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Antiépileptiques et grossesse : 5 molécules associées à un risque élevé de malformation congénitale s'ajoutent au valproate

Une hiérarchisation des niveaux de risque de malformation congénitale associé aux antiépileptiques est proposée par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) dans un rapport publié le 24 avril 2019

Il ressort de ce rapport que le valproate (DEPAKINE, DEPAKINE CHRONO, DEPAMIDE, MICROPAKINE LP, DEPAKOTE, et génériques) reste l'antiépileptique qui présente le risque le plus important, en cas d'exposition fœtale. 

Cinq autres substances présentent un risque de malformation élevé par rapport à la fréquence observée dans la population générale : le topiramate (EPITOMAX et génériques), le phénobarbital (GARDENAL, ALEPSAL), la primidone (MYSOLINE), la carbamazépine (TEGRETOL et génériques) et la (fos) phénytoïne (DILANTIN, PRODILANTIN, DI-HYDAN).

L’ANSM appelle par ailleurs à la vigilance sur l’utilisation de la prégabaline (LYRICA et génériques) étant donné le risque malformatif congénital potentiel et sa prescription importante en France.

Pour la lamotrigine (LAMICTAL et génériques), le lévétiracétam (KEPPRA, LEVIDCEN, et génériques) et l'oxcarbazépine (TRILEPTAL et génériques), aucun signal d'alerte concernant le risque de malformation n'est observé à ce jour.

L'analyse de l'ANSM porte en outre sur le risque de troubles neuro-développementaux.
S'ils sont avérés lors de la prise de valproate au cours de la grossesse, les données restent actuellement limitées pour les autres antiépileptiques et ne permettent pas, à ce stade, de conclusion définitive. Ce risque doit néanmoins être considéré lors de la prescription. 

Sur le modèle du valproate, de nouvelles mesures de réduction des risques applicables à ces antiépileptiques devraient être proposées prochainement.
David Paitraud 26 avril 2019 02 mai 2019 Image d'une montre5 minutes icon Ajouter un commentaire
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Les femmes enceintes ne doivent en aucun cas prendre un médicament ni arrêter ou modifier un traitement qui lui a été prescrit sans en avoir préalablement parlé avec son médecin (illustration).

Les femmes enceintes ne doivent en aucun cas prendre un médicament ni arrêter ou modifier un traitement qui lui a été prescrit sans en avoir préalablement parlé avec son médecin (illustration).


L'Agence du médicament (ANSM) a diffusé mercredi 24 avril 2019 un rapport sur le risque de malformations et de troubles neuro-développementaux associé aux antiépileptiques commercialisés en France, en cas d'exposition in utero.

Cette analyse s'appuie sur l'ensemble des données disponibles au 1er septembre 2015, issues de la littérature scientifique et des données de pharmacovigilance des titulaires des médicaments. 
Les nouvelles études publiées entre septembre 2015 et juin 2018 (période de revue des données et de rédaction du rapport) ont également été prises en compte lorsqu'elles apportaient des éléments supplémentaires. 

Cette analyse complète les travaux déjà réalisés sur le valproate et les risques associés à une exposition in utero (Cf. Exposition in utero à l'acide valproïque et aux autres traitements de l'épilepsie et des troubles bipolaires et risque de malformations congénitales majeures (MCM) en France. Rapport de l'ANSM, juillet 2017)


Malformation congénitale : 5 substances associées à un sur-risque
Les données relatives au risque de malformation sont les plus fournies : leur analyse a permis de hiérarchiser une partie des antiépileptiques en fonction du niveau de risque correspondant à une augmentation de la fréquence globale de malformations par rapport à la fréquence observée en population générale (Cf. Figure 1).

 
Figure 1 - Vue d'ensemble sur le risque global de malformations établi en avril 2018 (d'après Rapport de l'ANSM, avril 2019)

Le valproate (DEPAKINE, DEPAKINE CHRONO, DEPAMIDE, MICROPAKINE LP, DEPAKOTE, et génériques) est l'antiépileptique le plus à risque de malformations congénitales, avec une fréquence multipliée par 4 à 5 par rapport à la population générale. 

Parmi les 21 substances antiépileptiques analysées, cinq ont été identifiées comme étant à risque accru :

En revanche, les données ne montrent pas d'augmentation de la fréquence des malformations congénitales pour la lamotrigine (LAMICTAL et génériques), le lévétiracétam (KEPPRA et génériques, LEVIDCEN) et l'oxcarbazépine (TRILEPTAL et génériques). 

Topiramate et prégabaline : "particulièrement préoccupants"
Les auteurs du rapport soulignent le profil de sécurité d'emploi "particulièrement préoccupant" de deux substances antiépileptiques, en raison de leur profil à la fois de risque et d'utilisation : le topiramate (EPITOMAX et génériques) et la prégabaline (LYRICA et génériques
).

Le topiramate associe, en effet, une tératogénicité avérée,
 comme vu sur la Figure 1 (en particulier risque accru de fentes orales et d'hypospadias), et un risque potentiel de troubles neurodéveloppementaux (signal).
Les auteurs du rapport précisent que les femmes sont les plus exposées à cet antiépileptique  (environ 3/4 des patients de 15 à 49 ans), leur niveau d'exposition est élevé (environ 30 000 femmes en âge de procréer traitées en 2015), et en augmentation au cours du temps et des usages hors AMM identifiés "notamment à des fins amaigrissantes et dans le trouble bipolaires".

La prégabaline (LYRICA et générique) et la gabapentine (NEURONTIN), dont la structure est proche, cumulent pour leur part un risque potentiel de malformation congénitale (Cf. Figure 1) et un niveau d'exposition très élevé (de l'ordre de 150 000 femmes en âge de procréer traitées en 2016), en augmentation au cours du temps, dans des indications multiples et des usages hors AMM identifiés, notamment dans les douleurs neuropathiques.

L'ANSM appelle donc à la vigilance au regard du risque malformatif potentiel et de la prescription importante en France de ces deux antiépileptiques.

Absence de données pour les autres antiépileptiques
Faute de données, les conclusions relatives au risque de malformation ne concernent pas l'eslicarbazépine (ZEBINIX), l'éthosuximide (ZARONTIN), le lacosamide (VIMPAT), le pérampanel (FYCOMPA), la rétigabine (TROBALT, en arrêt de commercialisation), le rufinamide (INOVELON) et la tiagabine (GABITRIL).
 
L'ANSM rappelle néanmoins que l'absence de données ne signifie pas une absence de risque : elle recommande la prudence lors de l'utilisation de ces substances chez la femme enceinte. 

Pas de conclusions sur le risque de troubles neuro-développementaux 
Pour le valproate, le risque de troubles neuro-développementaux lié à une exposition in utero est avéré.
S'agissant des autres anti-épileptiques, "les données sur ce type de risque restent actuellement limitées" (CfFigure 2). 

 
Figure 2 - Vue d'ensemble sur le risque de troubles neurodéveloppementaux 
(Rapport ANSM, avril 2018)
 
Si les auteurs ne proposent pas de conclusion définitive, ce risque n'est pas exclu et doit être pris en considération lors de l'utilisation de ces antiépileptiques pendant la grossesse et chez les femmes en âge de procréer.

Des mesures complémentaires à venir
Cette analyse servira de base à l'élaboration de mesures complémentaires de réduction des risques liés à l'exposition in utero aux antiépileptiques.
Un comité d'experts indépendants (CSST) doit se réunir le 14 mai 2019.

En attendant, les professionnels de santé sont invités à rappeler aux patientes traitées par un anti-épileptique de :
  • ne pas arrêter ni modifier le traitement sans avis médical, 
  • consulter leur prescripteur en cas de désir de grossesse ou de grossesse en cours (Cf. Figure 3). 

Figure 3 - Information destinée aux patientes traitées par anti-épileptique


Pour aller plus loin
Antiépileptiques au cours de la grossesse : Etat actuel des connaissances sur les risques de malformations et de troubles neuro-développementaux - Point d'information (ANSM, 24 avril 2019)
Synthèse du rapport Antiépileptiques au cours de la grossesse : Etat actuel des connaissances sur le risque de malformation et de troubles neuro-développementaux (ANSM, 24 avril 2019)
Rapport Antiépileptiques au cours de la grossesse : Etat actuel des connaissances sur le risque de malformations et de troubles neuro-développementaux (ANSM, 24 avril 2019)

Sur VIDAL.fr
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