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Gonalgie non traumatique de l’adulte : bien prescrire l’imagerie

Devant une gonalgie non traumatique, l’interrogatoire et l’examen clinique sont primordiaux pour guider le choix de la technique d’imagerie par le radiologue. En l’absence d’arthrite septique et de douleur projetée, les radiographies sont les examens de première intention.

Isabelle Hoppenot 04 octobre 2022 Image d'une montre6 minutes icon Ajouter un commentaire
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Bien mentionner le contexte clinique sur l'ordonnance.

Bien mentionner le contexte clinique sur l'ordonnance.

Résumé

La Haute Autorité de santé (HAS) vient de publier une fiche pratique sur la pertinence de l’imagerie dans l’exploration d’une gonalgie non traumatique de l’adulte [1]. Elle rappelle que les hypothèses diagnostiques formulées à l’issue de l’interrogatoire et de l’examen clinique guident le choix de la technique d’imagerie. Expliciter le contexte clinique sur l’ordonnance permet au radiologue d’optimiser les examens d’imagerie et de faire un compte rendu répondant à la question que se pose le clinicien.

La gonalgie est une pathologie fréquente et, en dehors d’un contexte traumatique qui fait l’objet d’une autre fiche de la Haute Autorité de santé (HAS) [2], l’arthrose en est la première cause chez l’adulte de plus de 40 à 50 ans.

Le diagnostic étiologique d’une gonalgie est avant tout clinique et les indications d’une imagerie dépendent des hypothèses formulées à l’issue d’un interrogatoire minutieux et d’un examen clinique complet.

Globalement, la fiche de la HAS indique que les radiographies constituent l’examen de première intention, les autres techniques d’imagerie, notamment l’IRM, étant des examens de deuxième intention.

Bien rédiger l’ordonnance, en précisant en quelques mots ce que l’on cherche, est essentiel pour permettre au radiologue de mieux appréhender le contexte clinique, adapter la technique d’imagerie et faire un compte rendu pertinent, qui réponde à la question que se pose le clinicien à la suite de son examen clinique.

VIDAL : La fiche de la HAS rappelle en premier lieu que face à une gonalgie, il faut toujours éliminer une arthrite septique. Quelle attitude adopter ?

Dr Gérard Morvan : L’arthrite septique du genou est une urgence, car elle peut avoir des séquelles graves. Il faut donc éliminer ce diagnostic très rapidement, ce qui ne passe pas par un examen d’imagerie, mais par l’interrogatoire et l’examen clinique.

L’examen comparatif révèle un genou douloureux, chaud et gonflé, le plus souvent dans un contexte évocateur (immunodépression, toxicomanie, diabète de type 2, antécédent de chirurgie ou de geste sur le genou, etc.). Si ce diagnostic est évoqué, l’imagerie ne doit pas retarder la prise en charge et le patient est adressé en urgence pour une ponction articulaire avant d’instaurer une antibiothérapie.    

En dehors de ce cas particulier, quel est l’examen de choix face à un premier épisode de gonalgie ?

Si la clinique élimine une douleur projetée, des radiographies du genou sont recommandées. Elles doivent être bilatérales en incidences de face, de profil, axiales fémoro-patellaires et schuss, c’est-à-dire genoux pliés. Cette position, qui expose la partie postérieure de l’interligne fémoro-tibial, là où l’arthrose débute, est plus sensible pour visualiser un pincement de l’interligne fémoro-tibial débutant.

Ces clichés, pour être pertinents, doivent être de bonne qualité, ce qui n’est pas toujours le cas. C’est pourquoi il est important de spécifier sur l’ordonnance ce que l’on cherche, ce qui loin est d’être réalisé en pratique.

Faut-il aller plus loin si les radiographies montrent des signes typiques d’arthrose ?

La fiche de la HAS stipule qu’en présence de signes typiques d’arthrose sur des radiographies de première intention concordants avec la clinique, il n’est pas utile d’aller plus loin et que la répétition d’un épisode douloureux, sans modification de la symptomatologie, ne justifie pas de renouveler les radiographies ni de prescrire un autre examen. 

Une IRM n’est indiquée qu’en cas de présentation clinique atypique, de symptômes progressant très rapidement ou de modification de la symptomatologie.

Il s’agit bien sûr d’une approche schématique, qui ne peut pas prendre en compte toute la diversité des situations cliniques. Ainsi, chez une personne ayant des douleurs très importantes ou chez un patient présentant à la fois un genu varum et une discrète arthrose fémoro-tibiale externe la question d’une IRM se pose.

En l’absence de signes d’arthrose sur les radiographies, quelle est l’approche de deuxième intention ? 

Si les radiographies montrent une image d’allure tumorale agressive, atypique ou indéterminée, le patient doit être adressé rapidement dans un centre spécialisé.

Si elles mettent en évidence d’autres signes d’atteinte articulaire ou abarticulaire, l’imagerie de deuxième intention est à discuter avec le radiologue ou le spécialiste.

Si elles sont normales ou n’expliquent pas les symptômes, il faut réaliser une IRM. Là encore, il est essentiel de donner des éléments d’orientation clinique sur l’ordonnance, car il y a plusieurs façons de réaliser une IRM du genou en fonction de ce que l’on cherche.

  • Si l’on suspecte une atteinte d’un ménisque ou des ligaments croisés, le radiologue réalisera préférentiellement une acquisition volumique, qui consiste à programmer plusieurs centaines de coupes jointives extrêmement fines pour ensuite « se promener » dans ce bloc d’images.
  • Pour une suspicion d’arthrose, ce seront plutôt des coupes planes habituelles et pour une tumeur ou une synovite, des séquences en écho de gradient.

Il est important de rappeler qu’il n’y a pas toujours de corrélation anatomo-clinique et, notamment chez les personnes de plus de 50 ans, il est très fréquent de trouver des lésions telles qu’une méniscopathie débutante ou un kyste poplité qui ne sont pas à l’origine des douleurs. 

Que faire si l’on suspecte un syndrome régional douloureux complexe ?

La fiche de la HAS le rappelle bien. Le diagnostic de ce que l’on dénommait auparavant algodystrophie est clinique et se fonde sur les critères de Budapest [3]. L’imagerie, préférentiellement l’IRM, plus simple que la scintigraphie osseuse, n’est indiquée qu’en cas de doute diagnostique.

Quelle est la place de l’échographie ?

De façon globale, l’IRM est l’examen qui apporte le plus de renseignements pour l’imagerie du genou, mais elle ne doit pas être indiquée de façon systématique parce qu’elle n’est pas toujours utile.

La place de l’échographie est limitée, car elle ne visualise que les zones superficielles, entre la peau et la surface osseuse. Elle peut montrer une tendinite, un kyste poplité, et a donc surtout un intérêt en cas de suspicion de lésion des parties molles.

Exemples d'imagerie 

Cliché 1 - Cliché radiographique : Gonalgies latérales. De face, pas d’anomalies majeures. Même genou en schuss : pincement fémoro-tibial latéral évident (flèches).

Cliché 2 - IRM : Gonalgies médiales. Radiographies normales. Œdème du condyle médial lié à un conflit ménisco-fémoral (tête de flèche).

Cliché 3 - Échographie : tuméfaction antérieure du genou. Bursite prétendinopatellaire à tendon normal.

D’après un entretien avec le Dr Gérard Morvan, radiologue de l’appareil locomoteur, ancien président de la Société française de radiologie, membre de l’Académie nationale de médecine, membre de l’Académie nationale de chirurgie.
 

Sources

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