La santé mentale, nouvel eldorado des pseudo-thérapeutes

Source :AFP
Date de publication :30 juin 2025
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(AFP, publié le 01/05/2025)

Paris, France

Ils se présentent comme "psy-coach", "psy-conseil" ou "psycho-praticien" : des thérapeutes autoproclamés envahissent le secteur de la santé mentale, profitant d'une demande croissante et d'un manque de régulation, avec des risques importants de dérives.

Accompagnement à 3.900 euros

La Miviludes rapporte ainsi des "préoccupations croissantes dans le domaine peu régulé" de la santé mentale.

Selon l'organisme - rattaché au ministère de l'Intérieur -, la santé mentale est devenue "un marché en pleine expansion avec un large recours à des praticiens ou coachs adeptes de pratiques psychothérapeutiques non maîtrisées, pouvant causer des dommages psychologiques graves".

Grande cause nationale 2025, la santé mentale est devenue un eldorado pour les pseudosciences depuis la pandémie de Covid-19.

"Sur les réseaux professionnels ou de divertissements, énormément de personnes prétendent pouvoir soigner des problèmes de santé mentale en proposant des traitements comme des psychothérapies structurées, sans avoir aucune formation", s'inquiète Mickaël Worms-Ehrminger, docteur en santé publique, spécialisé dans les troubles mentaux.

Certains affirment guérir les troubles anxieux et les troubles de l'attention, quand d'autres s'attaquent à l'autisme, la schizophrénie ou la bipolarité.

La Miviludes observe ainsi "un doublement des signalements reçus depuis une dizaine d'années dans le domaine de l'autisme", autour de propositions alternatives de prise en charge, via "des compléments alimentaires, du cannabis ou des protocoles de chélation" (qui prétend "détoxifier" le corps en extrayant des métaux lourds de l'organisme), détaille à l'AFP le chef de l'organisme, Donatien Le Vaillant.

La santé et le bien-être font l'objet du plus grand nombre de signalements reçus par la Miviludes entre 2022 et 2024 (37%), et concernent dans 80% des cas des non-professionnels de santé.

"Sur Instagram, des +coaches TDAH+ proposent des accompagnements pour aider des jeunes à vivre avec leur trouble de l'attention et les poussent à se détourner des solutions médicamenteuses", signale M. Worms-Ehrminger.

Plus récemment, un nouveau business s'est créé autour du burn-out maternel, ciblant les jeunes mères épuisées.

La Miviludes rapporte le cas d'une "pseudo-coach" qui hameçonne les mamans "fragiles et dépressives" qu'elle diagnostique "hypersensibles", avant de leur proposer un accompagnement en ligne... pour 3.900 euros.

"Beaucoup de confusion"

Ces thérapeutes autoproclamés prospèrent grâce au manque de régulation autour des titres reconnus par l'État : seuls les titres de psychologue, psychiatre et psychothérapeute sont protégés.

"On peut se dire +psy-coach+, +psy-conseil+... Cela ne tombe pas sous le coup de la loi, mais crée beaucoup de confusion", estime M. Le Vaillant.

Car ces appellations "laissent croire qu'il y a un rapport légitime à la psychologie", souligne Mickaël Worms-Ehrminger.

Pour Frank Bellivier, délégué ministériel à la santé mentale et à la psychiatrie, les autorités sanitaires doivent continuer à "bien communiquer" pour lutter contre la "méconnaissance" qui pousse vers ces pratiques.

Source de confusion supplémentaire : certains thérapeutes autoproclamés côtoient des professionnels de santé en s'installant dans des maisons médicales "où les véritables soignants sont en nombre insuffisant", remarque la Miviludes.

"Il faut se défaire de l'image folklorique du gourou", plaide Catherine Katz, ex-magistrate et présidente de l'Union nationale de défense des familles et de l'individu victimes de sectes: le "gourou" d'aujourd'hui a "une plaque dorée", une "imagination sans limites" et peut se prétendre "dentosophe" - un promoteur d'une "autoguérison" liant la santé de la bouche à celle du corps.

La désertification médicale peut aussi bénéficier aux "coaches en tout genre", alors que "les temps d'attente" peuvent être "monstrueux" pour accéder à des soins psychiatriques "coûteux", relève Mickaël Worms-Ehrminger.

- Par Chloé RABS -

cra/ref/ito/jp

© Agence France-Presse

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