Objectifs fixés par ONUSIDA
Dans le cadre de la lutte contre l'épidémie du VIH, l'ONUSIDA a fixé d'ici 2020 les objectifs 90-90-90, à savoir 90 % des PVVIH diagnostiquées, 90 % des personnes diagnostiquées sous traitement antirétroviral et 90 % des personnes sous traitement antirétroviral avec une charge virale contrôlée.
Surveillance du traitement
Une consultation précoce 8 à 15 jours après l'initiation du traitement est systématique pour vérifier la tolérance, la bonne compréhension du schéma thérapeutique, renouveler les conseils et détecter les difficultés d'observance. La fréquence des consultations ultérieures est fonction de l'état clinique du patient et des difficultés qu'il rencontre avec le traitement (effets indésirables, observance). Il est recommandé de proposer une consultation à 1 mois, puis tous les 3 mois la 1re année, puis, en cas de succès virologique et de bonne tolérance, 3 à 4 fois par an, voire semestriellement si les CD4 > 500/mm3, consultations intercalées avec un bilan annuel de synthèse hospitalière. Ce suivi peut être alterné entre médecin traitant et médecin hospitalier. Des consultations d'observance et d'éducation thérapeutique doivent être systématiquement mises en place et poursuivies en fonction des résultats viro-immunologiques.
L'examen clinique comprend : pesée, mesure de la pression artérielle, recherche de troubles digestifs (surtout avec les inhibiteurs de protéase et possible avec l'elvitégravir).
La surveillance biologique comprend : NFS, transaminases, gamma-GT, avec une vigilance particulière en cas de co-infection VHB et/ou VHC, CPK, bilan lipidique (cholestérol total, HDL-cholestérol et LDL-cholestérol, triglycérides) et glycémie à jeun. La créatinine et la protéinurie doivent être tout particulièrement surveillées en cas de traitement par ténofovir. La surveillance virologique (dosage de la CV) et immunologique
(dosage des CD4) doit être réalisée tous les mois puis tous les 3 mois. L'absence d'indétectabilité à 6 mois lors d'un 1er traitement antirétroviral témoigne presque toujours d'une mauvaise observance, parfois d'interactions médicamenteuses, rarement d'un sous-dosage, qui doivent être recherchés et corrigés sans délai.
Au-delà d'un an de traitement pour les patients ayant une CV indétectable, un contrôle des CD4 et de la CV sera réalisé tous les 3 à 4 mois si CD4 < 500/mm3 et tous les 5 à 6 mois si CD4 > 500/mm3.
Les concentrations résiduelles plasmatiques des IP et/ou des INNTI sont mesurées et les résultats interprétés par une équipe pluridisciplinaire associant au moins cliniciens, virologues et pharmaciens, dans les cas suivants : en cas d'échec
Grade A, d'interactions médicamenteuses
Grade B, d'
insuffisance hépatique ou de
co-infection par le VHC ou VHBGrade B, chez l'
enfantGrade B et la
femme enceinteGrade C.
Chez les patients ayant des CD4 < 100/mm3, un fond d'œil et une recherche des marqueurs de réplication du CMV (anti-génémie pp65, virémie CMV) sont recommandés tous les 3 mois.
Le traitement doit être modifié en cas de survenue d'effets indésirables graves (hypersensibilité, insuffisance rénale) ou d'effets indésirables pouvant à terme entraîner une gêne significative pour le patient ou une mauvaise observance (troubles digestifs, troubles du sommeil, dépression, dyslipidémie, événement cardiovasculaire).
Des effets neuropsychiatriques sont rapportés avec les 3 inhibiteurs d'intégrase avec une fréquence > 10 % : céphalées, insomnie, vertiges, rêves anormaux, et plus rarement troubles de l'humeur, anxiété, voire idées ou comportements suicidaires, ce qui doit conduire à les utiliser avec prudence en cas d'antécédent de dépression ou de maladie psychiatrique. Ces effets sont associés à des arrêts plus fréquents de traitement pour le dolutégravir dans des études rétrospectives.
En cas d'atteinte hépatique persistante apparaissant sous traitement antirétroviral, notamment devant une élévation des transaminases, il faut :
rechercher et prendre en charge d'autres facteurs de toxicité hépatique (notamment alcool, co-infections virales, médicaments, syndrome métabolique, prise de poids)
Grade B ;
s'assurer de l'absence de surdosage des antirétroviraux potentiellement responsables d'une toxicité directe
Grade B ;
envisager une modification du traitement antirétroviral, en arrêtant si possible les antirétroviraux incriminés, et en les remplaçant par des antirétroviraux moins toxiques (raltégravir, dolutégravir, rilpivirine, étravirine, maraviroc), a fortiori en présence d'une insulino-résistance, de troubles lipidiques ou d'une stéatose hépatique.
En cas d'échec virologique (lié essentiellement à des problèmes d'observance et de pharmacocinétique), le traitement doit être modifié rapidement, en se basant sur les données du test génotypique de résistance (étudiant les gènes de la transcriptase inverse, protéase et intégrase), en s'assurant que le patient était sous traitement antirétroviral au moment du prélèvement.
Grade A Le choix du traitement de relais doit être réalisé le plus souvent possible lors d'une réunion de concertation multidisciplinaire associant cliniciens, virologues et pharmacologues.
Chez les patients en succès virologique depuis plus de 6 mois par le traitement initial (2 INTI + 1 IP/r ou 2 INTI + 1 INNTI), une optimisation du traitement peut être proposée dans le but d'améliorer sa qualité de vie, de diminuer la toxicité potentielle au long cours d'une molécule (IP) et de favoriser l'observance sur le long terme, par exemple par une combinaison fixe en une prise par jour.
Une synthèse au moins annuelle avec un médecin hospitalier spécialiste est indispensable, au cours de laquelle seront réalisées : une analyse critique du traitement en cours, de ses effets indésirables et de ses résultats avec modification éventuelle, un bilan des hépatites virales, un bilan gynécologique, une évaluation du sevrage tabagique et du risque néoplasique bronchopulmonaire, un bilan métabolique et du risque cardiovasculaire avec bilan diététique, un dépistage des troubles cognitifs, un dépistage d'une ostéoporose en présence de facteurs de risque, une évaluation de la vie sexuelle et d'un éventuel désir d'enfant. Chez les homosexuels masculins ne se protégeant pas systématiquement, la syphilis et les infections par le VHC et le VHB (en l'absence de vaccination) doivent être dépistées et un examen proctologique doit également être réalisé annuellement. Un scanner thoracique sera réalisé chez un fumeur devant toute symptomatologie pulmonaire persistante. Chez la femme, il est recommandé de réaliser un frottis annuel en l'absence de lésion cervicale sur le 1er frottis et si le nombre de CD4 est > 200/mm3, et un frottis tous les 6 mois si le nombre de CD4 < 200/mm3 ou en cas d'antécédent de frottis anormal ou de conisation. Une colposcopie sera faite devant toute anomalie ou en cas d'identification d'HPV. Enfin, le dépistage du cancer du sein sera effectué de la même façon que dans la population générale.
Prophylaxie et traitement des infections opportunistes
Si CD4 < 200/mm3 : prophylaxie systématique de la pneumocystose et de la toxoplasmose par le sulfaméthoxazole-triméthoprime (actif sur Pneumocystis carinii et Toxoplasma gondii). En cas d'allergie : associer pyriméthamine + disulone ou atovaquone. En cas d'intolérance : insister sur les conseils hygiénodiététiques. En cas de sérologie négative de toxoplasmose : bien cuire la viande, laver les fruits et les légumes, éviter le contact avec les chats et leur litière et contrôler la sérologie tous les 3 mois.
La prophylaxie primaire des infections à mycobactéries atypiques par azithromycine si le taux de CD4 < 75/mm3 n'est plus recommandée.
Les traitements de la pneumocystose, de la toxoplasmose cérébrale, de la tuberculose, des infections à Mycobacterium avium, des infections à CMV, de la cryptococcose neuroméningée, des candidoses digestives, de la leishmaniose viscérale, des parasitoses intestinales, de l'infection herpétique et de la syphilis figurent plus loin, dans la rubrique Médicaments cités dans les références.
Vaccinations
Une meilleure réponse vaccinale associée à une restauration immunitaire ayant été observées sous antirétroviraux, il est recommandé, avant de vacciner, d'attendre que le taux de CD4 soit > 200/mm3 et que la CV soit contrôlée.
Les vaccinations contre le tétanos, la diphtérie, l'hépatite B et l'hépatite A chez les sujets non immunisés, ainsi que les vaccinations contre le pneumocoque et la grippe, sont recommandées.
Le BCG est strictement contre-indiqué en raison du risque de bécégite locorégionale ou généralisée.
Le vaccin contre la fièvre jaune est déconseillé si CD4 < 200/mm3 (risque d'encéphalite post-vaccinale). Dans le cas où la vaccination a été faite, la durée de protection contre la fièvre jaune est désormais considérée acquise pour la vie et aucun rappel ne sera effectué (OMS).
Vaccination contre la rougeole : en raison de l'épidémie de rougeole évoluant depuis 2008 en France, les adultes infectés par le VIH doivent bénéficier d'une sérologie de la rougeole et, en cas de sérologie négative, de 2 injections de ROR à 1 mois d'intervalle si les CD4 sont supérieurs à 200/mm3 (immunogénicité faible si CD4 < 200/mm3).
La vaccination contre l'hépatite B est recommandée chez tous les sujets sans marqueur du VHB (AgHBs, anticorps anti-HBs et anti-HBc négatifs). La réponse au schéma vaccinal standard (3 doses IM) étant moins bonne chez les patients VIH, un schéma vaccinal renforcé est proposé (4 doubles doses IM de 40 µg administrées à M0, M1, M2 et M6) avec contrôle du titre des AC antiHBs 1 à 2 mois après la dernière injection (possibilité de 3 injections supplémentaires). Un contrôle sérologique annuel est recommandé afin de proposer une dose de rappel en cas de titre d'anticorps anti-HBs < 10 mU/ml.
La vaccination contre l'hépatite A est recommandée chez les patients non immunisés : 1 dose, puis une 2e dose 6 mois après la première.
La vaccination contre le pneumocoque est recommandée chez tous les patients vivant avec le VIH, l'incidence des infections pulmonaires ou invasives à pneumocoque étant supérieure à celle de la population générale : 1 dose de vaccin pneumococcique conjugué 13-valent suivie d'1 dose de vaccin pneumococcique polyosidique 23-valent 2 mois plus tard, au plus tard 1 an après.
La vaccination contre le méningocoque C peut-être rattrapée jusqu'à l'âge de 24 ans. Après 24 ans, elle est recommandée chez les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) et les personnes fréquentant des lieux de convivialité et de rencontre gay.
La vaccination antigrippale annuelle (vaccin inactivé) est recommandée chez tous les patients vivant avec le VIH.
Pour la vaccination contre la varicelle, une sérologie VZV doit être effectuée chez les patients vivant avec le VIH n'ayant pas d'antécédent de varicelle. Chez les patients non immunisés, si le taux de CD4 est > 200/mm3 et en l'absence de grossesse, 2 injections de vaccin varicelle sont recommandées à un mois d'intervalle ; si les CD4 sont < 200/mm3, le vaccin est contre-indiqué et les immunoglobulines spécifiques pourront être proposées en cas d'exposition à un cas de varicelle. En cas d'exposition à la varicelle, la vaccination peut être réalisée chez le patient non immunisé dans les 3 jours suivant l'exposition, à condition que les CD4 soient > 200/mm3.
La vaccination HPV est recommandée à l'âge de 11 ans et en rattrapage jusqu'à 19 ans révolus, selon un schéma à trois doses (0, 2, 6 mois) en fonction de l'AMM des vaccins GARDASIL, GARDASIL 9, à la fois chez les jeunes filles et garçons, ainsi que pour les HSH jusqu'à l'âge de 26 ans.