#Socio-professionnel

Corps médical et souffrances de la société, patients difficiles… Que peut faire l’Ordre ? ITW du Dr Jacques Lucas

Le corps médical est confronté à l'évolution actuelle de la société française, avide de résultats instantanés, de scandales, etc. Les médecins sont également régulièrement mis en cause dans les médias, parfois directement par des élus politiques, en raison de la surprescription de telle ou telle molécule, du refus de la généralisation du tiers payant, etc. 

Que fait l'Ordre des médecins face à ces évolutions et contre ces attaques ? Au-delà, y-a-t-il une véritable souffrance généralisée des médecins libéraux français ? 

Les réponses du Dr Jacques Lucas, cardiologue libéral et vice-président du Conseil national de l’Ordre des médecins.

Vous pouvez accéder, via cette page de Vidal.fr, aux 4 autres vidéos issues de notre entretien avec Jacques Lucas.
18 juillet 2014 Image d'une montre5 minutes icon Ajouter un commentaire
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VIDAL : Le corps médical est-il touché par le pessimisme actuel de la société française ?
Jacques Lucas : La société d'aujourd'hui, et par conséquent celle des médecins, qui sont comme des poissons dans la société puisqu'ils en connaissent bien les souffrances, est en pleine mutation. Je la comparerais, sur le plan historique et avec toutes les réserves qui s'imposent, avec l'époque de la Renaissance, c'est-à-dire qu'elle part dans tous les sens : les anciens modèles ne sont plus reconnus, bien que cela ne signifie pas qu'il y ait une perte des valeurs.
 

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Cependant, si le corps médical paraît aujourd'hui en souffrance, ou quelque peu en mal de repères, il est très difficile de parler d'une manière totalisante du corps médical : il vaudrait peut-être mieux dire que les médecins qui sont aujourd'hui en pleine activité ou plutôt vers la fin de leur activité professionnelle, ont l'impression que tout s'écroule. Donc ils nous expriment effectivement cette souffrance et l'Ordre a donc commencé à accompagner cette situation.
 
VIDAL :
Quelle est la ligne directrice de cet accompagnement des médecins par l'Ordre ?
Jacques Lucas : Je vais encore prendre un exemple ou une situation historique… Non pas pour dire "attention, nous allons tout faire pour rapatrier les cendres de Charles X en France" [NDLR : ces cendres sont actuellement en Slovénie. Les Royalistes français réclament leur retour à la basilique Saint-Denis], mais pour dire plutôt que nous accompagnons les évolutions positives pour le corps professionnel et évidemment pour la société. L'émergence de nouveaux modèles, en particulier ceux qui profitent des apports du numérique, peut être utile à la qualité humaine de la relation patient-médecin, ainsi qu'à la qualité de l'exercice professionnel.
 
J'ai parfaitement conscience qu'en disant cela, un certain nombre de confrères peuvent se dire "mais où allons-nous ?". Nous en avons pourtant une perspective assez claire, qui commence à se dégager. Ils peuvent aussi se dire "mais que fait l'Ordre ?" L'Ordre préserve les valeurs de l'humanisme médical dans la relation patient-médecin, ce qui préserve également les valeurs de la compétence des médecins. Et cette compétence des médecins n'est pas remise en cause, même si quelques expressions, parfois pour le moins maladroites du corps politique, peuvent le laisser penser. De même, la mise en cause de médecins par certains médias, classiques et sociaux, pourrait laisser penser le contraire. Mais nous avons beaucoup trop tendance à penser qu'une expression singulière, via les médias ou à travers telle ou telle personnalité politique, représente un jugement de portée générale. Ce n'est pas le cas, et il faut bien que mes confrères en aient parfaitement conscience.
 
VIDAL : Les médias relaient effectivement régulièrement des attaques de certains politiques contre les médecins. Pourquoi n'entend-on pas l'Ordre les défendre ?
Jacques Lucas : Lorsqu'une parole ou une décision politique paraît inadaptée, il faut convaincre le politique ou la parole politique en question qu'elle est inadaptée. C'est ce que l'Ordre fait, mais ce n'est pas nécessairement en allant le clamer sur tous les toits, les parvis et les places publiques que les choses avancent… Donc il ne faut pas croire, et la profession ne doit pas le croire, que lorsque l'Ordre reste muet sur un certain nombre de sujets, ça n'est pas pour autant qu'il n'agit pas. La meilleure façon d'agir n'est pas nécessairement d'en rajouter encore à l'inquiétude du corps professionnel en nous exprimant éventuellement de façon démagogique, sans avoir analysé les tenants et les aboutissants d'une situation… Parfois il faut agir de façon un peu plus nuancée que l'opinion immédiate du corps médical.
 
VIDAL : D'autres expressions singulières, celles de patients vindicatifs, ou se croyant surinformés, peuvent perturber les médecins d'aujourd'hui. Comment réagir ? 
Jacques Lucas : J'invite mes confrères à tenter d'oublier, comme je le fais moi-même, un patient revendiquant qui leur a "pourri leur journée"… Sur le moment, il ne faut pas réagir de manière impulsive, mais analyser plutôt, à distance, les raisons de l'installation d'un climat d'incompréhension, qui peut être lié à une exigence du patient dans une situation particulière. Au-delà de cette situation particulière, il faut que les médecins se concentrent sur l'immense majorité de leurs patients, qui manifestent envers eux une confiance qui n'est peut-être plus la confiance aveugle d'antan, mais qui reste une confiance très forte [NDLR : 86 % des Français font confiance aux médecins, voir notre article]. Dans une journée, lorsqu'un médecin généraliste a vu en moyenne une trentaine de patients, je pense qu'il y en a 29 qui n'ont posé aucun problème. Certes, il y en a un ou une qui a véritablement abîmé cette belle journée par son caractère revendicatif, son exigence, son incompréhension ou par sa structure psychologique. Mais une hirondelle ne fait pas le printemps, et un corbeau non plus.
 
VIDAL : Vous rencontrez tout de même des médecins heureux ?
Jacques Lucas : J'ai rencontré, et je rencontre toujours beaucoup, de nombreux médecins heureux du métier qu'ils font. Je ne néglige pas le fait qu'il y ait des souffrances, mais ces médecins, bien qu'ils ne soient pas naïfs (des "Bisounours"), sont heureux du métier qu'ils font. Ils râlent un peu, parce que le corps professionnel est un peu râleur… tout comme les Français. Mais ils sont très heureux du métier qu'ils font. Je constate par ailleurs que se pressent tous les ans, aux portes des facultés, un très grand nombre d'étudiants qui veulent faire médecine : c'est quand même qu'ils ont une véritable envie de faire ce métier.
 
Propos recueillis le 18 juillet 2014 au siège du Conseil national de l'Ordre des médecins (Paris).

En savoir plus : 
Sécurité des médecins : une augmentation préoccupante des violences en 2013, Conseil de l'Ordre des médecins, avril 2014

Sur VIDAL.fr : 
Confiance des Français dans les acteurs de la société : les infirmiers et les médecins plébiscités (mai 2013)
 
Sources

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