
L'ancienne formule du LEVOTHYROX (EUTHYROX) représente 0,5 % des spécialités délivrées dans les pharmacies en France (source : ANSM - CNOP).
Elément contextuel : la part d'EUTHYROX sur l'ensemble des spécialités à base de lévothyroxine vendues en France serait de 0,5 %
Lors d'un petit-déjeuner presse le 8 décembre, l'ANSM a rendu public un graphique montrant la proportion des différents médicaments contenant de la lévothyroxine délivrées en pharmacie (données du dossier pharmaceutique fournies par le Conseil de l'Ordre des pharmaciens).
Comme vous pouvez le constater sur ce graphique qui illustre cet article, la vente de d'EUTHYROX ne représente que 0,5 % des traitements délivrés (soit environ 14 000 patients sur les 3 millions d'utilisateurs quotidiens de ce médicament).
Notons cependant, comme l'ont fait de nombreux patients sur internet, que ces chiffres ne prennent pas en compte les achats d'EUTHYROX à l'étranger, dont l'importance n'est pour le moment pas chiffrée.
L'ANSM a également affirmé lors de ce petit-déjeuner qu'"aucune initiation de traitement par EUTHYROX ne doit être effectuée, au regard du caractère temporaire de la disponibilité de cette spécialité".
Le Conseil d'Etat annule le rejet par le tribunal administratif de Paris d'une remise à disposition pérenne d'EUTHYROX…
Un particulier, "confronté à des effets indésirables suite à la modification de la formule du LEVOTHYROX" survenue au printemps 2017, a saisi en urgence le tribunal administratif de Paris pour enjoindre la remise à disposition d'EUTHYROX "dans un délai de 48 heures".
Le juge des référés du tribunal administratif de Paris ayant rejeté sa demande, ce particulier a donc saisi le Conseil d'Etat d'un pourvoi en cassation. Le juge des référés du Conseil d'Etat a estimé que cette procédure de rejet initial par le tribunal administratif de Paris était irrégulière, et l'a donc annulé.
… mais, à son tour, le Conseil d'Etat estime que cette demande est infondée et rejette donc aussi cette demande
Le Conseil d'Etat a, lui aussi, statué sur cette demande, cherchant à déterminer si une "carence caractérisée" des traitements , faisant courir "un risque d'altération grave de l'état de santé", était constituée.
Or le Conseil d'Etat a constaté :
- "l'invitation faite par le ministre de la santé aux laboratoires Merck Santé de solliciter l'autorisation d'importer des unités d'EUTHYROX, médicament correspondant à l'ancienne formule et initialement destiné au marché allemand ;
- l'autorisation par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé d'importer près de 186 000 boîtes puis 215 000 boîtes de 100 comprimés d' EUTHYROX [NDLR : ces 215 000 boîtes seront importées d'ici la fin de l'année] ;
- l'autorisation par cette agence de la distribution de la spécialité L-THYROXIN HENNING de la société Sanofi, à même visée thérapeutique que le LEVOTHYROX mais contenant d'autres excipients ;
- et enfin l'autorisation de mise sur le marché délivrée à l'entreprise Unipharma en vue de la commercialisation prochaine de la spécialité THYROFIX, générique d'EUTHYROX".
Au vu de ces éléments, "et compte tenu du fait que le requérant ne fait pas état de difficultés qu'il aurait actuellement à se procurer le médicament que lui a prescrit son médecin, le Conseil d'État juge qu'il n'y a pas de carence caractérisée de la part du ministre de la santé portant une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale". Il rejette donc, lui aussi, cette demande d'importation immédiate supplémentaire d'EUTHYROX (ou de retour à l'ancienne formule pour le LEVOTHYROX).
Le laboratoire Merck annonce la fin de l'approvisionnement en EUTHYROX d'ici fin 2018 et la généralisation prochaine de la nouvelle formule en Europe
Dans un communiqué, non disponible en ligne pour le moment mais résumé par l'AFP le 14 décembre 2017, Le laboratoire allemand Merck affirme qu'il ne prévoyait pas de distribuer l'ancienne formule du LEVOTHYROX au-delà de 2018.
Le président de Merck France, Thierry Hulot, prévient en effet qu'il ne va pas "éternellement importer" de l'EUTHYROX, d'autant plus que cette ancienne formule "doit être progressivement remplacée [par la nouvelle formule] dans l'ensemble des pays européens au cours de l'année" 2018.
En conclusion : gérer au mieux grâce à l'élargissement de l'offre, dans un contexte de crise qu'il va falloir analyser pour éviter qu'elle se reproduise
Thierry Hulot conseille aux patients supportant mal le nouveau LEVOTHYROX, à l'instar des autorités de santé françaises, de prendre rendez-vous au plus vite avec leur médecin afin d'identifier une "forme pérenne de traitement" (nouveau LEVOTHYROX ou une des alternatives actuellement disponibles) avant que l'EUTHYROX ne soit plus distribué.
Pour mémoire, cette crise est née cet été, lorsque des utilisateurs ont signalé des effets indésirables sans avoir été prévenus d'un changement de formule et / ou de la possibilité de la survenue de symptômes anormaux. L'ANSM a d'ailleurs reconnu dès septembre, par la voix de son directeur Dominique Martin, l'insuffisance de sa communication à destination des professionnels de santé en mars 2017 (par lettre ou par... fax !) et des patients (par exemple, pas de mention spécifique sur la boîte à propos de la nouvelle formule et de l'attitude à avoir en cas d'effets indésirables).
De même, Agnès Buzyn a reconnu des déficits d'information et a lancé le 4 décembre une mission sur l'information des patients et des professionnels de santé afin de tenter d'améliorer cette situation… au moins pour la gestion de la prochaine crise de ce type.
En tout cas, l'élargissement de l'offre médicamenteuse, succédant au monopole français du LEVOTHYROX, devrait en effet permettre à la minorité de patients supportant mal la nouvelle formule de changer de médicament, en espérant que leurs effets indésirables cessent, qu'ils soient directement, ou non, liés à ce changement de formule.
Rappelons enfin que les résultats complets de l'enquête de pharmacovigilance de l'ANSM seront rendus publics début 2018 (premiers résultats résumés ici), ce qui permettra peut-être de mieux évaluer la part attribuable des symptômes signalés à un déséquilibre thyroïdien apparu ou accentué lors du changement d'excipients.
En savoir plus :
#petitdejANSM, livetweet de l'ANSM, 8 décembre 2017
Gestion des effets indésirables de la nouvelle formule du médicament Levothyrox : pas d'illégalité manifeste selon le Conseil d'État, Conseil d'Etat, 13 décembre 2017 (décision dans son intégralité)
Levothyrox: Merck ne prévoit pas de fournir l'ancienne formule au-delà de 2018, AFP via Romandie.com, 14 décembre 2017
Lévothyrox : l'Agence du médicament s'explique et reconnaît des erreurs, interview de Dominique Martin, Nouvel Observateur, 14s eptembre 2017
Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, lance la mission « Information et médicament », ministère de la santé, 4 décembre 2017
Sur VIDAL.fr
THYROFIX comprimé (lévothyroxine) : mise à disposition progressive à partir du 8 décembre 2017 (7 décembre 2017)
LEVOTHYROX : premiers résultats de l'enquête de pharmacovigilance de l'ANSM, des zones d'ombre persistent (21 octobre 2017)
L-THYROXIN HENNING (lévothyroxine) : 4 dosages disponibles à partir du 16 octobre(12 octobre 2017)
Levothyroxine : aides à l'initiation et à la gestion des difficultés, nouvelles importations d'EUTHYROX (5 octobre 2017)
EUTHYROX ("ancien LEVOTHYROX") en pharmacie le 2 octobre : conditions de prescription et délivrance (28 septembre 2017)
Levothyroxine : retour temporaire de l'ancienne formule du LEVOTHYROX, nouvelles spécialités annoncées (septembre 2017)
LEVOTHYROX : précisions et actions suite aux inquiétudes et plaintes de certains utilisateurs (août 2017)
LEVOTHYROX (lévothyroxine sodique) comprimé sécable : nouvelle formule, nouvelles couleurs (mars 2017)
Cancer de la thyroïde : face au surdiagnostic massif et ses conséquences, le CIRC appelle à la prudence (août 2016)
Sources
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