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COVID-19 : continuer l'analyse du suivi épidémiologique est nécessaire

Le 25 mai dernier, nous avions souhaité mettre un terme temporaire à ce point hebdomadaire de la Vidal News sur le suivi de l'épidémie (voir les actualités VIDAL du 7 [partie 1 et partie 2], 141724 avril et du 411 et 15  et 25 mai 2020).
Cependant, après la semaine 21 (du 19 au 25 mai 2020), et alors que la semaine 22 est déjà fort entamée, trois raisons nous ont amenés à poursuivre notre analyse, au cours de la phase incertaine d'un déconfinement progressif pleinement justifié.
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COVID-19 : des chiffres qui peuvent en dire long (illustration).

COVID-19 : des chiffres qui peuvent en dire long (illustration).


Alors que le déconfinement se poursuit, trois raisons nous ont incités à reprendre l'analyse des dernières données provenant de Santé publique France :
 
  • Le dépistage adapté et orienté des personnes porteuses du SARS-CoV-2 est sur les rails : après presque trois semaines de flottement dû à un changement dans le recueil de l'information, le nouveau système d'information de dépistage (SI-DEP) est enfin opérationnel.
  • Il faut suivre le nombre, l'évolution, le devenir de clusters, dont la découverte, la prise en charge et la gestion constituent l'arme essentielle pour traiter toute résurgence de l'infection. L'application StopCovid, qui doit entrer en fonction le 2 juin, sera peut-être un élément complémentaire de la gestion des sujets infectés.
  • Le suivi des cas identifiés, hospitalisés, décédés, guéris est toujours nécessaire, le nombre de nouveaux cas restant un indice décisif pour affirmer le contrôle de l'épidémie.
 
Le nombre de consultations pour suspicion de COVID-19 est devenu un paramètre secondaire de surveillance
Lors de la semaine 21, le nombre de consultations pour suspicion de COVID-19,
enregistrées à partir des données du Réseau Sentinelles, de l'association SOS médecins et
du réseau Oscour®, est en diminution. On compte ainsi, en médecine générale, environ 25 000 actes, consultations et téléconsultations ; dans le réseau SOS Médecins, 2 209, et 5 953 passages aux urgences, dont 36 % ont donné lieu à une hospitalisation.
Au total, il y a eu environ 32 200 consultations en semaine 21, contre 44 000 en  semaine 20.
 
La surveillance virologique
La surveillance virologique s'appuie désormais sur le système SI-DP (système d'information de dépistage), opérationnel depuis le 13 mai 2020. Ce nouveau système de surveillance vise au suivi exhaustif de l'ensemble des patients testés en France, dans les laboratoires de ville et dans les laboratoires hospitaliers. Actuellement, les données transmises concernent les tests RT-PCR réalisés. Prochainement, les données des sérologies seront également transmises.
Au 27 mai 2020, la quasi-totalité des laboratoires (4 700 sites de prélèvements) a transmis des données.
Au cours de la semaine 21,  216 891 patients ont été testés pour le SARS-CoV-2 et, pour 4 119 patients, les tests se sont révélés positifs. Le taux de positivité national hebdomadaire était de 1,9 %. Ce taux est comparable aux taux de positivité des semaines 19 et 20 (respectivement 3 % et 2 %), issus des données du réseau 3 labo. Sous toute réserve, car il n'y a eu au 30 mai 2020 aucune évaluation officielle, le nombre de tests effectués en France est probablement autour de 1 300 000, ce qui correspond à environ 2 % de la population testée. À titre de comparaison, au 25 mai, l'Allemagne aurait réalisé près de 4 millions de tests, soit chez 4,7 % de la population.
En France métropolitaine, le taux de positivité était inférieur à 5 % sur l'ensemble des départements. Le taux d'incidence (nombres de nouveaux cas rapportés à la population pour 100 000 habitants) était, au niveau national, de 6,1/100 000 habitants. Il était inférieur à 10/100 000 pour la très grande majorité des départements. Les taux d'incidence les plus élevés ont été observés dans la Vienne (24,7/100 000 habitants), les Côtes d'Armor (21,0/100 000 habitants) et la Meuse (22,6/ 100 000 habitants), départements où des clusters sont en cours d'investigation (cf. Figure 1).
 
Figure 1 - Taux d'incidence de SARS-CoV-2 pour 100 000 habitants par département,
semaine 21 (18 au 24 mai 2020) - Source SI-DEP
 
Nombre de cas confirmés de COVID-19 depuis janvier 2020
Entre le 21 janvier et le 28 mai 2020, 149 071 cas de COVID-19 ont été confirmés en France
Au cours de la vague épidémique, et jusqu'à la levée des mesures de confinement en date du 11 mai, tous les patients présentant des signes de COVID-19 n'ont pas bénéficié systématiquement d'un test biologique pour confirmer une infection. Le nombre réel de cas de COVID-19 en France est donc supérieur au nombre estimé de cas confirmés.
Depuis le déconfinement, il est demandé que les patients présentant des symptômes évocateurs du COVID-19, ainsi que les sujets contact d'un cas confirmé, soient dépistés pour le SARS- CoV-2. À compter de cette date, et grâce au système SI-DEP, le nombre de cas confirmés permet désormais d'estimer le nombre réel de cas de COVID-19 en France. Cette estimation peut cependant être sous-estimée du fait de l'absence de dépistage systématique de personnes infectées symptomatiques ou asymptomatiques.
 
Signalement des clusters à visée d'alerte
Depuis la levée du confinement, le 11 mai 2020, les agences régionales de santé (ARS), en lien avec les cellules régionales de Santé publique France et les partenaires locaux, investiguent les clusters (foyers de transmission ou épisodes de cas groupés) qui ont été détectés. Le traçage et le dépistage des personnes contact permettent de contrôler ces foyers. Un cluster est défini par la survenue d'au moins 3 cas confirmés ou probables, dans une période de 7 jours, et qui appartiennent à une même communauté ou ont participé à un même rassemblement de personnes, qu'elles se connaissent ou non. Le système d'information MONIC (MONItorage des Clusters) permet de présenter ce bilan.
Au 27 mai 2020, avec le développement de la capacité diagnostique, un total de 109 clusters (hors EHPAD et milieu familial restreint) a été rapporté à Santé publique France : 104 en France métropolitaine et 5 dans les départements régions d'outre-mer.
Parmi ces clusters, 64 % comportaient plus de 5 cas. Ils concernaient notamment des personnes en situation de précarité et de vulnérabilité (19 % en établissements d'hébergement social et d'insertion, et 6 % en communautés vulnérables), des établissements de santé (22 %) et, plus largement, des entreprises (20 % d'entreprises privées et publiques) (cf. Figure 2).
Concernant la criticité (potentiel de transmission ou critères de gravité), 75 % des clusters ont été évalués de criticité modérée (37 %) à élevée (38 %). La majorité des clusters est en cours d'investigation (80 %) [clusters actifs en termes de nouveaux cas avec mise en place de premières mesures de contrôle : cf. Figure 2], 13 % ont été maîtrisés (suivi des contacts en cours et absence de nouveaux cas 7 jours après le dernier cas), 7 % sont clôturés (absence de nouveaux cas 14 jours après la date de début des signes du dernier cas et la fin de la quatorzaine de tous les contacts). Aucune diffusion communautaire (survenue de nouveaux cas hors de la collectivité et en lien avec le cluster) non contrôlée n'a été rapportée.
 
Figure 2 - Répartition des clusters en cours d'investigation par département, entre le 9 et le 27 mai 2020 (N = 87) - données au 27 mai 2020 - Source MONIC.           
 
Dans les établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS)
Depuis le 1er mars, il y a eu 74 402 cas de COVID-19, 10 335 décès dans les établissements d'accueil et 3 778 décès après un transfert à l'hôpital. Au total, 14 113 personnes issues des ESMS sont décédées. La proportion de décès à l'hôpital, rapportée au nombre total de décès, est de 27 %. Le nombre de décès chez les résidents a atteint un pic début avril et décroît depuis.
Il est remarquable, qu'en plus de ces chiffres, 41 238 cas ont été rapportés parmi les
membres du personnel des ESMS, parmi lesquels 20 017 (49 %) cas ont été confirmés. Cet
important collectif de soignants n'est néanmoins pas mentionné dans le chapitre
"Surveillance des professionnels des établissements de santé". On ignore donc s'il
y a eu des décès parmi les membres de ces personnels.
 
Hospitalisations et admissions en réanimation en baisse, et retours à domicile en augmentation
Le 29 mai 2020, 14 695 cas de COVID-19 étaient hospitalisés en France dont 1 351 en réanimation.
Le nombre de nouvelles hospitalisations pour COVID-19 continue de diminuer au cours de
la semaine 21 : 2 201 cas versus 3 218 en semaine 20, et 4 265 en semaine 19.
Le 26 mai 2020, 37 nouvelles admissions en réanimation de patients COVID-19 ont été
rapportées. Le nombre de nouvelles admissions a baissé en semaine 21 (268 versus 429 cas en semaine 20 et 528 en semaine 19).
Le nombre journalier de cas hospitalisés en réanimation décroît depuis le 8 avril. Au 29
mai, les patients de réanimation pour COVID-19 occupaient 5 800 lits de moins.
Du 1er mars au 26 mai, 100 841 patients ont été hospitalisés (âge médian de 72 ans, 54 %
d'hommes) et 18 195 sont décédés dans les hôpitaux (71 % étaient âgés de 75 ans et plus,
59 % étaient des hommes).
Au 29 mai, 67 803 patients étaient retournés à leur domicile.
 
Cas pédiatriques de myocardite avec état de choc cardiogénique
Au 26 mai 2020, 172 signalements de syndromes inflammatoires multisystémiques
pédiatriques (PIMS), confirmés ou suspectés d'être en lien avec la COVID-19, ont été signalés, soit 23 cas de plus en semaine 21. Quatre-vingt-dix (51 %) ont concerné des filles.
Dans 122 cas, un lien avec la COVID-19 était possible, probable ou prouvé, et les syndromes d'inflammation multisystémique étaient associés à une myocardite chez 83 patients (68 %). Parmi les 50 cas sans lien établi avec la COVID-19, la présence d'une myocardite n'a été constatée que pour 6 d'entre eux.
Un séjour en réanimation a été nécessaire pour 80 enfants et en unité de soins critiques pour 26. Les autres ont été hospitalisés en service de pédiatrie.
Au total, les données recueillies confirment l'apparition rare d'un syndrome inflammatoire
multisystémique chez l'enfant, avec une atteinte cardiaque fréquente, lié à l'épidémie de COVID-19. Cette pathologie a également été observée dans d'autres pays (Royaume-Uni, États-Unis).
Après un pic observé en semaine 18, le nombre de nouveaux cas signalés a diminué de
manière importante.
 
Surveillance des professionnels des établissements de santé contaminés
Cette surveillance a été mise en place depuis le 22 avril 2020 et a pour objectif de recenser
les professionnels salariés d'un établissement de santé (ES) d'hospitalisation, public ou
privé, ayant été infectés par le SARS-CoV-2 depuis le 1er mars 2020. Ces sujets font en effet partie d'une population particulièrement exposée au SARS-CoV-2.
Les cas sont dits confirmés lorsque la PCR est positive, et dits probables lorsque différents
éléments (clinique, historique de contact ou imageries évocatrices) permettent à la "cellule
COVID-19" ou au référent infectiologue de l'établissement de santé, d'évoquer le diagnostic.
Depuis le 1er mars, 30 230 cas ont été signalés par 1 156 établissements, répartis dans les
18 régions françaises.
Parmi ces 30 320 cas, 25 327 (84 %) étaient des professionnels de santé et 3 083 (10 %)
des professionnels non soignants. Une grande partie des cas était des infirmiers (29 %) ou
des aides-soignants (24 %).
Au total, 16 décès liés à l'infection à SARS-CoV-2 ont été rapportés depuis le 1er mars
2020, dont 5 médecins, 4 aides-soignants, 1 professionnel de santé "autre" et 6
professionnels non soignants.
En tenant compte des professionnels des établissements de santé (ES) et des
établissements médico-sociaux (ESMS), ce sont donc 71 558 professionnels qui ont été
signalés à Santé publique France (30 320 cas survenus dans les ES et 41 238 cas
dans les ESMS) comme ayant été infectés par le SARS-CoV-2. Ces chiffres peuvent
néanmoins être sous-estimés du fait que l'enquête ES n'a débuté que récemment et que
l'exhaustivité de ces surveillances ne peut être affirmée.
Ces données ne tiennent pas non plus compte des cas survenus chez des professionnels de santé libéraux qui peuvent, s'ils ont été atteints, participer à l'enquête proposée sur le site du Geres.
Nous nous sommes déjà exprimés lors des chroniques hebdomadaires précédentes sur l'absence de mention autour des décès de soignants, certainement beaucoup plus nombreux que ceux qui sont actuellement officialisés. Nous répétons que faire mention de ces morts serait convenable.
 
Synthèse des données recueillies au cours de la semaine 20 (du 13 au 19 mai 2020)
  • Le nombre de consultations pour suspicion de COVID-19 diminue encore, avec un chiffre  autour de 32 200 par semaine.
  • Le nombre de nouveaux cas confirmés par jour, paramètre essentiel du suivi de l'épidémie, est constamment inférieur à 1 000 depuis le 7 avril, et ce chiffre est souvent en dessous de 500/jour. Cependant, on observe une augmentation ponctuelle (plus de 3 000 cas le 28 mai), qui peut être due à la mise en œuvre récente du nouveau système de suivi SI-DEP.
  • Il est encore trop tôt pour évaluer les conséquences des 104 clusters métropolitains parmi lesquels seulement une vingtaine sont considérés aujourd'hui comme clos. Cependant, il est remarquable qu'aucune diffusion communautaire (survenue de nouveaux cas hors de la collectivité et en lien avec le cluster) non contrôlée n'ait été rapportée.
  • Le R0 aurait un peu remonté au cours des semaines 20 et 21 et était, le 28 mai 2020, de 0,77, donc toujours inférieur à 1.
  • La baisse des nouvelles hospitalisations et des nouvelles admissions en réanimation de patients COVID-19 se poursuit.
  • Du 8 avril au 29 mai, le nombre de lits de réanimation occupés par des patients
  • atteints de COVID-19 a diminué de 5 800.
  • Un excès de la mortalité toutes causes est observé au niveau national, particulièrement marqué depuis la semaine 13 dans les régions Grand Est et Île-de-France. La part de la mortalité attribuable à l'épidémie de COVID-19 reste toutefois à déterminer.
  • Les enfants sont peu concernés par cette épidémie et représentent moins de 1 % des patients hospitalisés et des décès. Et ce, même en tenant compte des événements nouveaux (rapportés plus haut) de myocardites avec état de choc cardiogénique, évoquant la maladie de Kawasaki.
  • Les personnes âgées de 65 ans et plus sont fortement touchées par cette épidémie : elles représentent 72 % des patients hospitalisés, 54 % de ceux hospitalisés en réanimation et plus de 93 % des décès.
  • Les malades ayant des comorbidités sont également fortement concernés et représentent 80 % des patients hospitalisés en réanimation et des décès.
 
Conclusion 
Trois semaines après le déconfinement, et alors que la France entre dans une nouvelle phase de retour à la normale, les résultats observés reflètent l'impact positif des mesures de contrôle de
l'épidémie. Ils confirment la diminution des nouvelles contaminations en France et mettent en évidence la baisse des nouvelles hospitalisations et des nouvelles admissions en réanimation pour COVID-19.
L'évolution a été favorable pour la majorité des patients hospitalisés et, au 29 mai 2020, près de
68 000 personnes étaient retournées à leur domicile à la sortie de l'hôpital : soit près de 68 %
des patients COVID-19 qui ont été hospitalisés (sachant que près de 18 % des
hospitalisés sont décédés).
La suite nécessite, faut-il encore le répéter, le maintien de l'adhésion de la population à
l'ensemble des mesures de prévention, afin de maintenir un niveau aussi faible que possible
de transmission. Le contrôle rapide des clusters, qui ne manqueront pas encore de survenir,
est indispensable.
Mais, comme nous l'avons dit le 25 mai dernier, c'est maintenant seulement que vient le temps de débrouiller la "vraie" histoire d'une incroyable maladie infectieuse.
 

©vidal.fr

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