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Entorse de la cheville : penser à une lésion de la syndesmose

Devant toute entorse de cheville, il faut penser à une lésion de la syndesmose tibio-fibulaire. Certes peu fréquente, elle nécessite une prise en charge bien spécifique pour éviter une instabilité chronique et l'évolution vers une arthrose.

Isabelle Hoppenot 22 novembre 2022 Image d'une montre5 minutes icon Ajouter un commentaire
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Bien préciser ce que l'on cherche à la radiographie.

Bien préciser ce que l'on cherche à la radiographie.

Résumé

Devant toute entorse de la cheville, il faut penser à la possibilité d’une lésion de la syndesmose* tibio-fibulaire, certes peu fréquente, mais qui nécessite une prise en charge spécifique (immobilisation des articulations talo-crurale et tibio-fibulaire, d’une durée prolongée, modalités de rééducation spécifiques) afin d’éviter l’évolution vers une instabilité chronique de la cheville et in fine vers l’arthrose. L’interrogatoire, qui met classiquement en évidence un mécanisme lésionnel en rotation externe et flexion dorsale du pied, oriente fortement vers le diagnostic.

Les entorses de la cheville sont les traumatismes de l’appareil locomoteur les plus fréquents, et sont à l’origine de 6 000 consultations par jour en France.

Neuf fois sur dix, elles concernent le ligament latéral externe et leur prise en charge est bien codifiée (cf. VIDAL Reco « Entorse de la cheville »). L’indication de la radiographie de cheville à la recherche d’une lésion osseuse se fonde classiquement sur les critères d’Ottawa : incapacité à se mettre en appui immédiatement et lors de la prise en charge en urgence (impossibilité de faire quatre pas), sensibilité lors de la palpation du bord postérieur ou de la pointe d’une des deux malléoles.

Mais face à toute entorse de la cheville, il faut aussi savoir évoquer une possible lésion du ligament tibio-fibulaire antéro-inférieur (LTFAI), qui joue un rôle essentiel dans le maintien de la stabilité de l’articulation, présente dans 12 % des cas. 

VIDAL. Pourquoi est-il important de reconnaître une lésion de la syndesmose* tibio-fibulaire ?

Dr Linh Vu Ngoc. La syndesmose tibio-fibulaire distale (cf. Figure) est un complexe qui comprend plusieurs structures ligamentaires :

  • le ligament tibio-fibulaire antéro-inférieur (LTFAI) ;
  • le ligament interosseux ;
  • le ligament tibio-fibulaire postéro-inférieur (LTFPI) ;
  • le ligament transverse inférieur.

En cas de lésion de la syndesmose, le LTFAI, qui unit la fibula (péroné) et l’extrémité inférieure du tibia, est le premier à être lésé. Cette lésion doit être reconnue précocement, car non ou mal traitée, ses conséquences peuvent être importantes. En effet, en cas de rupture du LTFAI, la mortaise de la cheville a tendance à s’écarter. Le talus (astragale) va alors s’impacter dans la mortaise, entraînant rapidement des lésions chondrales, une dysfonction chronique de la cheville et à terme une arthrose.

 

Figure - Syndesmose tibio-fibulaire

* Articulation fibreuse dans laquelle les os sont reliés par des ligaments ou des membranes osseuses. 

Quels sont les signes cliniques évocateurs d’une telle lésion ?

Dans un premier temps, la lésion passe souvent inaperçue, car la présentation clinique initiale peut être tout à fait semblable à celle des entorses des ligaments latéraux de la cheville. Dans les formes légères, le patient peut volontiers marcher et parfois ne consulte même pas au moment du traumatisme.

L’interrogatoire joue donc un rôle majeur, car contrairement aux entorses du ligament latéral externe, qui relèvent d’une torsion de la cheville en varus forcé, les atteintes de la syndesmose sont la conséquence d’une rotation latérale avec le pied en flexion dorsale. Ce type de mécanisme se rencontre dans de nombreux sports, mais concerne plus particulièrement ceux avec une forte cinétique, tels que le judo, la lutte, le rugby, le football, le handball ou encore les sports de saut avec risque de mauvaise réception (volley, etc.).

L’imagerie peut-elle être contributive ?

Radiographie et échographie

Tout à fait, les radiographies conventionnelles peuvent montrer le diastasis entre le tibia et la fibula. Et l’échographie, réalisée par un opérateur expérimenté, peut mettre en évidence une lésion du LTFAI. Rappelons à cet égard l’importance de bien préciser sur l’ordonnance ce que l’on cherche.

En cas de doute sur une lésion de la syndesmose, il ne faut pas hésiter à demander une radiographie de la cheville même si les critères d’Ottawa ne sont pas remplis.

C’est parfois la persistance d’une douleur de la cheville au-delà de dix jours, survenant non pas tant à la marche que lors de la course ou des sauts, qui doit faire penser au diagnostic.

Cela est d’autant plus important que la fréquence des lésions de la syndesmose tend à augmenter avec le développement des surfaces de jeu synthétiques qui favorisent le blocage du pied. La reprise de l’anamnèse, précisant le mécanisme du traumatisme, est alors essentielle.

IRM

L’IRM est le gold-standard pour confirmer le diagnostic clinique.

Scanner et arthroscopie

Le scanner est, lui, peu pratiqué. Une arthroscopie est réalisée dans des cas très particuliers.

Quelles sont les grandes lignes de la prise en charge ?

Comme les autres types d’entorse de la cheville, ces entorses sont de degrés de sévérité variable (légère, modérée, grave) et peuvent être associées à d’autres lésions, ce qui peut complexifier la prise en charge.

Mais, de façon générale, les meilleurs résultats sont obtenus si des mesures adaptées sont prises le plus rapidement possible, au maximum dans les six semaines après le traumatisme initial. Au-delà, la stabilité de la syndesmose peut être compromise, empêchant la pratique sportive et exposant au développement ultérieur de complications.

Dans un premier temps, le traitement est toujours conservateur et se fonde sur :

  • le repos ;
  • le glaçage ;
  • la surélévation ;
  • la contention.

Le choix de l’orthèse doit se tourner vers une attelle maintenant les articulations talo-crurale et tibio-fibulaire, ce qui n’est pas le cas des orthèses standard largement utilisées. Ces dernières ne bloquent en effet que le varus et le valgus et pas la flexion dorsale.

Dès que le diagnostic est confirmé, il faut immobiliser la cheville avec une botte pendant trois à quatre semaines, soit plus longtemps que pour d'autres types d'entorse. Un appui simple peut être autorisé ou non selon la gravité de la lésion. L'appui sera par exemple totalement prohibé pendant trois semaines dans les formes sévères, en attendant l'avis d'un spécialiste, fortement conseillé. 

La rééducation, qui diffère dans ses modalités de celle de l'articulation talo-crurale, est débutée seulement au bout de trois semaines d'immobilisation

D’après un entretien avec le Dr Linh Vu Ngoc, médecin du sport, chef du pôle médical et paramédical du CREPS Île-de-France.

Infographie VIDAL réalisée par Marion Grillon.

Sources

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