PARIS, 12 juin 2025 (APMnews)
Le Conseil national de l'ordre des médecins déposera "dans les prochains jours" un recours devant le juge administratif pour contester l'arrêté fixant les listes des produits et prestations concernés par la primoprescription des infirmiers en pratique avancée (IPA), a confirmé l'instance à APMnews jeudi.
L'arrêté du 25 avril 2025 relatif à la primoprescription des infirmiers en pratique avancée (IPA) fixe la liste des prescriptions de produits ou prestations soumis à prescription médicale obligatoire que l'ensemble des IPA est autorisé à prescrire, ainsi que la liste des prescriptions de produits ou prestations soumis à prescription médicale obligatoire des IPA, en fonction de leur mention, rappelle-t-on.
"Nous estimons que l'arrêté, tel qu'il a été rédigé, va bien au-delà de ce que la loi Rist II [du 19 mai 2023, portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé] proposait", a expliqué à APMnews le Dr René-Pierre Labarrière, président de la section "exercice professionnel" au Conseil national de l'ordre des médecins (Cnom).
L'ordre des médecins s'est particulièrement dit "préoccupé" par l'ouverture de la primoprescription aux IPA, en l'absence de diagnostic médical préalable, dans les cas spécifiques du "diabète ou de l'hypertension".
"Il nous apparaît, et cela a été appuyé par les différents conseils nationaux professionnels (CNP) de ces spécialités, qu'il est raisonnable qu'il y ait une primoprescription et un diagnostic préalable réalisé par le médecin", a noté le Dr Labarrière.
"Le diabète, c'est une maladie poly-organes, qui touche aussi bien les reins que les yeux ou le cœur, et on a besoin de faire un état des lieux précis du malade, d'évaluer les facteurs de risque et les comorbidités associées", a-t-il explicité. Dans ce cadre, "il est, selon nous, indispensable que ce soit le médecin qui évalue le stade diabétique, l'état du patient et le type de prescription à faire".
"Concernant l'hypertension, c'est la même chose", a-t-il poursuivi. "Les hypertensions peuvent être secondaires dans le cadre de pathologies associées, et il faut alors réaliser des examens cliniques et complémentaires. Donc il faut avoir en tête toute la notion de diagnostic différentiel, [qui] doit être faite par le médecin, pour donner au patient la plus grande sécurité."
S'il a aussi exprimé son scepticisme sur la primoprescription d'activité physique adaptée (APA), le Dr Labarrière s'est toutefois montré favorable à la primoprescription des arrêts de travail de moins de trois jours et des bons de transport.
Selon le Cnom, le recours est en cours de préparation et devrait être déposé "au plus tard la semaine prochaine".
"Pressions corporatistes"
Dans un communiqué publié la semaine dernière, le Conseil national de l'ordre infirmier (CNOI) a de son côté réitéré son "son soutien plein et entier" à l'élargissement des compétences des IPA.
"Fruit d'un processus de concertation approfondi, cet arrêté a été élaboré avec la participation active de l'ensemble des parties prenantes, y compris l'Académie nationale de médecine", a rappelé l'instance dans son communiqué.
Ce texte s'inscrit "dans la droite ligne des objectifs portés par la loi Rist", a-t-elle précisé.
Les compétences des IPA en matière de primoprescription sont "encadrées, précises et ciblées" et ne "remettent pas en cause le rôle du médecin, mais permettent une prise en charge plus rapide et continue de pathologies identifiées, dans le respect de la sécurité des patients", a-t-elle poursuivi.
L'Union nationale des infirmiers en pratique avancée (Unipa) s'est également agacée des "pressions corporatistes" selon elle exercées par le Cnom pour réécrire un texte publié.
"Non, la loi Rist [II] n'impose pas un diagnostic médical préalable à la prise en charge par l'IPA […]. Interpréter la loi comme imposant un tel passage revient à réécrire le texte législatif, à contresens de la volonté du Parlement", a-t-elle fustigé.
L'instance s'est également émue de la tenue d'une "réunion technique, le 6 juin" entre l'ordre des médecins et le ministère.
"Ce n'est pas à une organisation ordinale de dicter la norme réglementaire en dehors des canaux consultatifs officiels", s'est insurgée l'Unipa, appelant le gouvernement à ne pas céder "sous la pression d'un lobby médical".
Pour rappel, la loi Rist II a modifié l'article L4301-2 du code de la santé publique afin d'instaurer un accès direct aux IPA salariés exerçant dans les établissements de santé publics et privés ainsi que dans les établissements et services médico-sociaux (ESMS), et aux IPA libéraux exerçant au sein de structures d'exercice coordonné (maisons de santé, équipes de soins primaires).
Le décret du 21 janvier 2025, encadrant l'accès direct et la primoprescription pour les IPA, modifie la partie réglementaire du code de la santé publique traitant de la pratique avancée.
Il précise que l'IPA "participe à la prise en charge globale des patients dont le suivi lui est confié par un médecin ou s'adressant directement à lui". Lorsqu'il n'exerce pas dans les conditions de l'accès direct, "la conduite diagnostique et les choix thérapeutiques sont définis par le médecin lui ayant confié le suivi du patient".
jr/lb/APMnews
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