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Puberté précoce : les signes d’appel

L’augmentation du volume des seins avant 8 ans chez la fille et du volume des testicules avant 9 ans chez le garçon sont des signes d’appel de puberté précoce.

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Le plus souvent idiopathique chez la fille.

Le plus souvent idiopathique chez la fille.

Résumé

La puberté précoce, le plus souvent d’origine centrale, correspond à un début de la maturation sexuelle avant l’âge habituel.

La reconnaître tôt est important, car elle expose au risque de petite taille à l’âge adulte et à une mauvaise tolérance psychologique de l’enfant.

L’apparition des seins chez la fille avant l’âge de 8 ans et l’augmentation du volume testiculaire chez le garçon avant l’âge de 9 ans sont des signes d’appel, qui doivent conduire à un interrogatoire et un examen clinique minutieux, complétés si besoin par des premières explorations en ville avant un avis spécialisé.

La puberté précoce expose à un risque de petite taille à l’âge adulte et à une mauvaise tolérance par l’enfant et doit ainsi être reconnue dès l’apparition des premiers signes pubertaires afin de pouvoir, le cas échéant, proposer une prise en charge. Il est donc important d’évaluer le statut pubertaire des enfants une fois par an.

La puberté précoce peut être d’origine centrale, dépendante de la sécrétion de la Gonadotropin-Releasing Hormone (GnRH)*, par l’hypothalamus à proximité de l’hypophyse, cas le plus fréquent. Elle est plus rarement d’origine périphérique, indépendante de la GnRH et sans activation de l’axe gonadotrope, alors en lien avec une pathologie surrénalienne ou gonadique.

Chez la fille, la puberté précoce centrale est dans 90 % des cas idiopathique, alors qu’une cause sous-jacente est présente dans les trois quarts des cas chez le garçon, qui doit alors bénéficier d’une orientation rapide vers une consultation spécialisée.

*appelée aussi parfois gonadolibérine ou Luteinizing Hormone Releasing Hormone (LHRH)

 VIDAL. Que définit la puberté ?

Dr Anne-Sophie Lambert. La puberté correspond à l’ensemble des phénomènes psychiques, physiques, mentaux et affectifs qui caractérisent la transition entre l’enfance et l’âge adulte.

  • Sur le plan physique, elle est principalement marquée par l’acquisition des caractères sexuels secondaires, la maturation de la fonction gonadique, l’acquisition des fonctions de la reproduction et une accélération de la vitesse de croissance.
     
  • Physiologiquement, elle se traduit par une réactivation de l’axe gonadotrope, qui stimule alors la sécrétion de Follicle-stimulating hormone (FSH) et de Luteinizing hormone (LH) au niveau de l’hypophyse.

Chez le garçon, la sécrétion de testostérone entraîne la prolifération des cellules germinales, qui se traduit par une augmentation de la taille des testicules, premier signe de la puberté, l’apparition d’une pilosité pubienne et une augmentation de la taille de la verge.

Chez la fille, la sécrétion d’estrogènes conduit au développement mammaire et à une augmentation de la taille de l’utérus.

Quelles sont les limites d’âge de la puberté normale 

L’âge de la puberté connaît de grandes variations : les limites de la puberté normale sont donc assez larges. Chez le garçon, l’augmentation du volume testiculaire qui, je le rappelle, est le premier signe visible du développement pubertaire, se produit entre 9,5 ans et 14 ans (12 ans en moyenne), la croissance de la verge entre 11 et 15 ans (13 ans en moyenne) et l’apparition des poils pubiens entre 11,5 et 15,5 ans (13,5 ans en moyenne). 

Si l’on veut dépister une puberté précoce débutante, il est donc important d’évaluer la taille des testicules chez le garçon dès l’âge de 8 ans, voire plus tôt dans le cadre de l’examen clinique annuel systématique de l’enfant. Ce dernier sera ainsi habitué à être régulièrement examiné. L’augmentation de la taille des testicules est significative au-delà de 3 cm.  

Chez la fille, l’augmentation du volume des seins, premier signe du développement pubertaire, survient de façon physiologique entre 8 ans et 13,5 ans (11 ans en moyenne). Les poils pubiens apparaissent entre 9,5 ans et 14 ans dans la population caucasienne (12 ans en moyenne, mais plus tôt dans les populations non caucasiennes) et les premières règles entre 10,5 ans et 15 ans (13 ans en moyenne).

Qu’en est-il de la vitesse de croissance ?

À côté de l’évolution des organes génitaux externes, il faut aussi prendre en compte la vitesse de croissance, dont l’accélération est un des signes du démarrage pubertaire. La vitesse de croissance, inférieure à 4,5 cm par an avant la puberté, dépasse 5 cm par an au moment de la puberté (en dehors d’une prise de poids), et atteint en moyenne à 8 à 10 cm par an.

Le pic de croissance pubertaire est en moyenne de 20 cm chez la fille et de 25 cm chez le garçon. Les courbes de croissance ont évolué il y a quelques années en France afin de prendre en compte l’augmentation de la taille et du poids des nourrissons et des petits enfants. Mais la taille finale des garçons (1,78 m) et des filles (1,65 m) a, elle, peu évolué.

Quels sont les facteurs influençant la puberté ?

Ils sont nombreux, d’ordre génétique (poids et taille des parents et de la fratrie), liés aux conditions de naissance (retard de croissance intra-utérin, petit poids pour l’âge gestationnel, qui accroît le risque de puberté avancée), à l’origine ethnique, au niveau socio-économique ainsi qu’à différents facteurs environnementaux : nutrition, stress, perturbateurs endocriniens au sens large (sans que l’on puisse incriminer telle ou telle molécule).

Y a-t-il des situations physiologiques particulières à distinguer d’une puberté précoce ?    

On distingue globalement trois variantes physiologiques :

  1. La première est l’adrénarche, ou puberté surrénalienne liée au développement et à la maturation de la zone réticulée de la corticosurrénale à partir de l’âge de 6 ans. Elle est marquée par l’apparition d’une pilosité pubienne et éventuellement axillaire avant l’âge de 7 ans chez la fille et de 9 ans chez le garçon, parfois d’une acné et d’une sudation malodorante, qui signe l’origine surrénalienne. Il n’y a pas de signe de poussée pubertaire (ni poussée mammaire, ni croissance testiculaire), ni d’hypertrophie clitoridienne, ni d’accélération de la croissance ou d’avance osseuse, autant de signes qui nécessiteraient un bilan pour éliminer une puberté précoce d’origine périphérique. L’adrénarche ne nécessite pas de bilan particulier, mais impose une surveillance de l’enfant, car elle est associée à un risque accru de puberté précoce.
     
  2. Autre variante physiologique, très fréquente (une petite fille sur quatre), le développement isolé des seins, ou thélarche précoce, qui survient principalement avant l’âge de 3 ans. Il n’y a pas de pilosité pubienne ni d’accélération staturale, le taux d’estradiol est bas. Il n’y a pas de traitement et l’évolution se fait vers la régression spontanée (70 % des cas) ou la stabilité. Il est important de suivre étroitement l’enfant (la revoir à trois ou six mois) afin de s’assurer que le développement des seins reste isolé. En cas de persistance après l’âge de 3 ans ou d’évolution, l’enfant doit être orienté vers un spécialiste pour des investigations complémentaires.
     
  3. La ménarche prématurée enfin, qui correspond à la survenue de un à trois épisodes de menstruations en début de puberté.

Quelle est la démarche face à des signes évocateurs d’une puberté précoce ?

Le diagnostic de puberté pathologique n’est posé qu’au terme d’une démarche précise et approfondie, dans laquelle l’examen clinique joue un rôle essentiel. L’interrogatoire recherche des facteurs familiaux (paramètres de naissance, tailles familiales, âge de la puberté des parents et de la fratrie) et des signes cliniques pouvant orienter vers certaines pathologies organiques. Il s’agit notamment de signes abdominaux, de troubles visuels, d’un syndrome polyuropolydipsique, de la survenue de crises épileptiques gélastiques (rires sans raison) évocatrices d’un hamartome hypothalamique, ou encore de tâches cutanées, orientant vers une neurofibromatose de type 1 ou un syndrome de McCune-Albright.

Il faut également analyser les courbes de croissance (ce qui souligne l’importance de mesurer les enfants au moins une fois par an) afin de confirmer l’accélération de la croissance, qui est souvent associée à une avance de cette dernière au moment du diagnostic et qui va de pair avec une avance de l’âge osseux. Il importe aussi de bien évaluer le retentissement du développement pubertaire chez l’enfant, dans son environnement familial et scolaire.

Lorsqu’une origine centrale est suspectée chez une petite fille (apparition des seins avant l’âge de 8 ans, soit S2 de la classification de Tanner), un premier bilan peut être réalisé en ville, car, dans la très grande majorité des cas, il n’y a pas de cause organique. Ce premier bilan comporte un âge osseux (apparition du sésamoïde du pouce avant 11 ans) et une échographie pelvienne, qui peut mettre en évidence une augmentation de la taille de l’utérus (> 35 mm). Le dosage de base des gonadotrophines n'a pas d’intérêt, car il est pulsatile, et est réalisé, pour des raisons pratiques, en milieu hospitalier. 

Si la clinique est plutôt évocatrice d’une origine périphérique (apparition d’une pilosité pubienne ou axillaire isolée avant l’âge de 8 ans), un dosage des androgènes (testostérone,17 hydroxy progestérone, delta 4 androstènedione et sulfate de déhydroépiandrostérone [SDHEA]), mais aussi de l’estradiol, peut être effectué lors du bilan de première intention en ville. 

Chez le garçon, la suspicion d’une puberté précoce (augmentation du volume testiculaire avant l’âge de 9 ans, soit S2 de la classification de Tanner) nécessite une orientation rapide vers une consultation spécialisée, car les causes organiques sont à l’inverse fréquentes (70 % des cas).

Quelles sont les principales causes des pubertés précoces centrales ?

Il peut s’agir d’anomalies du système nerveux central (SNC), telles que l’hamartome hypothalamique (pathologie bénigne qui s’éteint à l’âge adulte), les tumeurs cérébrales cancéreuses ou non, les malformations (kyste arachnoïdien, hydrocéphalie...) ou les pathologies acquises (infection, traumatisme, chimiothérapie, radiothérapie...). Chez la fille, dans 90 % des cas, il n’y a pas d’anomalie du SNC et la puberté précoce centrale est le plus souvent idiopathique. Elle peut survenir dans le cadre d’une adoption (risque augmenté par 20, en lien avec des facteurs nutritionnels).

Quels sont les traitements disponibles dans les pubertés précoces centrales ?

Le traitement des pubertés précoces d’origine centrale peut être indiqué en cas de puberté évolutive (cliniquement, échographiquement, et avance d’âge osseux de plus de 2 ans) confirmée par le test au LHRH. Il fait appel à un agoniste du récepteur de la GnRH (triptoréline ou leuproréline). Ce traitement, qui vise un gain de taille à l’âge adulte, est d’autant plus efficace qu’il est débuté tôt (gain de 5 à 7 cm).

 

D’après un entretien avec le Dr Anne-Sophie Lambert, endocrinologie pédiatrique, hôpital Bicêtre, le Kremlin-Bicêtre (94).

 

Sources

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