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Douleurs neuropathiques : la toxine botulique pourrait devenir un traitement de recours, selon l'INSERM

Les douleurs neuropathiques (liées à une atteinte d'un ou plusieurs nerfs) sont difficiles, parfois impossibles à soulager. 

Or depuis plusieurs années, des expérimentations chez l'animal et l'adulte ont suggéré un effet antalgique de la toxine botulique (ou botulinique) A, indépendamment de son effet figeant sur les muscles. 

Afin d'évaluer rigoureusement cette éventuelle efficacité chez des personnes souffrant de douleurs neuropathiques, une équipe de l’INSERM a réalisé un étude multicentrique, randomisée, en double aveugle contre placebo.

Les résultats de cette étude, publiée dans le Lancet fin février 2016,montrent une efficacité, certes modérée, d’injections  de toxine botulique de type A dans le soulagement des douleurs neuropathiques périphériques localisées.

Cette alternative thérapeutique, prometteuse, pourrait trouver sa place comme adjuvant des traitements centraux habituellement prescrits dans cette indication. Ces traitements (antidépresseurs et antiépileptiques) ont, contrairement à la toxine botulique, également un effet sur la dimension psychique de la neuropathie, mais au prix de possibles effets indésirables souvent invalidants.
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La toxine botulinique semble soulager les douleurs neuropathiques localisées

La toxine botulinique semble soulager les douleurs neuropathiques localisées


Les douleurs neuropathiques, seulement partiellement soulagées par les traitements traditionnels
Qu'elles soient liées au diabète, à des traitements médicamenteux, à un traumatisme ou à une maladie neurologique, les douleurs neuropathiques périphériques nuisent sévèrement à la qualité de vie de ceux qui en souffrent.

Douleurs d'écrasement, sensations de décharges électriques, pertes de sensibilité, fourmillements et picotements, elles ont, comme toute douleur chronique, un impact psychologique important.

Lorsqu'elles touchent les jambes et les pieds, elles peuvent aussi affecter l'autonomie de la personne.

Les traitements traditionnellement prescrits pour soulager ces douleurs (antidépresseurs tricycliques, anesthésiques locaux de type lidocaïne ou capsaïcine, antiépileptiques, par exemple) n'ont qu'une efficacité relative au prix d'effets indésirables parfois lourds.

La récupération spontanée est parfois possible mais toujours lente.
 
La toxine botulique de type A, une piste déjà envisagée pour soulager les douleurs neuropathiques
Récemment, des méta-analyses et des données anecdotiques (voir, par exemple, Lakhan SE et al., 2015, Oh HM et al., 2015 ou Moon YE et al., 2016) ont suggéré que la toxine botulique de type A pourrait apporter un bénéfice aux patients atteints de douleurs neuropathiques.

La quantité totale de toxine botulique pouvant être injectée étant limitée par sa toxicité, seules les neuropathies localisées sont concernées.

En effet, injectée à proximité d'un trajet nerveux sensitif, la toxine botulique de type A agit en bloquant l'influx, à la manière d'un anesthésique local mais de manière durable. Les mécanismes de cette action sont encore mal élucidés, les effets connus de la toxine étant plutôt décrits au niveau de la jonction neuromusculaire (blocage de la libération d'acétylcholine).

Ces études prélimonaires ont été menées sur des douleurs neuropathiques d'origine diverses : douleurs post-herpétiques ou diabétiques, névralgie du trijumeau, neuropathies post-traumatiques, etc.
 
L'INSERM réalise la première étude randomisée contre placebo de la toxine botulique dans cette indication
Dans l'étude publiée dans The Lancet Neurology, l'équipe de Nadine Attal, INSERM U-987, a conduit une étude randomisée tricentrique en double aveugle au cours de laquelle ces chercheurs ont comparé l'effet de 2 injections sous-cutanées de toxine botulique à celui obtenu avec 2 injections de placebo (sérum physiologique).

Les deux injections ont été réalisées à trois mois d'intervalle, chez 68 patients atteints de douleurs neuropathiques quotidiennes depuis au moins 6 mois (18 à 85 ans). Ces patients ont continué en parallèle leur traitement habituel.

Une diminution modeste, mais significative de la douleur sous toxine botulique
Après 24 semaines de suivi, sur une échelle numérique de 0 à 10, l'évaluation de la douleur passait de 6,5 à 4,6 en moyenne dans le groupe Toxine botulique, contre 6,4 à 5,8 dans le groupe Placebo, différence statistiquement significative.

Par ailleurs, les personnes ayant répondu significativement à la première séance d'injection étaient davantage soulagées après la seconde séance, ce qui est prometteur pour un éventuel traitement au long cours.

L'effet indésirable principalement observé était une vive douleur lors de l'injection de la toxine botulique ou du placebo (chez 56 % des patients dans le groupe Toxine et 53 % des patients dans le groupe Placebo).
 
La toxine botulique est plus efficace chez certains patients
Cette étude a également permis de "mieux cerner le profil des patients" pour lesquels la toxine botulique possède davantage de chances de succès, précise Nadine Attal.

En effet, les auteurs ont constaté que l'efficacité de la toxine était d'autant plus élevée que les patients présentaient une bonne sensibilité à la chaleur au niveau de la zone concernée, ainsi qu'une douleur facilement provoquée par un contact ou un effleurement simple (allodynie).

Eu égard à l'effectif modeste de cette première étude, des études complémentaires seront nécessaires pour confirmer que la préservation d'un certain degré de nociception est un marqueur d'une meilleure efficacité potentielle de la toxine.
 
Un traitement à proposer en échec thérapeutique ou en adjuvant des traitements autorisés ?
La toxine botulique de type A n'a pas d'autorisation de mise sur le marché dans les douleurs neuropathiques. Pour Nadine Attal, "ce traitement ne pourra [donc] être proposé qu'en cas d'échec des traitements conventionnels car les injections doivent être réalisées à l'hôpital et sont souvent douloureuses".

Un traitement adjuvant plutôt qu'un traitement de remplacement
Les auteurs notent que la toxine botulique n'exerce qu'une action locale et qu'à la différence des antidépresseurs ou antiépileptiques prescrits contre les douleurs neuropathiques, elle n'a pas d'effet sur la qualité du sommeil et les symptômes anxieux qui sont fréquemment observés chez les patients neuropathiques.

En conséquence, les auteurs suggèrent que la toxine botulique soit plutôt considérée comme un traitement adjuvant aux psychotropes.
 
Pour aller plus loin
 
L'étude de l'INSERM publiée dans The Lancet Neurology
Attal N et al. « Safety and efficacy of repeated injections of botulinum toxin A in peripheral neuropathic pain (BOTNEP): a randomised, double-blind, placebo-controlled trial. » The Lancet Neurology, publié en ligne le 29 février 2016.
Le communiqué de presse de l'INSERM à propos de cette étude, 31 mars 2016
 
Les méta-analyses et études suggérant l'intérêt de la toxine botulique dans les douleurs neuropathiques

Lakhan SE et al. « Botulinum Toxin-A for Painful Diabetic Neuropathy: A Meta-Analysis. » Pain Med. 2015 Sep;16(9):1773-80.
 
Oh HM et Chung ME. « Botulinum Toxin for Neuropathic Pain: A Review of the Literature. » Toxins, 2015 Aug 14;7(8):3127-54.
 
Moon YE et al. « Ultrasound-Guided Nerve Block with Botulinum Toxin Type A for Intractable Neuropathic Pain. » Toxins, 2016, 8(18).

Sur VIDAL.fr : 
VIDAL Reco "Douleur de l'adulte"
Douleurs neuropathiques : hausse importante de l'effet placebo dans les essais cliniques américains (novembre 2015)
Retraits, limitations, innovations… Quelle antalgie en 2015 ? Interview du Pr Alain Serrie (1ère partie) (juillet 2015)
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Sources

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