormadinone et/ou nomégestrol s’explique par 4 facteurs :
- la baisse des prescriptions, et donc de l’utilisation de ces progestatifs ;
- l’augmentation des arrêts de traitement ;
- la détection plus précoce des méningiomes avant le stade symptomatique ;
- et la diffusion des recommandations aux neurochirurgiens de privilégier l’abstention chirurgicale en cas d’exposition aux progestatifs macrodosés, couplée à une surveillance clinico-radiologique.
Si le bilan des mesures de réduction des risques apparaît globalement positif, les auteurs du rapport Epi-Phare soulignent des points de vigilance et des éléments à approfondir :
- risque lié au report vers d'autres progestatifs à risque de méningiome connu ultérieurement (médrogestone, désogestrel - cf. notre article du 2 juillet 2024) ou à risque non étudié à ce jour (diénogest). Parmi les 210 976 femmes qui ont stoppé leur traitement à base d’acétate de chlormadinone ou de nomégestrol après novembre 2020 et dans les 38 mois qui ont suivi, 39 % d’entre elles ont pris un autre progestatif, versus 28 % de celles qui avaient stoppé leur traitement avant novembre 2020. Les principaux médicaments identifiés en report sont le désogestrel (16 %), la médrogestone (4 %), le diénogest et la progestérone (cf. Illustration 3) ;
- prise en compte de la dose cumulée au cours de la vie et ses conséquences pour tous les progestatifs (chez les patientes auxquelles ont été prescrits des progestatifs de façon successive) ;
- une surveillance encore timide : la non-réalisation d'une IRM cérébrale est plus importante chez les femmes de plus de 50 ans par rapport aux femmes de moins de 30 ans, alors même que l’âge est un facteur déterminant de méningiome.
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[1] Progestatifs : les mesures sanitaires de réduction du risque montrent leur efficacité avec une diminution massive de l’utilisation des acétates de nomégestrol et de chlormadinone, et des méningiomes intracrâniens (ANSM, 13 juin 2025)
[2] Rapport GIS Epi-Phare sur l’évaluation de l’impact des mesures de réduction du risque de méningiome intracrânien lié à l’utilisation des acétates de nomégestrol et de chlormadinone (Epi-Phare, avril 2025)
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