D’autres études sont nécessaires pour préciser la meilleure stratégie de réduction des doses. ALEKSEI BEZRUKOV / iStock / Getty Images Plus / via Getty Images
Chez des patients avec une dépression en rémission, l'arrêt des antidépresseurs en diminuant progressivement les doses, associé à un soutien psychologique, est efficace pour prévenir les rechutes et supérieur à un arrêt brutal ou rapide, mais les données sont limitées pour l'anxiété, selon les résultats d'une méta-analyse en réseau publiés le 10 décembre 2025 dans The Lancet Psychiatry.
Selon les recommandations, les antidépresseurs peuvent être pris en traitement d'entretien pendant six à neuf mois après un premier épisode de troubles dépressifs ou anxieux modérés à sévères et pendant au moins deux ans en cas de maladie sévère ou récidivante. Cependant, la surprescription et la prise sans fin de ces médicaments posent question en raison de leurs effets secondaires au long cours, rappellent Debora Zaccoletti de l'université de Vérone et du centre collaborateur de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour la recherche et la formation en santé mentale et l'évaluation des services et ses collègues.
Il est recommandé globalement de réduire progressivement les doses d'antidépresseur, mais les études sont insuffisantes pour déterminer quelle est la meilleure stratégie (cf. article VIDAL du 8 octobre 2024).
Dans cette étude académique, les chercheurs ont mené une revue systématique de la littérature et une méta-analyse en réseau pour comparer différentes stratégies de déprescription des antidépresseurs face à des troubles dépressifs ou anxieux en rémission.
L'analyse a porté sur 76 essais cliniques évaluant de manière randomisée et contrôlée un arrêt brutal, une réduction rapide des doses (sur quatre semaines maximum) ou lente (sur plus de quatre semaines), un maintien du traitement à doses réduites (moins de la moitié de la dose minimale efficace), la poursuite du traitement tel que prescrit initialement, avec ou sans soutien psychologique, auprès d'un total de 17.379 adultes (45,2 ans en moyenne, 67,5% de femmes) en rémission totale ou partielle de leurs troubles.
La majorité de ces études (79%) ont été menées chez des patients atteints de dépression. Toutefois, en moyenne, 18% des patients dans l'ensemble des études présentaient à la fois des troubles dépressifs et anxieux. Le suivi était de 45,9 semaines en moyenne.
Les antidépresseurs les plus représentés dans ces études étaient des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) et des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSN) pour respectivement 40,1% et 23% des patients.
Un soutien psychologique était évalué dans 10 études, concernant 5% de l'ensemble des patients.
Les chercheurs ont d'abord réalisé des analyses distinctes par diagnostic, observant des effets de traitement similaires, puis une analyse sur l'ensemble des données.
Celle-ci montre que plusieurs stratégies sont supérieures à l'arrêt brutal des antidépresseurs sur la prévention des rechutes, avec une réduction du risque de 60% lorsque le traitement est poursuivi aux doses habituelles en association à un soutien psychologique (niveau modéré de preuve), pour un nombre de patients à traiter (NNT) de 4,3 pour éviter un cas de rechute, ou sans soutien psychologique (niveau modéré), pour un NNT de 5,3.
L'arrêt du traitement avec réduction progressive des doses est associé à une réduction du risque de rechute de 48% par rapport à l'arrêt brutal (niveau modéré), avec un NNT de 5,4.
La poursuite du traitement à doses réduites est également supérieure à l'arrêt brutal, avec une baisse de 38% du risque de rechute, pour un NNT de 6,8, mais un niveau faible de preuve.
Ces stratégies étaient également supérieures à l'arrêt du traitement avec réduction rapide des doses, avec un niveau modéré de preuve, sauf la poursuite du traitement à doses réduites, pour laquelle le niveau de preuve est là encore faible.
Enfin, l'arrêt du traitement avec réduction rapide des doses associé à un soutien psychologique, l'arrêt brutal associé à un soutien psychologique et l'arrêt avec réduction progressive des doses n'étaient significativement pas différents de l'arrêt brutal seul.
Globalement, les différentes stratégies de déprescription présentaient un profil de tolérance comparable.
A la connaissance des chercheurs, il s'agit de la première méta-analyse en réseau comparant les principales stratégies de déprescription des antidépresseurs chez des adultes en rémission totale ou partielle de troubles dépressifs ou anxieux.
Les résultats confirment leur hypothèse de départ, à savoir qu'un arrêt du traitement avec réduction progressive des doses peut prévenir le risque de rechute, mais s'il est associé à un soutien psychologique.
Cette stratégie s'avère supérieure à l'arrêt brutal mais aussi à l'arrêt avec réduction rapide des doses, avec un niveau modéré de preuve, et à l'arrêt avec réduction progressive des doses seul, avec un niveau faible. Les résultats ne sont pas significatifs pour les autres stratégies évaluées, avec des niveaux de preuve faibles à très faibles.
Globalement, cette méta-analyse confirme les recommandations visant à prioriser l'arrêt des antidépresseurs avec réduction progressive et personnalisée des doses, en association à un soutien psychologique, et à décourager les arrêts soit brutaux soit rapides, concluent les chercheurs. Le maintien du traitement à doses réduites peut être envisagé pour des cas sélectionnés.
Cependant, les données sont moins robustes pour les patients en rémission de troubles anxieux en particulier. La généralisation des résultats de cette méta-analyse est plausible mais nécessite d'être confirmée par des essais cliniques spécifiques.
Il faudrait également poursuivre des travaux pour préciser ces stratégies de réduction de doses et définir les schémas optimaux, suivre les patients au-delà d'un an, déterminer des interventions basées sur la thérapie cognitivo-comportementale pouvant être déployées dans différents cadres…
D'après une dépêche publiée dans APMnews le 11 décembre 2025.
The Lancet Psychiatry, publication en ligne du 10 décembre
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