Formes pédiatriques d'amoxicilline : des recommandations pour pallier les tensions

La mise en œuvre des actions suivantes [1] est recommandée par la direction générale de la Santé (DGS) pour gérer la pénurie actuelle d'amoxicilline seule ou en association avec l'acide clavulanique, en particulier les tensions d'approvisionnement des formes pédiatriques : 

• respect des recommandations pour le bon usage des antibiotiques en période de pénurie, indication par indication, et du protocole de prescription et d'administration des formes adultes en pédiatrie ; 
• dispensation à l'unité pour préserver les stocks disponibles en quantité limitée. 

Utilisation à bon escient de l'amoxicilline en particulier et des antibiotiques en général

La DGS relaie les travaux réalisés conjointement par la Société française de pédiatrie (SFP), le Groupe de pathologie infectieuse de la société  française de pédiatrie (GPIP), l'Association française de pédiatrie ambulatoire (Afpa) et la Société française de pathologie infectieuse de langue française (Spilf). À l'issue de ces travaux, des propositions [2] ont été élaborées pour aider les professionnels de santé à utiliser à bon escient les spécialités d'amoxicilline seule ou en association avec l'acide clavulanique dans un contexte d'approvisionnement tendu. 

Une liste des situations pour lesquels l'antibiothérapie n'est pas nécessaire

« En période de pénurie, les prescriptions inutiles d'antibiotiques ne sont plus admissibles », insistent les sociétés savantes en préambule de leurs recommandations. 

Elles rappellent la nécessité de « limiter strictement les prescriptions d'antibiotiques aux indications des recommandations officielles chez l'enfant comme chez l'adulte ». 

Elles mettent en garde contre un report sur d'autres molécules antibiotiques, qui pourrait avoir comme conséquence un impact sur la prise en charge de pathologies ne nécessitant pas de traitement par amoxicilline (infections urinaires, relais oraux d'infections graves traitées initialement par des formes parentérales, etc.).

Elles précisent en outre les situations cliniques qui représentent la majorité des prescriptions en France, et qui ne justifient pas de traitement antibiotique : 

• bronchites ;
• rhino-pharyngites ;
• laryngites ;
• bronchiolites ;
• angines sans test de diagnostic rapide (TDR) permettant de définir l'origine virale ou bactérienne ;
• otites congestives ;
• otites séreuses ;
• suspicions d'otites non confirmées par otoscopie ;
• syndromes grippaux ou Covid-19 ;
• fièvre sans point d'appel (hors pathologie chronique) ;
• impétigos non étendus ;
• furoncles ;
• quasi-totalité des infections digestives.

Des recommandations provisoires en période de pénurie

Lorsqu'une antibiothérapie systémique est nécessaire, les sociétés savantes recommandent de raccourcir les durées de traitement pour toutes les pathologies fréquentes. 

Pour aider les prescripteurs à choisir et prescrire une antibiothérapie chez un enfant, les principales recommandations relatives au choix de l'antibiotique et à ses modalités d'utilisation (posologie, durée) sont présentées dans un tableau en ligne sur le site de la SFP [2]. Elles concernent les situations suivantes :

• otite moyenne aiguë purulente (cf. Tableau) ; 
• angine avec TDR positif ;
• sinusite aiguë ;
• pneumonie ; 
• pyélonéphrite.

Tableau - Recommandations thérapeutiques pour la prise en charge de l'otite moyenne aiguë purulente en situation de pénurie de l'amoxicilline pédiatrique (d'après [2])

Lien 1 et Lien 2

Les formes adultes pour pallier l'absence des formes pédiatriques d'amoxicilline

Lorsqu'une antibiothérapie par amoxicilline ou amoxicilline/acide clavulanique est nécessaire chez un enfant, mais que les formes pédiatriques ne sont pas disponibles, les formes adultes doivent être prescrites en adaptant approximativement les doses au poids et à l'âge de l'enfant. Ce remplacement implique d'adapter les ordonnances pour sécuriser l'emploi de ces formes inhabituelles en pédiatrie et éviter des erreurs médicamenteuses.

Pour aider les prescripteurs et les dispensateurs, les sociétés savantes proposent des ordonnances types sur lesquelles sont précisées les posologies à appliquer en fonction du poids, et les modalités de préparation et d'administration. Créées par le GPIP, elles ont été validées par la Société française de pharmacie clinique pédiatrique (pharmaciens hospitaliers) et l’Académie nationale de pharmacie. 

Au total, 4 ordonnances types sont proposées : 

• pour l'amoxicilline : une ordonnance type pour l'enfant de 12 kg et moins [3], une ordonnance type pour l'enfant de plus de 12 kg [4] ;
• pour l'amoxicilline/acide clavulanique : une ordonnance type pour l'enfant de 4 à 6 kg [5], une ordonnance type pour l'enfant de 7 kg et plus [6].

D'une manière générale, en cas d'indisponibilité des formes pédiatriques :

• d'amoxicilline : remplacer par une spécialité adulte d'amoxicilline 1 g en comprimé dispersible et sécable. Après dilution du comprimé ou du demi-comprimé (enfant de moins de 12 kg) dans un volume d'eau précis, le volume à administrer en fonction du poids de l'enfant est prélevé avec une seringue de 10 mL ;
• d'amoxicilline/acide clavulanique 100 mg/12,5 mg/mL suspension buvable avec pipette :  remplacer par une spécialité adulte d'amoxicilline/acide clavulanique 1 g/125 mg en poudre pour suspension buvable en sachet-dose. Le contenu doit être dilué dans un volume d'eau précis (20 mL pour les enfants de 4 à 6 kg, 10 mL pour les enfants de 7 kg et plus). Le volume à administrer en fonction du poids de l'enfant doit être prélevé avec une seringue graduée en mL, de 1 à 10 mL.

Privilégier une dispensation à l'unité

Autre démarche à privilégier en période de pénurie des spécialités d'amoxicilline, la dispensation à l'unité qui permet de ne délivrer que la quantité nécessaire au traitement prescrit.

La dispensation à l'unité est autorisée pour les antibiotiques depuis mars 2022. Elle implique un déconditionnement de la spécialité par le dispensateur, et est possible avec les comprimés conditionnés en blister ou les présentations galéniques en poudre conditionnée en sachet-dose. Les unités restantes dans la boîte sont conservées à la pharmacie et peuvent être utilisées pour une dispensation ultérieure. 

Les unités sont délivrées dans un nouveau conditionnement secondaire étiqueté (cf. Encadré), permettant notamment l'identification du patient et la traçabilité du médicament (dénomination, numéro de lot, péremption).

Le pharmacien facture à l'Assurance maladie le nombre d'unités délivrées, à l'unité près (sur le même modèle que les stupéfiants). 

La dispensation à l'unité est un mode de délivrance rémunéré à hauteur de 1 euro par délivrance, dans la limite de 500 euros par an.