#Médicaments #Bon usage

Collyres mydriatiques chez l'enfant : des effets indésirables graves mais évitables

Des enquêtes de pharmacovigilance ont mis en évidence des cas graves de pharmacovigilance, parfois mortels, chez des enfants ayant reçu des collyres mydriatiques (atropine et dérivés, phényléphrine).

Le risque d'effets indésirables généraux de ces collyres mydriatiques est plus élevé chez les enfants que chez les adultes en raison d'un passage systémique potentiel.

C'est pourquoi l'ANSM rappelle dans un rapport publié le 23 mars les règles de bon usage
visant à éviter le passage systémique de ces collyres en population pédiatrique, notamment chez le nouveau-né et le prématuré : posologies maximales, intervalle recommandé entre 2 instillations, contre-indications, modalités d'instillation, etc. sont autant de points abordés dans ce rapport pratique et synthétique.
David Paitraud 27 mars 2017 03 avril 2017 Image d'une montre4 minutes icon 1 commentaire
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Les collyres mydriatiques exposent les enfants à un risque de toxicité supérieur à celui des adultes (illustration).

Les collyres mydriatiques exposent les enfants à un risque de toxicité supérieur à celui des adultes (illustration).


Les collyres mydriatiques plus à risque d'effets secondaires graves en pédiatrie
Des 
cas graves d'effets indésirables et des décès ont été rapportés suite à l'instillation de collyres mydriatiques en pédiatrie ; ces cas sont souvent survenus dans le cadre d'une association de ce type de collyres.

Dans ce contexte, l'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) publie un rapport sur l'utilisation des collyres mydriatiques en pédiatrie, visant à rappeler les règles de bon usage de ces médicaments utilisés en ophtalmologie pour obtenir une dilatation de la pupille ou une cycloplégie.

Ces collyres sont de 2 types (Cf. Tableau I) : 

Tableau I - Médicaments utilisés en ophtalmologie pour obtenir une dilatation pupillaire
ou une cyclopégie
Atropiniques et dérivés (anticholinergiques et antimuscariniques)
Atropine ATROPINE ALCON 0,3 %, 0,5 % et 1%
ATROPINE FAURE 1 %
Le dosage à 1 % est réservé à l'adulte et à l'adolescent de plus de 12 ans
Cyclopentolate SKIACOL 0,5 % collyre contre-indiqué avant 1 an
Tropicamide MYDRIATICUM 0,5 % collyre (flacon et unidose)
Alpha-mimétiques
Phényléphrine  NEOSYNEPHRINE FAURE collyre à 2,5 %, 5 % et 10 %.
Le dosage à 10 % est contre-indiqué chez l'enfant de moins de 12 ans

Le collyre à base d'homatropine, ISOPTO-HOMATROPINE 1 % collyre, n'est plus commercialisé depuis octobre 2016 (notre article du 26 octobre 2016).
Le délai d'obtention de la mydriase et sa durée sont plus ou moins longs selon les substances utilisées (Cf. Tableau II).
 
Tableau II - Délai d'obtention et durée de la mydriase en fonction du collyre utilisé
Substance Délai d'obtention de la mydriase Durée de la mydriase
Atropine 40 min 7 à 12 jours
Homatropine 30 à 60 min 24 à 36 heures
Cyclopentolate 30 à 60 min 24 heures
Tropicamide 20 à 40 min 6 heures
Phényléphrine 15/20mn à 60 min ?5 à 7 heures

Les risques de toxicité systémique chez l'enfant
En cas d'instillation d'une goutte de collyre mydriatique, on estime que 
90 % de la quantité de principe actif passe dans la circulation générale.

En effet, seule une 
faible proportion du volume d'une goutte atteint la chambre antérieure de l'oeil pour une action locale. Le reste est rapidement drainé par le canal lacrymo-nasal ; ce drainage favorise un passage systémique à l'origine d'effets indésirables potentiellement graves de types cardiaque (tachycardie) ou cardiovasculaire (hypertension artérielle), digestif (diminution de la fréquence et de l'amplitude des contractions péristaltiques) et neuropsychiatrique (hallucinations, voire délire, convulsions, etc.).

Les enfants sont plus sensibles à ces effets généraux. Les données de pharmacovigilance recueillies par l'ANSM montrent par exemple que :
  • pour l'atropine, les effets neuropsychiatriques sont les plus fréquents et les plus sévères ; ils concernent les enfants de moins de 8 ans, surviennent aussi bien en ville qu'à l'hôpital et peuvent mettre en jeu le pronostic vital ;
  • les effets digestifs de l'atropine sont majorés par la phényléphrine ;
  • pour la phényléphrine, les effets indésirables peuvent se traduire cliniquement par un malaise, des pauses respiratoires, une HTA, des bradycardies profondes et une désaturation.

Comment éviter le passage systémique des collyres mydriatiques ?
Les règles de bon usage visant à prévenir le passage systémique des collyres mydriatiques sont les suivantes : 
  • tenir compte du délai d'obtention de la mydriase, avant une éventuelle réadministration du produit (Cf. Tableau II) ;
  • limiter l'administration à 1 seule goutte de collyre par oeil lors de chaque instillation. L'administration d'une autre goutte ne doit être envisagée que si la première goutte n'a absolument pas atteint l'oeil ;
  • ne pas dépasser les posologies maximales recommandées dans un intervalle de temps donné (respecter l'espacement recommandé entre les instillations) ;
  • évaluer soigneusement et prendre en compte les risques supplémentaires liés à une éventuelle comorbidité. Par exemple, la phényléphrine collyre doit être administrée avec précaution chez les patients à risques d'HTA, d'insuffisance coronaire, de troubles du rythme ou d'hyperthyroïdie ;
  • administrer avec précaution chez les patients présentant des symptômes d'une atteinte du système nerveux central ;
  • surveiller étroitement l'enfant durant les 30 minutes suivant l'instillation ;
  • faire plus particulièrement attention au risque de surdosage en cas d'iris foncé, les iris foncés se dilatant moins facilement que les iris clairs.

Vigilance particulière chez le prématuré et le nouveau-né
L'administration des collyres mydriatiques chez le prématuré et le nouveau-né doit être particulièrement prudente en raison notamment :
  • des risques digestifs (distension abdominale, iléus, occlusion),
  • et des risques hémodynamiques.

Dans cette population, il est recommandé de :
  • préférer l'utilisation du tropicamide (MYDRIATICUM) compte-tenu de son profil de tolérance par rapport à celui de l'atropine ;
  • utiliser de la NEOSYNEPHRINE à 2,5 % ou 1 % (préparation hospitalière) si une association au tropicamide s'avère nécessaire pour obtenir une dilatation optimale.

Administration du collyre : conseils aux patients et aux soignants
En pratique, lors de l'administration d'un collyre mydriatique à un enfant, les gestes suivants sont à expliquer aux patients ou à réaliser par les soignants :
  • appuyer sur l'angle interne de l'oeil pendant 1 minute afin d'occlure les points lacrymaux ;
  • essuyer le collyre qui s'écoule sur la joue de l'enfant afin d'éviter tout risque d'ingestion, voire de passage à travers la peau chez le prématuré ;
  • maintenir ces médicaments hors de portée des enfants pour éviter une ingestion accidentelle. L'administration de 10 mg d'atropine, soit le contenu d'un flacon de collyre à 1 %, peut être fatale à un enfant.

Il est important de s'assurer que la personne devant administrer le collyre a bien compris les risques liés à ces médicaments et les consignes de sécurité. 
En cas de problème de compréhension, la dilatation doit se faire en présence d'un professionnel de santé, au cabinet ou à l'hôpital.

Pour aller plus loin
Rappel sur l'utilisation des collyres mydriatiques en pédiatrie - Point d'information (ANSM, 23 mars 2017)

Utilisation des collyres en pédiatrie pour l'obtention d'une mydriase ou d'une cycloplégie à visée diagnostique - Rapport (ANSM, 23 mars 2017)

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bimed Il y a 6 ans 0 commentaire associé
Est ce qu'il y'a d'autre moyen d'éviter ce genre de collyre d'autant on ophtalmo on utilise que ¢a
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