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Myélofibrose primitive ou secondaire : INREBIC, nouvel inhibiteur de JAK

INREBIC 100 mg gélule (fédratinib) est un nouvel antinéoplasique oral disponible en ville et à l'hôpital pour le traitement des patients atteints de myélofibrose primitive ou secondaire, et présentant une splénomégalie ou d'autres symptômes liés à cette maladie rare du sang.

David Paitraud 08 décembre 2022 Image d'une montre8 minutes icon Ajouter un commentaire
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Représentation en 3D de la structure de JAK2 (illustration @Jennifer Huber sur Wikimedia)

Représentation en 3D de la structure de JAK2 (illustration @Jennifer Huber sur Wikimedia)

Résumé

INREBIC 100 mg gélule est une nouvelle spécialité antinéoplasique disponible en ville et à l'hôpital. 

INREBIC est indiqué dans le traitement de la splénomégalie ou des symptômes liés à la maladie chez les patients adultes atteints de myélofibrose primitive, de myélofibrose secondaire à une polyglobulie de Vaquez ou une thrombocytémie essentielle, qui sont naïfs d’inhibiteur de Janus kinase (JAK) ou qui ont été traités par ruxolitinib.

Le principe actif d'INREBIC est le fédratinib, un nouvel inhibiteur de JAK, le deuxième à disposer d'une indication dans la myélofibrose après le ruxolitinib (JAKAVI).

La dose recommandée est de 400 mg 1 fois par jour, soit 4 gélules en prise unique quotidienne. L'administration avec un repas riche en lipide peut être conseillée pour réduire les nausées et vomissements. La dose quotidienne doit être ajustée en cas d'événements indésirables, selon le profil des patients ou si d'autres médicaments susceptibles d'interagir avec le fédratinib sont prescrits de façon concomitante. 

Outre les effets indésirables digestifs, le traitement par INREBIC expose à une toxicité hématologique (anémie, thrombopénie, neutropénie) et à un risque d'encéphalopathie de Wernicke (maladie neurologique causée par une carence en vitamine B1). Différents paramètres biologiques et éléments cliniques doivent être contrôlés, avant l'instauration du traitement et pendant le traitement. 

INREBIC se présente en flacon de 120 gélules, soit la quantité suffisante de traitement pour 1 mois à la posologie de 4 comprimés par jour. 
INREBIC est remboursable à 30 % (4 000,84 euros TTC) et agréé aux collectivités. La prescription est restreinte. 

En hématologie, une nouvelle spécialité antinéoplasique est mise à disposition en ville et à l'hôpital :

INREBIC est indiqué dans le traitement de la splénomégalie ou des symptômes liés à la maladie chez les patients adultes atteints de myélofibrose :

  • primitive ;
  • secondaire à une polyglobulie de Vaquez ou une thrombocytémie essentielle ;
  • qui sont naïfs d'inhibiteur de Janus kinase (JAK) ou qui ont été traités par ruxolitinib (JAKAVI).

INREBIC est un médicament orphelin. Il a bénéficié du statut d'autorisation temporaire d'utilisation (ATU) nominative dès 2019 en France. 
INREBIC fait l'objet d'une surveillance supplémentaire qui permettra l'identification rapide de nouvelles informations relatives à la sécurité. Les professionnels de la santé déclarent tout effet indésirable suspecté. 

Un deuxième anti-JAK dans le traitement de la myélofibrose

Le fédratinib appartient à la classe des inhibiteurs de Janus kinases (anti-JAK). En France, le fédratinib est le deuxième représentant de cette classe disposant d'une indication dans le traitement de la myélofibrose (cf. Encadré), après le ruxolitinib. Son efficacité a été établie sur la réduction du volume splénique et sur la symptomatologie qui en découle.

Le fédratinib inhibe la voie de signalisation des kinases JAK2 et FLT3 qui joue un rôle clé dans la pathogenèse de la myélofibrose. Les mutations de JAK2 représentent l’anomalie génétique la plus fréquemment associée à une myélofibrose primitive ou secondaire [1]. 

Encadré - À propos de la myélofibrose [d'après 1]

La myélofibrose est une forme rare de cancer du sang se traduisant par une augmentation du volume de la rate. Elle est considérée comme une maladie rare ; l'incidence en France est estimée à 520 nouveaux cas par an, avec un âge médian de diagnostic de 67 ans. La médiane de survie globale est de 2,3 à 4 ans.

La myélofibrose correspond à un envahissement de la moelle osseuse par un tissu fibreux, l'empêchant de produire les cellules sanguines. Il existe plusieurs formes : la myélofibrose primaire, la myélofibrose secondaire liée à la maladie de Vaquez (polyglobulie) et la myélofibrose post-thrombocytémie essentielle.  

Les manifestations cliniques peuvent inclure une altération de l'état général, de la fièvre, des sueurs, un prurit, une anémie, une pâleur, une splénomégalie, etc.

Un premier avis mitigé, en attendant d'autres résultats d'études

La Commission de la transparence (CT) a émis un avis sur INREBIC en décembre 2021 [1]. Le laboratoire avait demandé une prise en charge d'INREBIC dans un périmètre restreint par rapport à l'indication de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) :

  • traitement de la splénomégalie ou des symptômes liés à la maladie chez les patients adultes atteints de myélofibrose primitive, de myélofibrose secondaire à une polyglobulie de Vaquez ou une thrombocytémie essentielle de score IPSS* intermédiaire-2 ou élevé et naïfs d'inhibiteur de JAK ou, qui ont été traités par ruxolitinib.

*Score IPSS (international Prognostic Scoring System) : score de prédiction de la survie au diagnostic.

Á l'issue de son analyse médico-économique, la CT a attribué à INREBIC un service médical rendu (SMR) modéré dans son indication d'AMM, sans amélioration du service médical rendu (ASMR V) dans la stratégie actuelle incluant JAKAVI (ruxolitinib).

Deux études pour évaluer l'efficacité du fédratinib

Pour évaluer INREBIC, la CT s'est appuyée principalement sur les résultats des deux études cliniques, se distinguant notamment par l'inclusion ou non de patients précédemment traités par ruxolitinib (JAKAVI) : 

  • l'étude JAKARTA de phase III [2] : il s'agit d'une étude de supériorité (efficacité, tolérance) randomisée en double aveugle, internationale, contrôlée versus placebo dans le traitement des patients atteints de myélofibrose de score IPSS intermédiaire-2 ou élevé et naïfs d'inhibiteur de JAK : INREBIC (fédratinib) s'est montré supérieur au placebo en termes de taux de réponse splénique (RS35% = pourcentage de patients ayant obtenu une réduction d'au moins 35 % du volume de la rate à la fin du cycle 6)) avec une différence absolue de 35,4 % en faveur du fédratinib 400 mg (IC97,5% [24,2 ; 46,7] ; p < 0,0001) ;
  • l'étude JAKARTA-2 de phase II [3, 4] : il s'agit d'une étude non randomisée, mono-bras, en ouvert, internationale, ayant évalué l'efficacité et de la tolérance du fédratinib en termes de taux de réponse splénique 35 % (RS35%) dans le traitement des patients atteints de myélofibrose et précédemment traités par ruxolitinib. Selon l'analyse principale, le pourcentage de patients traités par fédratinib 400 mg ayant atteint une RS35 % à la fin du cycle 6 a été de 48,2 % (n = 40/83), IC95% = [37,1 ; 59,4]. La CT souligne cependant l'impossibilité de « quantifier l'effet propre du fédratinib chez les patients retraités en raison de la méthodologie non comparative de l'étude JAKARTA-2 ».

La CT note l'absence de démonstration d’une amélioration de la survie globale ou de la survie sans progression et regrette ne pas disposer d'étude de comparaison du fédratinib avec le ruxolitinib, qui est le comparateur le plus cliniquement pertinent. Elle souhaite réévaluer INREBIC quand les résultats de l'étude comparative FREEDOM-2 (évaluation du fédratinib par rapport au meilleur traitement disponible) seront disponibles (en 2024 selon le calendrier fourni).

Un profil de tolérance à surveiller

Les études JAKARTA montrent un profil de tolérance marqué par des évènements indésirables gastro-intestinaux (diarrhées, nausées, vomissements) , hématologiques (anémies, thrombopénies) et la survenue de cas potentiels graves d’encéphalopathie de Wernicke (toutefois à une posologie supérieure à celle recommandée dans l’indication). L'encéphalopathie de Wernicke est une urgence neurologique résultant d'une carence en thiamine (vitamine B1).

INREBIC en pratique

La dose recommandée d'INREBIC est de 400 mg 1 fois par jour, soit 4 gélules d'INREBIC 100 mg en 1 prise par jour.

Cette dose doit être ajustée dans les situations suivantes : 

  • survenue de toxicités hématologiques (thrombopénie, neutropénie, anémie) et non hématologiques (digestifs, anomalie du bilan hépatique) ;
  • ou en cas d'association inévitable avec certains médicaments, dont les inhibiteurs puissants du CYP3A4 ;
  • ou pour prendre en charge une encéphalopathie de Wernicke ;
  • ou pour les patients atteints d'une insuffisance rénale sévère (clairance de la créatinine [ClCr] de 15 mL/min à 29 mL/min selon la formule de Cockcroft-Gault [C-G]). 

Le traitement doit être arrêté chez les patients qui ne peuvent tolérer une dose de 200 mg de fédratinib par jour.

Une instauration de traitement sous conditions

Avant d'instaurer un traitement par INREBIC, les paramètres biologiques doivent être contrôlés : 

  • analyse initiale des taux de thiamine (vitamine B1) : le traitement ne doit pas être instauré chez les patients présentant une carence en thiamine, tant que les taux de thiamine n'ont pas été corrigés ;
  • numération formule sanguine : l'instauration de traitement n'est pas recommandée chez les patients présentant une numération plaquettaire initiale inférieure à 50 x 109/L et une PNN < 1,0 x 109/L ;
  • bilan hépatique ;
  • taux d'amylase/lipase ;
  • taux d'azote uréique sanguin (BUN) ;
  • créatininémie.

Une surveillance biologique et clinique pendant le traitement 

Les paramètres à contrôler avant l'instauration de traitement doivent faire l'objet d'un contrôle périodique pendant le traitement, et lorsque cela est cliniquement indiqué : 

  • surveillance du taux de thiamine et du statut nutritionnel : par exemple, 1 fois par mois pendant les 3 premiers mois, puis tous les 3 mois ensuite ;
  • surveillance de la formule sanguine complète ;
  • surveillance de la fonction hépatique : au moins tous les mois pendant les 3 premiers mois, puis périodiquement ;
  • surveillance des taux d'amylase et de lipase : au moins tous les mois pendant les 3 premiers mois, puis périodiquement ;
  • surveillance des taux de créatinine : au moins tous les mois pendant les 3 premiers mois, puis périodiquement. 

Une surveillance clinique doit être associée à la surveillance biologique, notamment pour identifier des signes évoquant une encéphalopathie, notamment une encéphalopathie de Wernicke : 

  • modification de l'état mental, confusion mentale ou atteinte de la mémoire : une évaluation complète, incluant un examen neurologique, une évaluation des taux de thiamine et des examens d'imagerie doivent être réalisés. 

Médication adjuvante pour prévenir ou prendre en charge certains effets indésirables

La prise en charge des effets indésirables auxquels INREBIC expose, repose sur :

  • un traitement prophylactique par anti-émétiques adéquats (par exemple, antagonistes des récepteurs 5-HT3 ou sétron) pendant les 8 premières semaines de traitement et poursuivi par la suite, lorsque cela est cliniquement indiqué ;
  • un traitement de la diarrhée par des médicaments anti-diarrhéiques dès la première apparition des symptômes ; 
  • des conseils d'administration : l'administration d'INREBIC avec un repas riche en lipides peut réduire l'incidence des nausées et des vomissements.

Identité administrative

Liste I 
Prescription hospitalière 
Prescription réservée aux spécialistes en hématologie ou aux médecins compétents en maladies du sang 
Surveillance particulière pendant le traitement
Flacon de 120 gélules, CIP 3400930232620
Remboursable à 30 % [5]
Prix public TTC = 4 000,84 euros [6]
Agrément aux collectivités [7]
Laboratoire Bristol-Myers Squibb
 

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