
Les Français comptent parmi les Européens les plus stressés, selon diverses enquêtes.
VIDAL : Les médecins généralistes prescrivent-ils trop de médicaments ?
Dr Claude Leicher : La France n'est pas le pays d'Europe où l'on consomme le plus de médicaments : c'est l'Angleterre. Je parle du volume, du nombre de boîtes : c'est ce qui est de notre responsabilité. Après, la France est le premier pays en matière de dépenses, mais les médecins généralistes n'y sont pour rien : la fixation des prix des médicaments est le secret de polichinelle le mieux gardé en France. Il y a pour nous une incompréhension complète : on nous accuse d'être responsables des dépenses liées aux médicaments, alors que ce n'est pas nous qui fixons les prix.
VIDAL : Il vous est également parfois reproché de faire des consultations trop courtes…
Dr Claude Leicher : Il faut arrêter de dire aux médecins généralistes : "vous prescrivez trop et ne passez pas assez de temps avec vos patients". Nous faisons la consultation la plus longue d'Europe, 18 minutes en moyenne, et la plus mal payée d'Europe ! Eu égard au temps passé, les médecins généralistes gagnent bien leur vie parce qu'ils travaillent 56 heures en moyenne, plus les gardes et la régulation. Donc à un moment donné il faut arrêter, les discours ne m'impressionnent absolument pas.
VIDAL : L'ANSM s'inquiète d'une "reprise de la consommation de benzodiazépines". Qu'en pensez-vous ?
Dr Claude Leicher : Nous soignons des populations qui ne vont pas bien en ce moment. La société française ne va pas bien. La prévalence des troubles dépressifs et des troubles anxieux est en forte augmentation. Le taux de suicide français est trois fois plus élevé que le taux de suicide anglais. Donc ne nous étonnons pas qu'en France, il y ait plus de prescription de benzodiazépines qu'en Angleterre, et qu'en Angleterre, il y ait plus de prescriptions de produits pour les bronches en raison du climat. Une fois que l'on a dit ça et que l'on regarde l'étude qui a été faite par l'ANSM sur la prescription de benzodiazépines : en nombre de boîtes, cette prescription n'a pas augmenté, elle a baissé. Donc il ne faut pas dire que l'on a de nouveau un problème avec les benzodiazépines : il y a un problème sur l'état d'anxiété et de dépression de la population. Quand quelqu'un se suicide et que nous ne lui avions pas donné de traitement, on nous reproche de ne pas lui en avoir donné ; quand on donne un traitement et que la personne se suicide, on vient nous voir en nous disant : "pourquoi donnez-vous trop de benzodiazépines ?".
Dr Claude Leicher : Il faut arrêter de dire aux médecins généralistes : "vous prescrivez trop et ne passez pas assez de temps avec vos patients". Nous faisons la consultation la plus longue d'Europe, 18 minutes en moyenne, et la plus mal payée d'Europe ! Eu égard au temps passé, les médecins généralistes gagnent bien leur vie parce qu'ils travaillent 56 heures en moyenne, plus les gardes et la régulation. Donc à un moment donné il faut arrêter, les discours ne m'impressionnent absolument pas.
VIDAL : L'ANSM s'inquiète d'une "reprise de la consommation de benzodiazépines". Qu'en pensez-vous ?
Dr Claude Leicher : Nous soignons des populations qui ne vont pas bien en ce moment. La société française ne va pas bien. La prévalence des troubles dépressifs et des troubles anxieux est en forte augmentation. Le taux de suicide français est trois fois plus élevé que le taux de suicide anglais. Donc ne nous étonnons pas qu'en France, il y ait plus de prescription de benzodiazépines qu'en Angleterre, et qu'en Angleterre, il y ait plus de prescriptions de produits pour les bronches en raison du climat. Une fois que l'on a dit ça et que l'on regarde l'étude qui a été faite par l'ANSM sur la prescription de benzodiazépines : en nombre de boîtes, cette prescription n'a pas augmenté, elle a baissé. Donc il ne faut pas dire que l'on a de nouveau un problème avec les benzodiazépines : il y a un problème sur l'état d'anxiété et de dépression de la population. Quand quelqu'un se suicide et que nous ne lui avions pas donné de traitement, on nous reproche de ne pas lui en avoir donné ; quand on donne un traitement et que la personne se suicide, on vient nous voir en nous disant : "pourquoi donnez-vous trop de benzodiazépines ?".
VIDAL : Comment réagissez-vous quand un patient prend trop de benzodiazépines ?
Dr Claude Leicher : C'est vrai que certains patients surconsomment, et nous demandent sans arrêt des benzodiazépines. Ils exercent une pression sur nous, mais nous exerçons une pression inverse sur eux : nous leur disons "vous vous rendez compte tout ce que je vous ai déjà donné, ne pourrait-on pas essayer de trouver ensemble une autre solution ?". Ensuite nous pourrions aussi remplacer des prescriptions de médicaments par des entretiens psychothérapeutiques. Encore faudrait-il que nous ayons des consultations qui soient suffisamment payées pour que l'on puisse faire des entretiens. Quand je prends en charge quelqu'un qui a des troubles dépressifs sévères, et que je fais une consultation qui dure trois quarts d'heure, elle m'est payée comme une consultation qui dure un quart d'heure.
Donc sur les benzodiazépines, ça suffit : on prend en charge trois problèmes et demi par consultation. Donc effectivement nos ordonnances sont un peu plus lourdes que celles des médecins anglais ou autres. Mais les médecins anglais ne s'occupent pas des troubles dépressifs, ne s'occupent pas de la prévention, ni des régimes des enfants, alors que les médecins généralistes français s'occupent de tout.
Propos recueillis le 23 janvier 2014 par Jean-Philippe Rivière au siège de MG France
* Le Dr Claude Leicher déclare n'avoir ni lien ni conflit d'intérêt
Sources
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