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Omicron et anticorps monoclonaux : un arsenal très réduit, mais des alternatives

Tandis que le variant Omicron domine désormais l'épidémie de COVID-19 en France, la Direction générale de la Santé (DGS) actualise les données sur l'activité neutralisante des anticorps monoclonaux et sur la place de ces médicaments en prophylaxie et en curatif.
David Paitraud 06 janvier 2022 Image d'une montre6 minutes icon Ajouter un commentaire
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Représentation en 3D d'un anticorps dirigé contre le SARS-CoV-2 (illustration).

Représentation en 3D d'un anticorps dirigé contre le SARS-CoV-2 (illustration).

 
Résumé
Dans un DGS-Urgent en date du 4 janvier 2022, la Direction générale de la Santé (DGS) fait le point sur les données relatives aux anticorps monoclonaux dirigés contre le SARS-CoV-2 et mis à disposition en France.

Cet état des lieux est motivé par la forte progression du variant Omicron sur le territoire national et la résistance partielle ou totale développée par ce variant vis-à-vis des anticorps monoclonaux. 

Parmi les anticorps monoclonaux bénéficiant d'un accès précoce ou d'une autorisation temporaire d'utilisation (ATU), seul le médicament EVUSHELD (tixagevimab + cilgavimab) conserve une activité neutralisante vis-à-vis du variant Omicron, alors que les bithérapies RONAPREVE (casirivimab + indevimab) et bamlanivimab + etesevimab présentent une perte totale de cette activité. 

Sur la base de ces nouvelles données, les recommandations d'utilisation de ces médicaments ont été mises à jour dans les différentes situations préconisées chez les patients à risque de forme graves et non ou peu répondeurs aux vaccins : 
  • en préventif préexposition ;
  • en préventif postexposition ;
  • en curatif à domicile et en milieu hospitalier. 
De manière synthétique, en situation curative d'une infection COVID-19, RONAPREVE est la seule combinaison d'anticorps monoclonaux utilisable, mais uniquement en cas d'infection par le variant Delta. 
Des alternatives (antiviral, anti-inflammatoire, inhibiteur de l'interleukine 6) sont disponibles et envisageables chez les patients infectés par Omicron. 

En prophylaxie préexposition, RONAPREVE ne doit plus être utilisé. Seul EVUSHELD est recommandé dans cette situation. Les patients sous RONAPREVE doivent être basculés sous EVUSHELD. 

En prophylaxie postexposition, l'utilisation de RONAPREVE demeure possible, s'il s'agit d'un contact avec un patient infecté par le variant Delta. 

La DGS annonce par ailleurs la mise à disposition en France de nouveaux médicaments dirigés contre le SARS-CoV-2 : 
  • l'anticorps monoclonal sotrovimab (XEVUDY) : autorisation d'accès précoce attendue courant janvier, dans une indication préventive ; 
  • l'antiviral par voie orale PAXLOVID (PF-07321332 et ritonavir) : demande d'autorisation d'accès précoce annoncée pour fin janvier, dans une indication curative. 

En quelques jours, le variant Omicron du SARS-CoV-2 est devenu le variant dominant en France métropolitaine (62,4 % des tests de criblage selon Santé publique France au 27 décembre 2021 - 31 décembre 2021).

Ce variant se distingue des précédents par ses multiples mutations, à l'origine d'échappements immunitaires et de résistances partielles ou totales à l'activité neutralisante de certains anticorps monoclonaux (cf. notre article du 16 décembre 2021).

Ce constat conduit la Direction générale de la Santé (DGS) à actualiser la stratégie prophylactique (prophylaxie pré ou postexposition) et curative, qui repose en partie sur ces médicaments. Un état des lieux sur l'activité neutralisante des trois combinaisons d'anticorps monoclonaux disposant d'une autorisation d'accès précoce (AAP) ou d'une autorisation temporaire d'utilisation (ATU) est présenté dans un DGS-Urgent en date du 4 janvier 2021.  

Seul EVUSHELD conserve une activité neutralisante vis-à-vis d'Omicron
Selon la DGS, seul EVUSHELD (cf. notre article du 14 décembre 2021
) conserve une activité neutralisante vis-à-vis du variant Omicron. En effet : 
  • s'agissant de la bithérapie bamlanivimab + etesevimab (laboratoire Lilly) : perte totale d'activité neutralisante de chacun des anticorps du cocktail ;
  • concernant la bithérapie RONAPREVE (casirivimab + indevimab - Laboratoire Roche) : perte totale d'activité neutralisante de chacun des deux anticorps du cocktail ;
  • et pour la bithérapie EVUSHELD (tixagevimab + cilgavimab - laboratoire AstraZeneca) : conservation d'une activité neutralisante malgré une perte partielle d'activité sur Omicron.

La DGS précise également les données d'activité vis-à-vis d'Omicron pour deux anticorps non disponibles en France au 6 janvier 2022 :
  • regdanvimab (laboratoire Celltrion) : perte totale d'activité neutralisante ;
  • sotrovimab (XEVUDY - laboratoire GSK) : maintien de l'activité sur Omicron, selon les données in vitro. XEVUDY a obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne le 17 décembre 2021. Un avis pour un accès précoce, en traitement curatif de l'infection, est attendu courant janvier.

Prophylaxie, traitement curatif : quels anticorps monoclonaux utiliser en période de circulation d'Omicron ? 
Les nouvelles données relatives à l'activité neutralisante des anticorps monoclonaux vis-à-vis d'Omicron conduisent à réviser la place de ces combinaisons dans la stratégie thérapeutique de l'infection par SARS-CoV-2, en prophylaxie pré ou postexposition ou en traitement curatif (cf. Tableau I)

Pour rappel, les anticorps monoclonaux sont recommandés chez les patients à risque de formes graves, lorsque la réponse vaccinale est insuffisante ou absente (cf. notre article du 6 décembre 2021). 

Tableau I - Recommandations d'utilisation des anticorps monoclonaux disponibles en France à la date du 4 janvier 2022
(extrait du DGS-Urgent du 4 janvier 2022)
Anticorps monoclonaux bénéficiant d'un accès précoce Prévention préexposition Prévention postexposition Traitement curatif à domicile Traitement curatif en milieu hospitalier
EVUSHELD
tixagevimab + cilgavimab
OUI NON NON NON
RONAPREVE
casirivimab + indevimab
NON
(passage à EVUSHELD)
OUI,
uniquement si Delta 
OUI,
uniquement si Delta 
OUI,
uniquement si Delta 
bamlanivimab + etesevimab NON NON NON NON

Bamlanivimab et bamlanivimab + etesivimab : à ne plus utiliser
Le bamlanivimab seul ou combiné avec l'etesevimab n'ont plus de place dans la stratégie thérapeutique de la COVID-19, que ce soit en prophylaxie ou en curatif, dans un contexte de circulation active du variant Omicron. L'autorisation temporaire d'utilisation (ATU) de ces médicaments a été respectivement clôturée (pour la monothérapie) et suspendue (pour la combinaison) le 31 décembre 2021. Ils ne doivent plus être administrés.

Les stocks de bamlanivimab doivent être détruits selon les modalités habituelles, accompagnés d'un certificat de destruction à transmettre à qualite_covid19@santepubliquefrance.fr.

Les stocks de
la bithérapie bamlanivimab + etesevimab sont à conserver dans les pharmacies à usage intérieur (PUI). Ceux qui arriveraient à péremption doivent être détruits selon les modalités habituelles, accompagnés d'un certificat de destruction à transmettre à qualite_covid19@santepubliquefrance.fr.

RONAPREVE : uniquement en prophylaxie postexposition et en curatif d'une infection par le variant Delta
La combinaison RONAPREVE doit dorénavant être exclusivement réservée aux infections ou risque de contamination par Delta, et ne peut être utilisée qu'après réalisation d'un criblage à la recherche du type de variant : 
  • utilisation en prophylaxie postexposition, si le patient s'est trouvé en contact avec une personne infectée par le variant Delta, 
  • utilisation en curatif, si le patient est infecté par le variant Delta. 

On observe de fortes disparités régionales en termes de circulation des variants (régions avec forte circulation persistante de Delta, régions avec prédominance majeure d'Omicron), à prendre en compte par les prescripteurs.  

Prophylaxie préexposition : EVUSHELD uniquement
Seul EVUSHELD est désormais recommandé en prophylaxie préexposition chez les patients à risque de forme grave de COVID-19 et non éligibles ou non répondeurs à la vaccination. 

RONAPREVE n'a plus de place en prophylaxie préexposition (PrEP), 
en raison de la prépondérance du variant Omicron sur le territoire. Les patients actuellement traités par RONAPREVE pour cette indication doivent être basculés sous EVUSHELD. 

Quelles alternatives à RONAPREVE, en traitement curatif d'un patient infecté par Omicron ?
La DGS annonce la mise à disposition prochaine (courant janvier), sous réserve d'obtenir une autorisation d'accès précoce, du sotrovimab (XEVUDY) en traitement curatif des patients infectés par le SARS-CoV-2, y compris le variant Omicron. 

Dans l'attente de ce renfort thérapeutique et pour pallier l'impossibilité d'utiliser RONAPREVE chez les patients infectés par Omicron, des alternatives aux anticorps monoclonaux dirigés contre le SARS-CoV-2 peuvent être envisagées : 
  • l'antiviral VEKLURY (remdésivir - laboratoire Gilead), qui a obtenu une extension d'indication pour les patients non oxygénorequérants le 20 décembre 2021. Au regard des données disponibles à date, les premiers avis d'experts (ANRS MIE) conduisent à limiter l'utilisation des stocks disponibles en établissements de santé aux seuls patients hospitalisés (hospitalisation complète, de jour ou à domicile) atteints de COVID-19 avec variant Omicron et à risque élevé de forme grave, ayant des symptômes depuis moins de 5 jours. Cette dispensation s'accompagnera d'un suivi clinique sur les 3 jours d'administration et d'une PCR à J7. Tout événement indésirable devra être signalé au titre de la pharmacovigilance. Cependant, selon les informations dont dispose VIDAL, VEKLURY n'est plus commercialisé depuis juillet 2021 ;
  • l'anti-inflammatoire KINERET (anakinra – laboratoire Sobi), antagoniste du récepteur de l'interleukine-1 humaine, qui a obtenu une AMM le 17 décembre 2021 chez les patients atteints de COVID-19 avec pneumonie nécessitant une supplémentation en oxygène et à risque de progression vers une insuffisance respiratoire. Les établissements et les officines pourront s'approvisionner auprès de leur fournisseur selon les procédures d'achats habituelles ;
  • l'anticorps inhibiteur de l'interleukine (IL-6) ROACTEMRA (tocilizumab – laboratoire Roche), qui a obtenu une AMM le 6 décembre 2021 pour les patients atteints de COVID-19 recevant une corticothérapie systémique et nécessitant une supplémentation en oxygène ou une ventilation mécanique ;
  • la dexaméthasone à la posologie de 6 mg/j à dose fixe, pour une durée de 10 jours au maximum, pour des patients hospitalisés présentant des symptômes évoluant depuis une semaine.

Un antiviral per os pour fin janvier ? 
La DGS indique que l'antiviral par voie orale PAXLOVID (PF-07321332 + ritonavir) du laboratoire Pfizer
fera l'objet d'une demande d'autorisation d'accès précoce d'ici à la fin janvier, dans une indication curative.

Ce médicament 
a reçu un avis de l'Agence européenne du médicament (EMA) pour une utilisation précoce le 16 décembre 2021, mais ne dispose pas à ce jour d'AMM européenne.

Pour aller plus loin
Mise à jour des informations relatives à l'utilisation des anticorps monoclonaux et des autres traitements en lien avec l'évolution de l'épidémie de COVID-19 liée au SARS-CoV-2 : impact de la diffusion du variant Omicron (DGS-Urgent n° 2022-03, 4 janvier 2022)
Traitements par anticorps monoclonaux actuellement disponibles contre la Covid-19 et utilisation selon les variants (ANSM, 5 janvier 2022)
 
Sources

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