#Santé publique #Données épidémiologiques

La hausse des cas de syphilis chez les femmes en France fait peser un "risque croissant" de transmission congénitale

L’incidence de la syphilis poursuit sa progression en France en 2024. Une dynamique préoccupante, en particulier chez les femmes, car elle accroît le risque de syphilis congénitale, déjà responsable de décès récents, notamment à la maternité de l’hôpital Pellegrin, à Bordeaux.

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La syphilis congénitale a déjà commencé à augmenter en France entre 2012 et 2019.

La syphilis congénitale a déjà commencé à augmenter en France entre 2012 et 2019.Serhii Brovko / iStock / Getty Images Plus / via Getty Images

L'incidence des infections sexuellement transmissibles (IST) bactériennes a continué à augmenter en France en 2024, et la hausse en particulier des cas de syphilis chez les femmes constitue "un point de vigilance" puisqu'elle fait peser un risque de syphilis congénitale, a averti l'infectiologue Charles Cazanave lors d'une présentation jeudi 26 novembre au congrès de la Société française de lutte contre le sida (SFLS), à Montpellier.

La hausse des cas de syphilis est un phénomène global, avec 8 millions de cas enregistrés dans le monde en 2022 contre 7 millions en 2020, a rappelé le spécialiste du CHU de Bordeaux, à l'occasion d'un petit tour d'horizon des "incontournables" dans le domaine des IST.

Il a pris l'exemple assez frappant des États-Unis, où le nombre de cas de syphilis recensés en 2022 était aussi élevé qu'en 1950, "c'est-à-dire à quelques années de l'apparition de la pénicilline", et où, en parallèle, 3.200 cas de syphilis congénitale ont été enregistrés.

Concernant la France, l'infectiologue a rappelé qu'il y avait un "warning" au sujet de la syphilis congénitale en outre-mer (en Guyane, à Mayotte et à La Réunion), où la sérologie syphilis est "refaite à six mois de grossesse". Mais la situation en France hexagonale justifie également de rester "vigilants", comme en témoigne le décès "il y a quelques semaines" d'un bébé à la maternité de l'hôpital Pellegrin à Bordeaux, du fait d'une syphilis congénitale.

"Donc je pense qu'il faut vraiment que ce message passe et que nous soyons vigilants sur le suivi des femmes enceintes", a estimé Charles Cazanave.

Une étude publiée mardi dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) de Santé publique France (SPF) montre d'ailleurs que l'incidence de la syphilis congénitale en France a déjà commencé à augmenter entre 2012 et 2019.

6.500 diagnostics de syphilis en secteur privé, 2.500 dans les Cegidd

La vigilance est de mise du fait d'une hausse en 2024 de l'incidence de la syphilis chez les femmes en particulier, a noté Charles Cazanave, reprenant les dernières données de surveillance de SPF sur les IST bactériennes.

Ces données montrent en effet qu'entre 2022 et 2024, l'incidence de la syphilis a augmenté de façon plus marquée chez les femmes (+24 %) que chez les hommes (+10 %), pour une hausse globale de 12 %.

La hausse observée chez les femmes "met en évidence un risque croissant de transmission congénitale malgré la gratuité du dépistage prénatal, notamment dans certains DROM [départements et régions d'outre-mer]", note SPF, selon qui "ce constat conforte le besoin de mieux structurer la surveillance des syphilis congénitales, avec le concours des cliniciens et des biologistes qui les prennent en charge".

L'agence précise coordonner "une réflexion avec les parties prenantes" afin de "définir les modalités les plus adaptées pour cette surveillance".

En 2024, le nombre total de personnes diagnostiquées et traitées pour une syphilis au moins une fois dans l'année en secteur privé a été estimé à environ 6.500 (dont 89 % d'hommes), tandis que les centres gratuits d'information, de dépistage et de diagnostic (Cegidd) ont rapporté environ 2.500 cas (dont 83 % d'hommes) de syphilis récentes (soit de moins d'un an).

Près de 6 % de la population française (près de 4 millions) s'est fait dépister en 2024 pour la syphilis. Le déploiement en septembre 2024 du dispositif Mon test IST - qui "permet le dépistage [de cinq IST dont la syphilis] sans ordonnance en laboratoire de biologie médicale pour tous les assurés sociaux et un dépistage gratuit chez les moins de 26 ans" -, y a contribué, puisque 48.000 personnes y ont eu recours dès le premier mois, 76.000 en octobre, 81.000 en décembre, détaille SPF dans son bulletin.

L'agence précise que ce dispositif a "particulièrement bénéficié aux jeunes de 15 à 25 ans", qui représentaient 44 % à 50 % des dépistés selon le mois, et note que "les hommes et les femmes étaient représentés à parts égales parmi les bénéficiaires".

Gonorrhées et chlamydioses augmentent aussi

Concernant les autres IST bactériennes surveillées, à savoir les infections à gonocoques et à Chlamydia trachomatis, une hausse respective de 35 % et de 14 % de leur incidence en France a été observée entre 2022 et 2024.

La hausse de l'incidence des infections à gonocoques était plus marquée chez les hommes (+40 %) que chez les femmes (+25 %), et en particulier chez les hommes de 15-25 ans (+51 %). Pour les infections à Chlamydia, SPF note que c'est chez les jeunes de 15-25 ans que le taux a le plus fortement augmenté entre 2023 et 2024, soit +13 % chez les femmes et +21 % chez les hommes de cette tranche d'âge.

Selon les données de l'assurance maladie, environ 61.100 personnes ont reçu un diagnostic de chlamydiose en 2024, et 25.800 de gonorrhée, tandis que les Cegidd ont rapporté avoir diagnostiqué respectivement 22.200 et 13.500 de ces infections sur l'année.

"Les nombreux progrès du dépistage ces dernières années, incluant le remboursement des PCR pour la recherche des IST majeures, des dispositifs tels que l'accès au dépistage sans ordonnance, et les tests hors les murs, ont contribué à l'augmentation des diagnostics", souligne SPF.

"Néanmoins, les estimations encore très élevées de la prévalence de ces IST issues de l'étude PrevIST, confirment l'impératif d'un dépistage régulier et la protection des rapports par le préservatif, mesures incontournables pour contrôler la transmission de ces IST", conclut l'agence sanitaire.

D'après une dépêche publiée dans APMnews le 28 novembre 2025.

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