#Santé publique

Des facteurs liés à l'équipe et à l'organisation, causes d'évènements indésirables graves chez les nouveau-nés

Des facteurs liés à l’équipe ou à l’organisation ont été identifiés comme causes d’EIGS chez les nouveau-nés. Viennent en tête les erreurs en lien avec la prise en charge obstétricale. Puis les erreurs liées aux soins ou à leur organisation, puis les erreurs médicamenteuses. 

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Cette analyse de la HAS porte sur 328 déclarations d’EIGS faites par des professionnels de santé.

Cette analyse de la HAS porte sur 328 déclarations d’EIGS faites par des professionnels de santé.Ratchat / iStock / Getty Images Plus / via Getty Images

Des facteurs liés à l'équipe, aux professionnels ou encore à l'organisation et au management ont été identifiés comme causes d'évènements indésirables graves associés aux soins (EIGS) chez les nouveau-nés, dans un rapport d'analyse de la Haute autorité de santé (HAS) publié le 21 mai 2025 [1].

La mortalité infantile connaît une évolution préoccupante en France. Ses origines sont multifactorielles, mais restent à déterminer. Afin de contribuer aux travaux sur la santé périnatale en France, la HAS s'est auto-saisie pour mener la première analyse nationale des EIGS survenus chez les nouveau-nés (jusqu'à l'âge d'un mois). Jusqu'à présent, seules des analyses régionales - en Île-de-France et en Pays de la Loire - avaient été menées, souligne-t-elle.

Cette analyse porte sur 328 déclarations réalisées par des professionnels de santé et reçues à la HAS entre le 1er mars 2017 et le 27 mai 2024. L'agence précise qu'il existe une sous-déclaration des EIGS et que ces données n'ont pas de valeur épidémiologique et ne peuvent être généralisées.

Plus de la moitié (54 %) de ces EIGS ont eu pour conséquence principale le décès, dans 31 % des cas une mise en jeu du pronostic vital et dans 15 % des cas un probable déficit fonctionnel permanent. Parmi les 179 décès, 42 concernaient des enfants mort-nés, dont huit cas de mort fœtale in utero et 34 cas d'enfants nés vivants avec échec de la réanimation.

Dans 57 % des cas, les déclarants ont jugé que ces EIGS étaient évitables ou probablement évitables.

Ces EIGS sont survenus pour 317 d'entre eux dans des établissements de santé, dont quatre dans des unités « physiologiques » ou « salles nature ». Les autres cas sont survenus au domicile, dans des maisons de naissance, dans des structures mobiles d'urgence et de réanimation (Smur), dans un centre périnatal de proximité et dans un service de protection maternelle et infantile (PMI).

Sur les 328 EIGS déclarés, 83 % ont eu lieu pendant une période de vulnérabilité - où la vigilance est moindre et/ou les effectifs des professionnels incomplets - (nuit, week-end, heure de changement d'équipe, jour férié).

Parmi les causes immédiates déclarées (dans 282 cas), viennent en tête les erreurs en lien avec la prise en charge obstétricale, telles que défaut de surveillance ou d'interprétation du rythme cardiaque fœtal (RCF), retards à la gestion de l'accouchement, gestes traumatiques (utilisation de ventouses ou de forceps) lors de l'extraction du bébé, défauts de suivi de la grossesse (diabète de la parturiente) (n = 167).

En deuxième position arrivent les erreurs liées aux soins ou à l'organisation des soins (infections associées aux soins, défauts de surveillance de la technique du peau à peau, retards de transfert de nouveau-nés, défauts de surveillance à l'origine de chutes…) (n = 41), puis les erreurs médicamenteuses (n = 33).

Les causes profondes identifiées concernent d'abord les facteurs liés aux patients (77 %), mais aussi pour une grande part des facteurs liés aux tâches à accomplir, à l'équipe, à l'environnement, aux professionnels, à l'organisation et au management, ou encore au contexte institutionnel.

Ainsi, 64% des déclarations indiquent des facteurs liés à l'équipe. Il s'agit le plus souvent de la communication entre professionnels (136 cas sur 209), les transmissions et alertes (85/209) et les informations écrites (52/209).

Dans plus de la moitié des déclarations (52%), des facteurs liés aux professionnels sont évoqués, majoritairement des facteurs liés au stress (75/169), généralement en lien avec la charge de travail. Un manque d'expérience des professionnels est souvent mentionné également.

En outre, dans 28% des déclarations, des facteurs liés à l'organisation et au management sont mentionnés, principalement liés à la politique de formation (n = 33/91) et aux ressources humaines (n = 25/91). « Il est signalé, par exemple, un manque de formation concernant l'interprétation des RCF ou la gestion des cathéters centraux et périphériques », note la HAS.

Des facteurs liés au contexte institutionnel sont cités dans 15 % des déclarations (politiques régionales, nationales), notamment la difficulté des transports sanitaires en métropole et dans les DROM (n = 11/48) et les tensions en personnel médical et paramédical.

S'assurer des compétences des professionnels

Sur la base de cette analyse, la HAS émet 10 préconisations pour améliorer la sécurité des soins des nouveau-nés, portant sur les causes profondes identifiées. Elles viennent en complément des autres recommandations en lien avec les nouveau-nés de la HAS ou labellisées par la HAS existant déjà, qui restent valides.

Elle recommande notamment de s'assurer systématiquement des compétences (techniques et non techniques) des professionnels exerçant en gynécologie-obstétrique et en pédiatrie néonatale, car « des problèmes de connaissances et de compétences des professionnels, techniques et non techniques (travail en équipe), sont fréquemment cités par les déclarants comme source d'EIGS ».

Il faut ainsi « assurer la formation initiale et continue des professionnels de santé sur l'interprétation des RCF, surtout ceux “complexes” ou “douteux” , sachant qu'il s'agit d'un critère impératif de la certification 2025 des établissements de santé pour la qualité des soins », et renforcer la formation théorique et pratique sur les cathéters.

L'accueil des nouveaux arrivants, en particulier des internes et intérimaires, doit être formalisé, avec entre autres un livret d'accueil comprenant les modalités d'accès aux différents logiciels (métier, aide à la prescription et gestion documentaire) et la liste des principaux documents disponibles qui doivent leur être remis.

La communication entre professionnels doit aussi être améliorée. « Par exemple, dans le cadre de la réanimation néonatale, lorsque plusieurs personnes sont présentes, chacune doit connaître précisément son rôle (distribution des rôles par la personne menant la réanimation). Les personnes participant à une réanimation doivent savoir communiquer efficacement avec l'emploi d'un langage précis et commun à tous, et la verbalisation de ce qui est fait ».

Il faut garantir l'accès de tous les professionnels de santé impliqués à l'ensemble des informations médicales nécessaires à la prise en charge des nouveau-nés et de leur mère.

Pour lutter contre les erreurs diagnostiques, il faut notamment sensibiliser les professionnels au fonctionnement cognitif et à ses failles, savoir identifier les situations à risque spécifique à son environnement de travail, disposer de prises en charge protocolées, améliorer les conditions de travail (moyens humains suffisants, équipements techniques fonctionnels, locaux adaptés…) et améliorer le travail en équipe.

Améliorer la prise en charge de la réanimation néonatale en maternité

La HAS préconise aussi d'améliorer la prise en charge de la réanimation néonatale en maternité, car « plusieurs des EIGS déclarés ont été causés par des défauts d'anticipation et de gestion de la réanimation néonatale (par exemple, méconnaissance des pratiques de réanimation) ».

« Le grade de risque des femmes enceintes devrait être systématiquement évalué et tracé dans leur dossier médical. Chaque maternité doit définir avec l'équipe pédiatrique et anesthésique les situations qui doivent donner lieu à un appel anténatal ».

« Les situations à risque n'étant pas toujours prévisibles, il est primordial qu'un personnel compétent et un équipement technique adéquat soient prêts pour une éventuelle réanimation lors de chaque naissance », insiste l'agence.

Les comorbidités de la mère apparaissent souvent comme des causes profondes des EIGS survenus chez les nouveau-nés, car elles peuvent avoir un impact sur la santé du fœtus et compliquer l'accouchement. Il est donc nécessaire de mieux prendre en charge les grossesses et accouchements à risque, avec par exemple la mise en place d'un parcours d'éducation thérapeutique pour ces patientes.

Pour prévenir les risques liés à un accouchement par césarienne, les établissements de santé doivent disposer d'une procédure actualisée de gestion des césariennes avec un code couleur.

Il faut également mieux prévenir les risques de chute et d'étouffement du nouveau-né à la maternité, respecter les bonnes pratiques de prise de décision des transferts in utero et périnataux, poursuivre la sécurisation de la prise en charge médicamenteuse et de l'utilisation des dispositifs médicaux, renforcer la sécurité des accouchements accompagnés à domicile et des accouchements en maison de naissance, et faire évoluer le formulaire de déclaration des EIGS et améliorer la qualité des déclarations.

D'après une dépêche publiée dans APMnews le 21 mai 2025.

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