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Risque de COVID-19 sévère et de décès : les résultats d'une vaste étude de cohorte française

L'ANSM* a publié les conclusions d'une vaste étude de cohorte visant à préciser les facteurs de risque de COVID-19 grave et à quantifier leur impact sur l'évolution de la maladie. Les critères de sévérité de l'infection retenus étaient l'hospitalisation et le décès.

Dirigée par le groupement d'intérêt scientifique (GIS) Epi-Phare, cette étude propose une analyse quasi-exhaustive des données de la population française, soit plus de 66 millions de Français. 

Les principaux résultats, présentés dans l'article ci-dessous, constituent une source supplémentaire pour affiner la 
stratégie de protection de la population française contre le virus SARS-CoV-2 et limiter la pression hospitalière. 

*Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé
 
David Paitraud 10 février 2021 Image d'une montre5 minutes icon Ajouter un commentaire
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L'âge et les maladies chroniques sont les principaux facteurs de risque de COVID-19 grave et de décès (illustration).

L'âge et les maladies chroniques sont les principaux facteurs de risque de COVID-19 grave et de décès (illustration).


Les données analysées dans l'étude de cohorte du GIS Epi-Phare (Groupement d'intérêt scientifique - ANSM et CNAM) sont issues du système national des données de santé (SNDS - cf. Encadré 1) et couvrent l'intégralité de la population française, soit plus de 66 millions de Français.
 
Encadré 1 - Le SNDS en quelques mots
Le SNDS est une base nationale regroupant, de manière anonyme, toutes les données de remboursement enregistrées par l'Assurance maladie obligatoire :
  • remboursements des soins de santé et traitements médicamenteux : à partir de la base de données DCIR (datamart de consommation inter-régimes)
  • remboursement des frais d'hospitalisation : à partir de la base de données PMSI (programme de médicalisation des systèmes d'Information).

L'étude présentée et mise en ligne le 9 février 2021 couvre la période de la première vague de la pandémie en France (dont la période de confinement) :
  • du 15 février au 15 juin 2020 : 87 800 hospitalisations pour COVID-19 (134 pour 100 000), 
  • du 15 février au 15 juillet 2020 : 15 660 décès en lien avec la COVID-19, survenus à l'hôpital (24 pour 100 000).
Les auteurs de l'étude ont utilisé des modèles de Cox à risques proportionnels pour estimer les associations entre chaque comorbidité et le risque d'hospitalisation ou de décès pour COVID-19. 
Ces associations ont été réalisées avec ajustement sur l'âge et le sexe dans un premier temps, puis avec ajustement multivarié incluant toutes les variables (hasards ratios ajustés HRa).
 
L'âge, définitivement facteur de risque de COVID-19 grave
L'étude confirme que l'âge est un facteur de risque majeur de COVID-19 grave ou de décès liés à cette maladie. 
Elle montre également que le risque d'évolution défavorable de l'infection augmente de façon exponentielle avec l'âge. 

Ainsi, en comparaison avec la population des 40-44 ans, le risque d'hospitalisation pour COVID-19 est :
  • doublé chez les 60-64 ans (HR* 2,29 ; IC95 % 2,20 - 2,39), 
  • triplé chez les 70-74 ans (HR 2,99 ; IC95 % 2,88 - 3,12), 
  • multiplié par 6 chez les 80-84 ans (HR 6,01 ; IC95 % 5,77 - 6,25), 
  • multiplié par 12 chez les 90 ans et plus (HR 12,21 ; IC95 % 11,73 - 12,71). 

* hazard ratio ou rapport de risque

Toujours en comparaison avec la population des 40-44 ans, le risque de décès est pour sa part (cf. Figure 1) : 
  • multiplié par 12 chez les 60-64 ans (HR 12,60 ; IC95 % 9,62 - 16,51), 
  • multiplié par 30 chez les 70-74 ans (HR 32,77 ; IC95 % 25,16 - 42,67), 
  • multiplié par 100 chez les 80-84 ans (HR 106,43 ; IC95 % 81,87 - 138,36), 
  • multiplié par presque 300 chez les 90 ans et plus (HR 280,42 ; IC95 % 215,83 - 364,34).

Figure 1 Estimations des risques relatifs de décès pour COVID-19 en milieu hospitalier à partir d'un modèle de Cox avec ajustement multivarié (pour des raisons d'échelle, les variables sociodémographiques (à l'exception de la région non représentée) sont présentées sur un graphique séparé). Échelle logarithmique.


Les hommes plus vulnérables au COVID-19 que les femmes
Autre facteur de risque confirmé par cette étude, le sexe. 
En comparaison aux femmes, le risque associé à la COVID-19 chez les hommes est multiplié par : 
  • 1,4 pour le risque d'hospitalisation, 
  • 2,1 pour le risque de décès. 

Pour expliquer ce phénomène, deux hypothèses sont avancées : 
  • un rôle protecteur du chromosome X et des hormones sexuelles chez la femme face au COVID-19, par participation à l'immunité innée et adaptative (Zheng et al) ;
  • une différence de comportement et de respect des gestes barrières, marquée notamment par une prise de risque de contamination ou un risque de développer des comorbidités plus élevé chez les hommes.

Le tabagisme : un facteur de risque accru de décès lié à la COVID-19, mais pas d'hospitalisation
L'étude du GIS Epi-Phare suggère un lien entre tabagisme et décès associé à la COVID-19 en milieu hospitalier (HRa* 1,10 ; IC95 % 1,01- 1,18). 
En revanche, le tabagisme est négativement associé au risque d'hospitalisation pour COVID-19 (HRa 0,86 ; IC95 % 0,84-0,89).

*hazard ratio ajusté

Pathologies chroniques et COVID-19 grave : la quasi-totalité des affections augmente le risque, à l'exception de la dyslipidémie
Très attendue, l'analyse du lien entre pathologie ou état de santé et sévérité de la COVID-19 suggère que la quasi-totalité des affections chroniques (47 pathologies étudiées dans l'étude du GIS Epi-Phare) est associée à des risques accrus d'hospitalisation et de décès pour COVID-19. Seule exception rapportée, la dyslipidémie est négativement associée à un risque d'hospitalisation ou de décès (HRa 0,84; IC95 % 0,81-0,88).

Vulnérabilité accrue pour 7 pathologies  
Les associations positives les plus fortes avec le risque d'hospitalisation pour COVID-19 et le risque de décès ont été retrouvées pour les 7 pathologies et états de santé suivants :
  • trisomie 21 : risque d'hospitalisation multiplié par 7, risque de décès multiplié par 23 (HRa 7,03 ; IC95 % 6,13-8,07), 
  • retard mental : risque d'hospitalisation multiplié par 4, risque de décès multiplié par 7 (HRa 3,83 ; IC95 % 3,52-4,16), 
  • mucoviscidose : risque d'hospitalisation multiplié par 4, risque de décès multiplié par 6 (HRa 3,74 ; IC95 % 2,62-5,34), 
  • transplantation pulmonaire : risque d'hospitalisation multiplié par 3, risque de décès multiplié par 6 (HRa 3,53 ; IC95 % 2,35-5,29), 
  • transplantation rénale : risque d'hospitalisation multiplié par 5, risque de décès multiplié par 7 (HRa 4,55 ; IC95 % 4,18-4,95), 
  • insuffisance rénale chronique terminale en dialyse : risque d'hospitalisation multiplié par 4, risque de décès multiplié par 5 (HRa 4,16 ; IC95 % 3,92-4,42),
  • cancer du poumon actif : risque d'hospitalisation multiplié par 3, risque de décès multiplié par 4 (HRa 2,60 ; IC95 % 2,40-2,81). 

Pour 6 de ces 7 pathologies, le risque absolu de décès hospitalier dépassait 300 pour 100 000 : 
  • insuffisance rénale chronique terminale traitée par dialyse : 745 pour 100 000, 
  • démence (incluant la maladie d'Alzheimer) : 462 pour 100 000, 
  • transplantation du poumon : 446 pour 100 000, 
  • insuffisance cardiaque : 376 pour 100 000, 
  • cancer actif du poumon : 334 pour 100 000,
  • transplantation rénale : 322 pour 100 000.

Enfin, l'étude de cohorte permet d'estimer un sur-risque d'hospitalisation pour COVID-19 pour les pathologies suivantes : 
  • diabète (HRa 1,64 ; IC95 % 1,61-1,67), 
  • obésité (HRa 1,63 ; IC95 % 1,57-1,70), 
  • hypertension (HRa 1,17 ; IC95 % 1,15-1,19), 
  • maladies cardiovasculaires (HRa le plus élevé pour l'insuffisance cardiaque avec HRa 1,44 ; IC95 % 1,40-1,48), 
  • maladies respiratoires chroniques (HRa 1,56 ; IC95 % 1,53-1,59), 
  • cancers actifs,
  • maladies neurodégénératives.

COVID-19 et critère social : un lien entre formes graves et indice de défavorisation 
Outre l'aspect médical et physiologique, les auteurs ont analysé l'impact du niveau de vie sur l'évolution de l'infection. Ils ont identifié un sur-risque de COVID-19 grave chez les patients les plus défavorisés socialement (cf. Encadré 2).
Ce lien est particulièrement fort chez les personnes de moins de 80 ans, marqué par un risque de décès multiplié par 2 chez les plus défavorisés par rapport aux plus favorisés.
 
Encadré 2 - Facteurs sociaux de défavorisation
  • Logement
  • Nombre de membres du foyer familial
  • Transport
  • Profession 

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