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COVID-19 et consommation de médicaments : de profondes modifications, dont certaines perdurent en post-confinement

L'ANSM* et l'Assurance maladie publie un nouveau bilan EPI-PHARE sur l'usage des médicaments de ville en France : cette troisième étude fait le point sur les données de dispensation des médicaments remboursables pendant les 8 semaines de confinement et la première semaine post-confinement (semaine 20). Pour la première fois, l'analyse a été réalisée à partir des données du SNDS (système national des données de santé) enregistrées au-delà du confinement, jusqu'à 17 mai 2020.

Sur cette période, les constats les plus marquants sont en comparaison au nombre attendu estimé en 2018 et en 2019 :
  • une forte baisse des instaurations de traitements chez des nouveaux patients notamment pour les antihypertenseurs (- 39 %), les antidiabétiques (- 48,5 %) et les statines (- 49 %) ;
  • la persistance d'une forte diminution de la délivrance de produits nécessitant une administration par un professionnel de santé (vaccins, produits destinés aux actes diagnostiques médicaux, etc.) ;
  • un effondrement de l'utilisation des antibiotiques (- 30 à - 40 %), en particulier chez les enfants, en lien probablement avec la fermeture des crèches et des établissements scolaires, puis leur réouverture partielle.

Enfin, cette étude actualisée montrent une augmentation de la dispensation des hypnotiques et à un degré moindre des anxiolytiques en fin de confinement et lors de la première semaine post-confinement (+ 6,9 % et + 1,2 % respectivement), qui pourrait s'expliquer par les troubles du sommeil et l'anxiété générés par le confinement, mais aussi le déconfinement. 

*Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé
David Paitraud 16 juin 2020 Image d'une montre5 minutes icon Ajouter un commentaire
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L’épidémie de COVID-19 a profondément et durablement déstabilisé la consommation de médicaments de ville en France (illustration).

L’épidémie de COVID-19 a profondément et durablement déstabilisé la consommation de médicaments de ville en France (illustration).


L'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) et l'Assurance maladie ont publié la troisième étude pharmaco-épidémiologique du groupement d'intérêt scientifique (GIS) EPI-PHARE relative à l'usage des médicaments de ville remboursables pendant la pandémie de COVID-19.

Ce nouveau bilan porte sur les données de dispensation enregistrées dans les bases du SNDS (Système national des données de santé) ; les auteurs y analysent plus particulièrement les tendances observées pendant les 8 semaines de confinement (semaines 12 à 19, soit du 16 mars au 10 mai 2020) et la première semaine qui a suivi le déconfinement (semaine 20, du 11 au 17 mai 2020).

Encadré - L'étude EPI-PHARE sur l'usage des médicaments de ville pendant l'épidémie de COVID-19 en quelques chiffres
  • Comparaison du nombre de personnes ayant eu une délivrance de médicaments remboursés en pharmacie depuis mars 2020 au nombre "attendu" estimé sur la base de la même période en 2018 et en 2019.
  • 725 millions d'ordonnances analysées, soit 1,9 milliards de lignes de prescriptions, 
  • 51,6 millions de personnes inclus dans cette étude,
  • 58 classes thérapeutiques analysées.

Ce troisième rapport est le premier à inclure des données enregistrées post-confinement ; il permet d'apporter de nouveaux éléments quant à l'impact de l'épidémie de COVID-19 et des mesures prises pour contenir la circulation virale sur la consommation de médicaments en France, à travers le prisme des données de facturation à l'Assurance maladie.

Les mouvements de dispensation observés entre les semaines 12 à 20 sont résumés dans un tableau complet de 3 pages (pages 12, 13 et 14 du rapport).


Forte baisse des instaurations de traitement pour de nouveaux patients
Pour la première fois, cette étude pharmaco-épidémiologique met en évidence une forte baisse des instaurations de traitements pour de nouveaux patients pendant le confinement, de l'ordre de :
  • - 39 % pour les antihypertenseurs, correspondant à 105 000 personnes n'ayant pas débuté de traitement antihypertenseur, 
  • - 48,5 % pour les antidiabétiques, soit 37 500 diabétiques potentiels non dépistés et non traités. Cette diminution atteint 33 % pour l'insuline (soit environ 10 000 patients) ; 
  • - 49 % pour les statines, soit 70 000 personnes non traitées ; 
  • - 50 % pour les antithrombotiques non anti-agrégants plaquettaires, soit 138 000 personnes non traitées.

Ces résultats traduisent la baisse de l'activité de médecine de ville malgré la mise en place massive des téléconsultations :
  • diminution de l'ordre de 40 % des actes en médecine générale ;
  • diminution de l'ordre de 70 % en médecine de spécialité.

De façon paradoxale, si moins de traitements qu'attendus ont été initiés, les médicaments des principales classes citées affichent tout de même un solde positif en termes de délivrance en pharmacie : 
  • + 600 000 délivrances pour les antihypertenseurs, 
  • + 275 000 pour les satines, 
  • + 135 000 pour les antidiabétiques insuliniques ou oraux. 
Cet effet peut s'expliquer par les mesures prises dès le début du confinement pour permettre le renouvellement des traitements chroniques, même au-delà de l'expiration de l'ordonnance. 

Hypnotiques et les anxiolytiques : rebond post-confinement
Autre élément mis en évidence par ce 3e bilan EPI-PHARE, les classes des hypnotiques et des anxiolytiques voient leur délivrance augmenter en fin de confinement, et au cours de la première semaine de déconfinement.
Pour les hypnotiques, cette augmentation est de : 
  • + 8 % en semaines 17 et 18,
  • + 5 % en semaine 19,
  • + 7 % en semaine 20.
Les hypnotiques correspondent à la classe thérapeutique ayant affiché la plus forte augmentation après la fin du confinement, en comparaison aux 56 autres classes thérapeutiques étudiées (pas uniquement dans le domaine psychiatrique). 

Ils sont suivis par les anxiolytiques, pour lesquels on note une hausse des dispensations de 1,2 % la première semaine post-confinement. 


Ces données concernant les hypnotiques et les anxiolytiques sont cohérentes avec les observations cliniques rapportées par diverses études, montrant une augmentation des troubles du sommeil et de l'anxiété pendant le confinement.

Le rebond de dispensation des hypnotiques et des anxiolytiques peut, là encore, être mis en parallèle avec une baisse significative des instaurations de ces traitements par rapport à l'attendu, mais dans des proportions moindres que la baisse des instaurations observées avec d'autres classes thérapeutiques : 
  • - 14 % pour les hypnotiques (soit - 50 000 personnes). Cette baisse d'instauration a duré moins longtemps que celle observée pour les autres classes, puisqu'une reprise des nouveaux traitements par hypnotiques a été observée à partir de la quatrième semaine de confinement ;
  • - 14 % pour les anxiolytiques (soit - 95 000 personnes). 

Confirmation des observations rapportées par les 2 premiers bilans
Enfin, cette troisième étude confirme les données de dispensation de médicaments rapportées lors de la première et de la seconde étude EPI-PHARE (cf. nos articles du 22 avril 2020 et du 6 mai 2020) : 
  • très forte diminution de la délivrance de produits nécessitant une administration par un professionnel de santé. Cette diminution persiste en semaine 20, c'est-à-dire au cours de la première semaine post-confinement. Elle concerne notamment : 
    • les vaccins : - 6 % pour les vaccins penta/hexavalents des nourrissons, - 43 % pour les vaccins anti-HPV, - 16 % pour le ROR et - 48 % pour les vaccins antitétaniques la dernière semaine du confinement, malgré les nombreuses communications de sensibilisation à maintenir le calendrier vaccinal chez les enfants ;
    • les produits destinés aux actes diagnostiques médicaux tels que coloscopies (- 62 %), scanners (- 38 %) et IRM (- 44 %), avec comme conséquence redoutée des retards de prise en charge ;
    • les médicaments anti-VEGF pour traiter la DMLA (dégénérescence musculaire liée à l'âge) et l'œdème maculaire diabétique (- 22 % en post-confinement) ;
  • l'effondrement de l'utilisation des antibiotiques systémiques généraux : - 30 à - 40 %, en particulier chez les enfants (- 765 000 traitements antibiotiques durant le confinement chez les 0 à 19 ans par rapport à l'attendu). L'ANSM indique que ces constats peuvent s'expliquer "par un effet de l'arrêt de la circulation de tous les virus (hors SARS-CoV-2) et autres agents infectieux avec la fermeture des crèches et des établissements scolaires durant le confinement et leur réouverture partielle la première semaine post-confinement".

Pour aller plus loin
Point d'information - Usage des médicaments de ville en France durant l'épidémie de COVID-19 : point de situation à la fin du confinement - Point d'Information (ANSM, 12 juin 2020)
Rapport - Usage des médicaments de ville en France durant l'épidémie de la COVID-19 – point de situation après les 8 semaines de confinement et une semaine de post-confinement (jusqu'au 17 mai 2020) (sur le site de l'ANSM, 9 juin 2020)

 

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