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Atteintes cardiaques et COVID-19 : plusieurs mécanismes en jeu

Les atteintes cardiaques liées à la COVID-19 sont très variées et d'évolution plus sévère. L'élévation de la troponine, quelle qu'en soit l'origine, est un marqueur de mauvais pronostic, comme celle des D-dimères et du fibrinogène. L'épidémie est indirectement responsable d'infarctus compliqués, vus tardivement et, potentiellement, d'une augmentation des morts subites extrahospitalières, tandis que l'infection peut se compliquer à distance de myocardites post-infectieuses sévères nécessitant des soins de réanimation. 
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De multiples mécanismes en jeu dans les atteintes cardiaques de la COVID-19 (illustration).

De multiples mécanismes en jeu dans les atteintes cardiaques de la COVID-19 (illustration).


Plusieurs mécanismes sont avancés pour expliquer les atteintes cardiaques observées lors de la COVID-19 :
  • une action vasculaire directe du SARS-CoV-2, qui expliquerait notamment les infarctus du myocarde ;
  • l'inflammation, parfois très marquée, et on sait aujourd'hui que l'augmentation de deux marqueurs, le fibrinogène et les D-dimères, témoigne d'un risque accru de complications thrombotiques veineuses et artérielles ;
  • la stimulation sympathique, avec une augmentation de la demande en oxygène, ce qui participe aussi à la survenue d'infarctus et d'insuffisance cardiaque ;
  • l'hypoxie, très marquée chez les patients ayant une atteinte respiratoire sévère et qui, chez les sujets coronariens ou insuffisants cardiaques, est très mal tolérée et peut précipiter l'évolution.

Élévation de la troponine de causes très variées
"L'effet direct du virus sur les cellules myocardiques n'est pas prouvé", rappelle le Pr Gilles Montalescot, qui dirige le département de cardiologie au sein de l'hôpital Pitié-Salpêtrière à Paris. "Mais la COVID-19 s'accompagne fréquemment d'une augmentation des taux de troponine, qui est un facteur de mauvais pronostic quelle qu'en soit la cause sous-jacente". Dans le cadre de la COVID-19, l'élévation de la troponine, parfois extrêmement marquée, s'observe souvent en dehors de toute atteinte coronaire et témoigne d'une souffrance myocardique d'origine extra-coronaire, telle qu'une myocardite, dont le diagnostic est porté à l'IRM, une hyperactivation sympathique, un sepsis, une embolie pulmonaire, une insuffisance cardiaque, etc. On observe aussi des myocardites septiques virales, comme cela est également le cas au cours de la grippe.
"Toutes ces situations, infarctus du myocarde, insuffisance cardiaque, myocardite, sont associées à des troubles du rythme qui peuvent entraîner des complications, en particulier des arrêts cardiaques", souligne le Pr Montalescot.
Les complications thrombotiques sont, elles aussi, fréquentes : coagulopathie intravasculaire et embolie pulmonaire, dont la prévalence en angioscanner est de 20 à 30 % chez les patients hospitalisés.
 
Les effets collatéraux de la pandémie
Dans tous les pays, au cours des premières semaines du confinement, une diminution des consultations pour infarctus du myocarde (IDM) et accidents vasculaires cérébraux, de l'ordre de 30 à 40 %, a été constatée. Plusieurs hypothèses ont été proposées pour expliquer ce phénomène, telle que la réduction des activités physiques, du stress ou encore de la pollution. Pour le Pr Gilles Montalescot, il est peu probable que la diminution de la pollution pendant seulement quelques semaines puisse expliquer une baisse aussi franche des IDM. Cette dernière découlerait plutôt de la saturation des services d'appel et des urgences, fortement sollicités par l'épidémie de COVID-19, et de la crainte de consulter, les patients ayant alors préféré rester chez eux plutôt que d'appeler le 15 ou aller à l'hôpital.
Ce moindre recours aux systèmes d'urgence pourrait aussi expliquer l'augmentation des morts subites extrahospitalières, rapportée par plusieurs équipes, notamment en Lombardie en Italie, et dans la ville de New York aux États-Unis.

Des syndromes post-infectieux chez des patients jeunes
"Dans une première phase, nous avons reçu beaucoup de patients ayant des comorbidités cardiovasculaires en décompensation, et pour lesquels des soins cardiologiques appropriés ont permis une évolution favorable", rapporte le Pr Gilles Montalescot. "Désormais, nous voyons des infarctus avec des complications mécaniques, car pris en charge tardivement, mais aussi des malades beaucoup plus jeunes avec des myocardites survenant dans le cadre d'un syndrome post-infectieux pouvant être sévère et nécessiter des soins lourds, tels que la pose d'ECMO [extracorporeal membrane oxygenation]" : un tableau qui s'apparente à celui rapporté en pédiatrie, en l'occurrence des syndromes "Kawasaki like". La vigilance s'impose donc et il est important d'avoir en tête cette possibilité de syndrome post-infectieux grave, survenant plusieurs semaines après une infection COVID-19.

L'autodéclaration des cas symptomatiques, un enjeu majeur
Pour le Pr Montalescot, en l'absence de traitement préventif des complications et d'un vaccin, nous devons apprendre à vivre avec ce virus. "Au-delà de l'accent mis sur les gestes barrières, comme le lavage soigneux des mains et le port d'un masque, il faut insister sur la nécessité de l'autodéclaration dès qu'une personne présente des symptômes compatibles, afin de pouvoir déclencher l'isolement et éviter les clusters. On peut craindre que certaines personnes négligent de déclarer des symptômes, surtout les jeunes, notamment les mineurs, au risque de contaminer leur entourage familial ou professionnel. C'est une réaction habituelle et humaine de minimiser ou de négliger des symptômes, mais dans le cadre de la COVID-19, les conséquences concernent potentiellement tout un groupe de personnes".
La dernière lettre hebdomadaire d'information du fonds de dotation ACTION (groupe de recherche académique indépendant basé à la Pitié-Salpêtrière), adressée aux patients cardiaques et à leurs proches, rappelle l'importance de l'autodéclaration et du dispositif COVISAN. Ce dispositif, mis en place par l'AP-HP avec l'aide de nombreux partenaires, vise à casser les chaînes de transmission, en identifiant et en accompagnant dans une démarche de prévention les sujets COVID-19 + non hospitalisés. 
 
©vidal.fr

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Sources

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