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Gale : toujours répéter le traitement après 8 à 15 jours

Ectoparasitose fréquente, la gale est de prise en charge bien codifiée. Le patient et les cas contact doivent recevoir le même traitement en même temps, qui est systématiquement renouvelé après 8 à 15 jours.

Isabelle Hoppenot
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Une ectoparasitose, due à un acarien, le sarcopte.

Une ectoparasitose, due à un acarien, le sarcopte.Ignatius Harly Putranto / iStock / Getty Images Plus / via Getty Images

Résumé

La gale est une ectoparasitose fréquente, qui touche particulièrement les enfants et les adultes jeunes. Elle se transmet essentiellement par contact cutané direct, plus rarement via l’environnement.

Son diagnostic est clinique et se fonde sur la présence d’un prurit généralisé à recrudescence nocturne, habituellement partagé avec l’entourage (même si l’absence de partage ne doit pas faire exclure le diagnostic), de lésions spécifiques (sillons scabieux, vésicules perlées, nodules scabieux) et aspécifiques, conséquences du grattage.

Selon la forme de la gale (commune, profuse ou hyperkératosique) et l’âge du patient et des cas contact, le traitement est local (benzoate de benzyle ou perméthrine) et/ou oral (ivermectine). Il doit être prescrit à tous les sujets cibles (parasités et contacts) en même temps et renouvelé systématiquement après 8 à 15 jours.

Les mesures environnementales, impératives, sont à entreprendre parallèlement.

La VIDAL Reco sur la prise en charge de la gale, qui vient d’être actualisée, détaille la stratégie de prise en charge.

La gale est une ectoparasitose liée à un acarien, le sarcopte (Sarcoptes scabiei var. hominis), parasite microscopique vivant à la surface du corps et qui ne survit que quelques jours en dehors de son hôte.

Il s’agit d’une maladie fréquente, contagieuse essentiellement par contact cutané direct, et donc possiblement entre partenaires sexuels par contacts intimes et prolongés. Une transmission indirecte (linge, literie) est néanmoins possible.

Elle peut survenir à tout âge et dans tout milieu socio-économique, mais touche toutefois plus souvent les enfants et les jeunes adultes. Elle peut être responsable d'épidémies dans les collectivités (crèches, établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes [Ehpad]).

Son incidence n’est pas connue avec précision, elle varie selon les années, mais ne paraît pas en augmentation.

Devant quels signes cliniques évoquer le diagnostic ?

Le diagnostic de la gale est clinique.

La gale commune

Une gale commune doit être évoquée en cas de :

  • prurit généralisé à recrudescence nocturne ;
  • lésions cutanées non spécifiques liées au grattage (stries linéaires, excoriations, eczéma lichénifié, prurigo) ;
  • lésions spécifiques, inconstantes, mais de topographie évocatrice (espaces interdigitaux dorsaux, face antérieure des poignets, coudes, aisselles, fesses, organes génitaux, seins chez la femme, alors que le dos et le visage sont habituellement épargnés) :
    • sillons scabieux (cf. Illustration 1),
    • vésicules perlées à l’extrémité des sillons,
    • nodules scabieux (papulo-nodules violacés localisés aux organes génitaux, fesses et aisselles) (cf. Illustration 2),
    • chancre scabieux chez l’homme.

Illustration 1 - Sillons de la gale (© Dr Jean-Yves Gourhan sur Dermato-info.fr, Société française de dermatologie)

IIllustration - Nodules scabieux (© Dr Jean-Yves Gourhant sur Dermato-info.fr, Société française de dermatologie)

L'atteinte de l'entourage conforte le diagnostic, mais l’absence de prurit chez un proche, notamment un tout-petit (cf. Encadré), ne doit pas le faire écarter.

Encadré - La gale chez l’enfant de moins de 2 ans
La gale du nourrisson de moins de 2 ans se manifeste par une éruption vésiculo-pustuleuse des extrémités (paumes et plantes) et du corps. L'atteinte du cuir chevelu est possible, des nodules scabieux péri-axillaires et génitaux sont fréquents (cf. Illustration 2), de même que l'impétiginisation et l'eczématisation.

La gale profuse

La gale profuse est caractérisée par une éruption rouge vif étendue, sans sillons, papuleuse et vésiculeuse. Très prurigineuse, elle atteint l’ensemble du tronc, y compris le dos (alors que dans la forme commune, cette région est habituellement épargnée), le cuir chevelu et les paumes.

Il faut y penser chez les personnes âgées et/ou immunodéprimées ou dans les suites d'une dermocorticothérapie prolongée.

La gale hyperkératosique

La gale hyperkératosique (ou croûteuse) touche préférentiellement les sujets âgés, cachectiques, immunodéprimés. Les lésions sont érythémato-squameuses et kératosiques, étendues à toute la surface corporelle et d’évolution chronique. Le prurit est en revanche discret, voire absent.

L'examen au dermatoscope

Réalisé par un praticien formé à cette pratique, l'examen au dermatoscope (cf. Illustration 3) permet d’objectiver la présence de sarcoptes (en forme de deltaplanes). Si le nombre de parasites peut atteindre plusieurs centaines, voire davantage dans les formes profuses, il peut aussi être très faible, de moins de dix, dans la gale commune, rendant la visualisation des parasites plus difficile.

IIllustration - Examen au dermatoscope (© Dr Jean-Yves Gourhant sur Dermato-info.fr, Société française de dermatologie)

Traiter le patient et son entourage

Le traitement s’adresse à tous les sujets parasités et tous les sujets contact (même en l'absence de symptômes), selon les mêmes modalités.

Lorsqu'une gale survient en collectivité, la stratégie de prise en charge des sujets contact est décidée en fonction du nombre de cas et des formes cliniques.

L’objectif du traitement est :

  • l’élimination du sarcopte ;
  • la prévention de la dissémination épidémique (identification et traitement des sujets contact) ;
  • la prévention des complications :
    • surinfection cutanée bactérienne (gale impétiginisée), plus rarement infection staphylococcique ou streptococcique invasive,
    • eczématisation liée au prurit persistant ou à l'application de topiques,
    • persistance de nodules scabieux (possible pendant plusieurs mois, même après la guérison).

Toutes les personnes infectées et les sujets contact doivent recevoir le traitement en même temps, quitte à devoir le décaler de quelques jours.

De plus, il doit être systématiquement renouvelé chez tous les cas concernés, 8 à 15 jours après le premier traitement.

Les grandes lignes du traitement

Dans la gale commune, hors personnes de moins de 15 kg et femmes enceintes ou allaitantes (cf. infra), il peut être fait appel à un traitement topique (benzoate de benzyle 10 % ou perméthrine 5 %) ou oral par ivermectine.

Comme le précise la VIDAL Reco, il n'y a, à ce jour, pas de niveau de preuve suffisant pour recommander l’un ou l’autre. Toutefois, l’ivermectine est préférée chez les patients à risque de mauvaise compliance ou de mauvaise tolérance au traitement local, chez ceux ayant une gale impétiginisée ou eczématisée, chez les sujets âgés et en contexte épidémique.

En cas de gale profuse, la prise en charge associe traitement oral et local à J0, renouvelé entre J8 et J15, puis, si nécessaire, jusqu'à guérison.

En cas de gale hyperkératosique (ou croûteuse), la prise en charge associe également traitement local et oral :

  • traitement local quotidien pendant 7 jours, puis 2 fois par semaine jusqu'à guérison ;
  • traitement oral à J1, J2, J8 puis, dans les formes sévères, répété à J9, J15, J22 et J29.

Un agent kératolytique (vaseline salicylée 10 %) peut être ajouté, à raison d’une application par jour sur les zones hyperkératosiques (en limitant à moins de 10 % de la surface cutanée totale) jusqu'à disparition de l'hyperkératose.

Une rubrique spécifiquement dédiée à la gale en collectivité précise les spécificités de la prise en charge.

Parallèlement, la désinfestation de l’environnement est indispensable pour éviter un échec thérapeutique. Elle se fonde sur le lavage à 60 °C, un traitement par acaricide ou la mise en quarantaine du linge et de la literie, et sur l’aspiration et la pulvérisation d'acaricide sur les surfaces selon des modalités qui varient en fonction des situations (collectivité ou non, type de gale...) et qui sont détaillées dans la Vidal Reco.

Que faire chez les nourrissons et les femmes enceintes ou allaitantes ?

Le traitement varie en fonction du terrain, mais dans tous les cas, il doit être répété entre J8 et J15.

  • Chez le nourrisson de moins de 2 ans, un traitement local par benzoate de benzyle ou perméthrine est recommandé en première ligne. La perméthrine (la plus étudiée) étant le traitement de premier choix en cas de peau lésée, d'atteinte du visage, et avant l’âge de un an.
    La VIDAL Reco précise la stratégie à adopter en cas d’échec thérapeutique.
    Si l’enfant est gardé en collectivité, la durée d'éviction est de 3 jours après la mise en route du traitement pour une gale commune.
     
  • Chez l'enfant de plus de 2 ans, le traitement est le même que chez l’adulte, local ou oral. L’ivermectine est proposée en 1re ligne en cas de mauvais état cutané, de suspicion de mauvaise observance du traitement local ou de cas groupés. 
     
  • Chez la femme enceinte, la stratégie varie selon le terme de la grossesse.
    Au 1er trimestre, le traitement topique (benzoate de benzyle ou perméthrine) est recommandé en 1re ligne. L'ivermectine peut être prescrite en 2e intention en cas d'échec.
    Aux 2e et 3e trimestres, le traitement de 1re ligne peut être local ou oral. L'ivermectine est privilégiée en cas de mauvais état cutané, de suspicion de mauvaise observance du traitement local ou de cas groupés.
     
  • Chez la femme allaitante, le benzoate de benzyle, la perméthrine et l'ivermectine peuvent être prescrits en 1re ligne. Cependant, en cas de traitement topique, l'enfant ne doit pas être mis au sein pendant la durée de l'application et jusqu'au rinçage.
     
  • À noter que lorsque la femme enceinte ou allaitante est sujet contact d'un cas de gale, il est recommandé de la traiter.

Que faire chez les sujets âgés ?

Chez les sujets âgés, la gale se présente souvent sous une forme hyperkératosique. Chez ceux vivant en collectivité, il faut identifier les cas contact et privilégier, par mesure de simplification, un traitement oral par ivermectine, sans oublier l’hygiène des ongles et les mesures environnementales.

L’isolement du patient est de 48 heures. La contamination se faisant par contact direct et non pas par voie aéroportée, il s’agit d’un isolement relatif : les visites sont autorisées avec des mesures de protection (port de surblouse et de gants).

Comment évaluer l’efficacité du traitement ?

L’évaluation de l’efficacité de la prise en charge n’est pas toujours simple, puisqu’une exacerbation du prurit est possible dans les jours qui suivent sa mise en œuvre et qu’il peut persister jusqu'à 4 semaines après un traitement bien mené. De même, les lésions scabieuses peuvent perdurer plusieurs mois.

En pratique, c’est un interrogatoire et un examen clinique minutieux qui permettent au praticien d’évaluer l’efficacité thérapeutique. Dans la très grande majorité des cas, à J15, le prurit a disparu, tout comme les lésions spécifiques de la gale que sont les sillons et les vésicules perlées. La persistance des nodules, ou des pustules chez l’enfant, parfois pendant plusieurs mois, ne signe pas l’échec du traitement.

Après 15 jours d’antiparasitaire, un prurit de moindre intensité oriente plutôt vers une irritation et relève d’un traitement symptomatique.

Sa persistance avec la même intensité, ou sa reprise après une amélioration initiale, ou bien la mise en évidence de sarcoptes au dermatoscope sont, à l’inverse, évocatrices d’un échec thérapeutique ou d’une réinfestation et impliquent de renouveler le traitement du patient et des cas contact ainsi que les mesures environnementales.

D’après un entretien avec le Pr Annabel Maruani-Raphaël, dermatologue, CHRU de Tours.

Sources

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