Prescriptions d’antibiotiques : augmentation notable chez les 65 ans ou plus.KatarzynaBialasiewicz / iStock / Getty Images Plus / via Getty Images
Santé publique France publie son rapport annuel sur la consommation d'antibiotiques en France, en secteur de ville.
Pour l'année 2024, les données indiquent une augmentation significative de cette consommation par rapport à l'année précédente (2023) :
- +5,4 % en DDJ (dose définie journalière) pour 1 000 habitants et par jour (niveau d'avant pandémie) ;
- +4,8 % de prescriptions.
Cette hausse est plus ou moins marquée selon :
- les populations (sexe, âge) ;
- les territoires ;
- le praticien : les prescriptions par les médecins généralistes ont augmenté de 6,2 % ;
- les antibiotiques : la consommation des sulfonamides et triméthoprime et des bêta-lactamines, pénicillines a augmenté.
Pour limiter, voire inverser cette hausse de consommation des antibiotiques, Santé publique France recommande :
- de renforcer les efforts des prescripteurs ;
- de poursuivre la sensibilisation des patients à l'utilisation à bon escient des antibiotiques.
Comme chaque année à l'occasion de la semaine mondiale de sensibilisation à l'antibiorésistance, Santé publique France publie un état des lieux de la consommation française d'antibiotiques per os en ville [1, 2].
La consommation repartie à la hausse en 2024
Sur dix ans (2014-2024), la tendance de consommation globale reste contrastée (cf. Encadré 1), marquée par une diminution entre 2014 et 2020 puis un accroissement après la pandémie : au cours de la décennie, la consommation exprimée en DDJ a diminué en moyenne de 0,2 % par an.
En 2023, les chiffres de consommation en ville indiquaient une baisse après deux années d'augmentation post-Covid (2021 et 2022).
En 2024, 27,2 millions de personnes ont reçu au moins une prescription d’antibiotiques, soit 4 Français sur 10. D'après le bilan présenté par Santé publique France, la consommation d’antibiotiques en secteur de ville est repartie significativement à la hausse en 2024 sur la base des deux indicateurs suivants :
- consommation en doses définies journalières : 22,1 DDJ pour 1 000 habitants et par jour, soit une augmentation de 5,4 % par rapport à 2023. Ce niveau de consommation est comparable à ceux enregistrés avant la pandémie de Covid-19 (2019) ;
- consommation estimée en nombre de prescriptions : plus de 860 prescriptions pour 1 000 habitants et par an, soit +4,8 % des prescriptions en ville par rapport à 2023.
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Des disparités en fonction de l'âge, du sexe ou de la région d'habitation
Dans le détail, l'augmentation de la consommation est différente selon les populations de patients :
- chez les enfants (0-4 ans) : on observe une stabilisation autour de 1 326 prescriptions/1 000 habitants, soit légèrement sous le niveau de 2019. Les données montrent une forte hausse de la consommation dans cette tranche d'âge au troisième trimestre 2024, correspondant à la période des épidémies hivernales (dont la plupart sont virales et ne justifient pas le recours aux antibiotiques) ;
- en population adulte : l'augmentation est notable chez les 65-79 ans avec 1 010 prescriptions/1 000 habitants, et les 80 ans et plus avec 1 202 prescriptions/1 000 habitants ;
- en population féminine versus population masculine : la consommation apparaît plus élevée chez les femmes de moins de 65 ans (25,6 DDJ/1 000 hab/j vs 18,9 chez les hommes). Après 65 ans, la consommation est plus élevée chez les hommes en DDJ, mais reste supérieure chez les femmes en nombre de prescriptions.
Les régions les plus consommatrices d'antibiotiques en 2024 sont la Corse et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca) alors que les moins consommatrices sont la Bretagne, la région Auvergne-Rhône-Alpes et les Pays de la Loire.
Une dynamique différente selon les prescripteurs
En 2024, les médecins généralistes concentrent les trois quarts des prescriptions (75,6 % - cf. Encadré 2) ; dans cette population de prescripteurs, les prescriptions ont progressé de 6,2 % par rapport à 2023.
Une augmentation des prescriptions (+1,5 %) est également observée pour les spécialistes, qui représentent 12,2 % du total des prescriptions.
En revanche, le nombre de prescriptions est stable pour les chirurgiens-dentistes (- 0,2 %), qui représentent 11,9 % des prescriptions.
Les prescriptions par d'autres professionnels de santé (sages-femmes notamment) progressent nettement en 2024 (+8,5 %) même si elles restent marginales en comparaison au nombre total de prescription (0,3 %).
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Des antibiotiques plus impactés que d'autres
L'augmentation est particulièrement marquée pour les antibiotiques suivants (cf. Encadré 3) :
- sulfonamides et triméthoprime : +36,8 % (consommation) et +37,3 % de prescriptions ;
- autres antibactériens : +7,3 % (consommation) et +32,4 % de prescriptions ;
- bêta-lactamines, pénicillines : +10,9 % (consommation) et +6,7 % de prescriptions. Cette classe reste la plus prescrite et représentait plus de la moitié des prescriptions en 2024. Au sein de cette classe, la prescription et la consommation des pénicillines telles que l'amoxicilline a largement progressé en 2024 (respectivement +18,9 % et +29,4 %), en cohérence avec les recommandations actuelles pour traiter de nombreuses infections bactériennes courantes.
Le recours aux macrolides s'est également accru de façon continue entre 2020 et 2024 :
- +7,6 % de consommation (DDJ) ;
- +6,8 % de prescription, notamment dans un contexte de recrudescence de la coqueluche qui a contribué à l'usage accru de l'azithromycine.
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Un phénomène isolé ou le début d'un cycle ?
Dans le classement des pays européens les plus consommateurs d'antibiotiques, la France conserve sa 2e place.
En outre, la hausse de consommation observée en 2024 éloigne la France de son objectif de 650 prescriptions pour 1 000 habitants par an d'ici 2027.
Si cette augmentation est significative par rapport à 2023, les auteurs de ce bilan rappellent que l'année 2024 a été marquée par des épisodes épidémiques significatifs, en particulier de grippe, bronchiolite et de coqueluche : « Pour les infections virales, la crainte de complications et de surinfections bactériennes, notamment chez les sujets à risque, a pu induire une augmentation des prescriptions d'antibiotiques ».
L'analyse des données au cours des prochains mois et des années à venir permettra de déterminer si les données 2024 sont un phénomène isolé (suivi d'une reprise de la baisse de la consommation), ou si elles marquent le début d'un cycle d'augmentation de la consommation d'antibiotiques.
Quoi qu’il en soit, l'utilisation raisonnée des antibiotiques reste un enjeu important et mérite qu'un ensemble de mesures telles que le soutien à l'application des recommandations ou la sensibilisation aux risques d'antibiorésistance soient réactivées ou renforcées.
[1] Les prescriptions et la consommation d’antibiotiques en secteur de ville augmentent en 2024 (Santé publique France, 18 novembre 2025)
[2] Données de surveillance – Consommation d’antibiotiques en secteur de ville en France 2014-2024 (Santé publique France, novembre 2025)
5 minutes
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