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Aluminium et vaccins : la polémique ressurgit dans la presse, l'ANSM réaffirme la sûreté de cet adjuvant

Des articles de presse ont relayé le 22 septembre les conclusions de travaux "dissimulés" du Pr Gherardi suggérant une démonstration d'une toxicité cérébrale de l'aluminum des vaccins. Ces articles ont été largement repris par les anti-vaccins, suscitant une réponse immédiate de l'ANSM. 

L'agence souligne, dans un communiqué également paru le 22 septembre, que son soutien financier à la recherche du Pr Gherardi ne signifie pas qu'elle endosse ses conclusions.

Elle publie aussi un compte-rendu de la séance du 8 mars 2017 où ces études, effectuées sur des souris et, pour l'une d'entre elle, sur des humains, ont été présentées au Comité scientifique de l'ANSM par leurs auteurs (cf. détails ci-dessous)
.

L'ANSM publie aussi un avis de ce même comité scientifique concluant à l'intérêt de ces recherches, mais insistant sur le fait qu'elles sont trop préliminaires pour conclure et sur la nécessité de continuer les recherches pour en tirer des enseignements. 

L'ANSM affirme également qu'"aucun signal de sécurité lié à l'aluminium contenu dans les vaccins n'a conduit ce jour à remettre en cause le rapport bénéfice-risque des vaccins contenant de l'aluminum, en France et à travers le monde". 

Retour sur le contexte du retour de cette polémique, sur le contenu des études, le compte-rendu et l'avis du comité scientifique de l'ANSM. 
27 septembre 2017 Image d'une montre10 minutes icon 13 commentaires
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L'article du Parisien du 22 septembre 2017, incluant désormais le droit de réponse de l'ANSM (illustration).

L'article du Parisien du 22 septembre 2017, incluant désormais le droit de réponse de l'ANSM (illustration).


Le Parisien publie un article intitulé "un rapport qui dérange", pouvant laisser penser à une toxicité démontrée de l'adjonction d'aluminium dans les vaccins
Le journal Le Parisien a publié en ligne le 21 septembre (repris le 22 dans l'édition papier) un article intitulé "Aluminium dans les vaccins : le rapport qui dérange" (capture d'écran illustrant cet article)

L'auteur de cet article y évoque les travaux du Pr Gherardi, coordinateur du centre de référence des maladies neuromusculaires à l'hôpital Henri Mondor (Créteil), portant sur les risques liés à la présence d'aluminium dans certains adjuvants vaccinaux. 

Le ton de cet article, insistant davantage sur les conclusions des études plutôt que sur les réserves d'une majorité du comité scientifique de l'ANSM, et la déferlante médiatique qui l'a suivi ont conduit l'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) à réagir rapidement.

L'ANSM explique que ce "rapport" est seulement un compte-rendu de débats et un avis de
son Comité scientifique
Dès le 22 septembre, l'ANSM a donc adressé par voie de communiqué un message sans ambiguïté rappelant la sécurité des vaccins contenant de l'aluminium et se défendant d'avoir réalisé et dissimulé un rapport sur les résultats des travaux du Pr Ghérardi : "Il n'existe pas de "rapport" de l'ANSM sur les études scientifiques du Pr Romain Gherardi", écrit l'ANSM en réponse au titre de l'article du Parisien (ce journal a d'ailleurs inséré un droit de réponse sous l'article en question).

Par contre un débat a bien été organisé en mars 2017 entre le comité scientifique présidé par Annick Alperovitch, "indépendant de la direction de l'Agence" selon l'ANSM, et les auteurs des études effectuées dans le cadre du projet "BNAA-Vacc", afin de mieux comprendre leurs travaux et d'en tirer d'éventuelles conclusions.

Ce débat a été suivi d'un avis du Conseil scientifiqueadressé aux auteurs des travaux de recherche dès le mois d'avril.

Sur la base de cet avis, l'Agence a considéré qu'il n'existait à ce jour pas de nouvelles données remettant en question le rapport bénéfice/risque des vaccins contenant de l'aluminium, et que celui-ci reste par conséquent positif.

Retour plus détaillé sur l'origine de ce projet de recherche, les résultats dévoilés au Comité scientifique de l'ANSM, les commentaires de ce dernier et l'avis final rendu en mars 2017
Les travaux du Pr Gherardi ont été commandés et financés par l'ANSM elle-même à hauteur de 150 000 euros, sur 30 mois (depuis 2013).

Le projet « BNAA-Vacc » est une étude portant sur les risques dus à la présence d'aluminium dans certains adjuvants vaccinaux, et plus précisément sur la biopersistance et la neuromigration des adjuvants aluminiques des vaccins. 

Ce projet se présente en 2 volets : 
  • un volet de recherche de toxicité expérimentale (3 études sur des souris femelles) : l'objectif est d'une part, de démontrer l'éventuelle capacité de migration des adjuvants aluminiques dans le cerveau, d'autre part d'établir la relation éventuelle entre la dose d'aluminium injectée et la toxicité ;
  • un volet de recherche génétique (une étude de séquençage de génomes de persones avec ou sans "myofasciite à macrophages", syndrome associant fatigue, douleurs et troubles cognitifs, décrit depuis les années 1990 comme conséquence de la toxicité de l'aluminium des vacins mais dont la causalité n'est à ce jour pas démontrée) : l'objectif est de mettre en évidence une éventuelle relation entre des séquences génétiques et la survenue de "myofasciite à macrophages".

Résumé des 4 études (dont 3 publiées) issues des travaux de recherche "BNAA-Vacc"
Les résultats des travaux de l'équipe du Pr Gherardi ont donné lieu à 3 études sur des souris publiées entre 2015 et 2017, ainsi q'une étude sur des patients, non publiée. Ce sont les conclusions de ces études qui ont été présentées en mars dernier au Conseil scientifique de l'ANSM.

Etude 1 - Validation de la qualité du marquage de l'alluminum par des nanodiamants fluorescents
L'étude Eidi et al, publiée en 2015 dans BMC Medicine a été réalisée in vivo sur 8 souris de type C57 âgées de 2 mois.

Une dose de 400 µg d'aluminium par kilogramme par voie intramusculaire (IM) a été injectée aux souris, correspondant à l'aluminium par kilo contenu dans 4 doses de vaccin ENGERIX ! Pour tenter de faciliter le repérage des particules d'aluminium, les chercheurs ont utilisé des nanodiamants fluorescents.

Les auteurs ont constaté que des complexes Aluminium - nanodiamants se formaient et pouvaient être suivis, après phagocytoses, dans les muscles, le foie et le cerveau. 


Etude 2 - Mise en évidence, chez la souris, d'une biopersistance de l'aluminium dans le muscle. Dans le cerveau, ces particules sont présentes seulement lorsque 200 µg par kilo d'aluminum sont injectés
L'étude de Guillemette Crépeaux et de ses collaborateurs, publiée en 2015 dans J Inorg Biochem a utilisé ces nanodiamants fluorescents et des souris CD1 pour rechercher un possible effet-dose associé à la présence de l'aluminium en dehors du point d'administration.

Pour cela, des doses de 200 µg ou 400 µg d'aluminium par kilogramme ont été administrées par voie sous-cutanée (cou) ou intra-musculaire (tibia) à 35 souris de type CD1 réparties en 7 groupes de 5.

Ces souris ont subi huit tests comportementaux différents, et un dosage de l'aluminium au point d'injection et dans leur cerveau a été réalisé 45
, 135, 180 ou 270 jours après l'injection.

Selon les résultats, les souris ayant reçu des injections de 400 µg par kg d'aluminium (par exemple avec un vaccin ENGERIX) présentaient toutes un granulome musculaire, au point d'injection, ansi que des particules dans la rate et les ganglions lymphatiques persistant au moins 9 mois. Par contre, aucune souris ne présentaient de particules d'aluminium dans le cerveau, quel que soit le moment où ce dernier était analysé (45, 135, 180 ou 270 jours après l'injection). 

A l'inverse, dans le groupe des souris ayant reçu la dose de 200 µg par kilo, les auteurs ont observé une quantité significative de particules d'aluminium dans le cerveau 45 jours après l'injection par rapport aux animaux témoins.

Les études comportementales de ces mêmes souris ont présenté, selon les auteurs, une modification du niveau d'activité et d'anxiété.


Pour expliquer ce paradoxe (davantage d'aluminum injecté n'est pas associé à une présence dans le cerveau), les auteurs de l'étude, suggèrent que l'injection d'une trop grande quantité d'aluminium pourrait peut-être bloquer l'incorporation des particules dans les macrophages et donc leur diffusion et biopersistance dans le cerveau. [NDLR : rappelons tout de même que 200 µg par kilo de souris équivalent à 2 vaccins avec aluminium par kilo pour un humain, soit théoriquement l'équivalent de 20 vaccins injectés d'un coup pour un nourrisson de 10 kg, et même, toujours théoriquement, de 120 vaccins injectés en une fois pour un homme de 60 kg, ce qui est bien supérieur au nombre de vaccins reçus tout au long de la vie]. 

La taille des particules pourrait donc être le critère expliquant la translocation des particules d'aluminium via les macrophages : plus elles sont petites, plus elles sont facilement internalisées par les macrophages. Les plus petites particules sont en effet retrouvées dans les doses de 200 µg (1 750 nanomètres).

Contrairement à ce qui est observé avec la majorité des médicaments, la toxicité apparaît donc avec une dose plus faible.


Etude 3 - confirmation d'une diffusion cérébrale, chez la souris, avec une (forte) dose de 200 µg par kilo, et non 400 ou 800 µg
Une autre étude de Crépeaux G et al., publiée en janvier 2017 dans Toxicologya tenté de confirmer cette différence de diffusion et biopersistance en fonction du dosage. 

Pour cela, les chercheurs ont administré
par voie intramusculaire, trois doses de 200 µg, 400 µg et 800 µg d'aluminium par kilogramme avec l'adjuvant Alhydrogel à trois groupes de 10 souris de type CD1 sur une même période.

Des tests comportementaux ont été effectués, ainsi qu'une recherche d'aluminium dans le cerveau après 180 jours. 

Les résultats confirment l'étude précédente, tant au niveau cérébral (présence de particules d'aluminium dans le groupe "200 µg" et absence dans les autres groupes) que comportemental (modifications des niveaux d'activité et d'anxiété dans le groupe "200 µg" et absence de telles modifications dans les autres groupes).

Les auteurs posent l'hypothèse du rôle de la taille des particules : elles sont plus petites lorsque 200 µg par kg sont injectés, que lorsque 400 ou 800 µg par kg sont injectés, et pourraient donc plus facilement être phagocytées par les macrophages.
 
Etude 4 - Un déterminisme génétique pour expliquer la survenue d'une toxicité ?
Baharia Mograbi a exposé à l'ANSM les résultats de son étude effectuée auprès de 211 personnes atteintes de "myofasciite à macrophages" comparée à 154 personnes sans cette "intolérance aux adjuvants", non publiée.

Elle explique que "les adjuvants aluminiques se comporteraient comme des bactéries, et seraient pris en charge de la même manière dans le cadre du processus autophagique" par les macrophages (inclusion des nanoparticules d'aluminum dans les macrophages).

Selon elle, des variations génétiques bien spécifiques diminueraient systématiquement (chez toutes les personnes présentant ce polymorphisme génétique) cette capacité à l'autophagie et augmenteraient la toxicité de l'aluminium.

Cette diminution de l'autophagie qui serait donc d'origine génétique expliquerait, toujours selon Baharia Mograbi, qu'"e
ntre 1 % à 3 % de la population vaccinée développe des pathologies post-vaccinations", dont des "myofasciites à macrophages".

L'étude n'a pas été publiée car l'équipe veut garder le secret sur le polymorphisme génétique concerné (le temps de déposer un brevet sur un test de dépistage génétique de cette séquence particulière, en vue d'une exploitation ultérieure). 


L'avis du Conseil scientifique : des résultats intéressants mais ne démontrant pas une causalité entre l'injection d'aluminum et divers troubles, chez la souris comme chez l'homme
Pour le Conseil scientifique, l'ensemble des résultats de ces travaux est intéressant mais mérite d'être approfondi. Les experts estiment qu'il n'y a pas de démonstration des hypothèses sur lesquelles reposent les travaux, et les qualifient de préliminaires.

Ils s'interrogent notamment sur l'impact sur les résultats des nanodiamants florescents et, lors de la troisième étude, de l'adjuvant Alhydrogel.

Ils font aussi remarquer que toutes les souris étaient femelles, ce à quoi Guillemette Crépeaux a répondu que "la myofasciite à macrophages touchant davantage de patientes, il a finalement été décidé à ne retenir qu'un groupe de souris femelles".

La systématisation entre polymorphisme génétique (d'acquisition environnementale, selon Baharia Mograbi), et myofascite à macrophaes les a surpris, mais là encore, ils voient des limites à ce travail, en particulier en raison de l'absence d'information sur d'éventuels cofacteurs dans le groupe "myofasciite" (autres pathologies associées par exemple). 


Ils soulèvent donc la nécessité d'un rapport complémentaire concernant l'étude génétique.

En conclusion, dans un avis rédigé le 8 mars 2017, le Comité scientifique de l'ANSM estime que ces recherches sur la souris sont trop préliminaires pour en tirer une conclusion sur la sécurité des vaccins contenant de l'aluminium.

Quant à l'étude génétique, "certains résultats suggérant un très fort déterminisme génétique soulèvent des questionnements, en particulier sur la population témoin"; Mais le conseil scientifique de l'ANSM estime que "cette partie du rapport est trop succincte et mériterait d'être détaillée dans un rapport complémentaire".  

Au total, le Conseil scientifique estime que ces résultats ne sont pas déterminants et nécessitent donc des recherches complémentaires et approfondies.

L'ANSM précise, en réponse au Parisien, qu'elle ne peut financer de telles recherches,
la somme demandée part le Pr Gherardi étant bien trop élevée. 

En conclusion : pas de neurotoxicité démontrée et un syndrome mal défini à l'heure actuelle, sans liaison démotnrée avec l'aluminium

Le Pr Gherardi, interrogé par le Nouvel Observateur, estime que ces résultats devraient pousser les autorités à reconnaître une possible toxicité de l'aluminium (et donc l'existence de la "myofasciite à macrophages", mais, comme nous l'avons vu, la neurotoxicité éventuelle a été observée chez quelques souris femelles, ce qui ne démontre pas d'un mécanisme identique chez l'homme). 

La prédisposition génétique, si elle se confirme, est-elle une prédisposition à une "myofasciite à macrophages" due à la vaccination contenant de l'aluminium, ou une prédisposition à la survenue de symptômes non spécifiques décrits avec cette maladie, sans lien démontré avec l'aluminium ou une autre cause ? Là aussi, cette étude ne permet pas d'y répondre.

Il paraît donc, comme l'a souligné l'ANSM, prématuré de tirer des conclusions de ces études et donc de clamer, notamment sur les réseaux sociaux, qu'elle remet en question toute vaccination. 

Rappelons à nouveau que les doses d'aluminium injectées aux souris, même à 200 µg par kilo, étaient très élevées, et, d'autre part, que des milliards d'injections de vaccins avec de l'aluminium ont été effectuées dans le monde ces dernières décennies, sans signaux majeurs de pharmacovigilance.

Si, par contre, à l'avenir, des études plus poussées et rigoureuses montraient d'éventuels dérèglements immunitaires ou neurotoxiques avec cet adjuvant ou d'autres, la question serait posée de les remplacer, mais ce n'est donc pas le cas aujourd'hui, au vu de ces résultats. 


Pour aller plus loin

L'article du Parisien, avec insertion d'un droit de réponse de l'ANSM

Aluminium dans les vaccins : le rapport qui dérange (Le Parisien, 21 septembre 2017)

Communiqué, compte-rendu et avis du Conseil scientifique de l'ANSM

Projet "BNAA-Vacc" : avis du conseil scientifique de l'ANSM, séance du 8 mars 2017 (ANSM, 22 septembre 2017)
Compte-rendu de la séance du conseil scientifique de l'ANSM du 8 mars 2017 (séquence dédiée au projet "BNAA-Vacc") (ANSM, 22 septembre 2017)

Communiqué de l'ANSM

Les vaccins contenant de l'aluminium sont sûrs - Communiqué (ANSM, 22 septembre 2017)

L'étude n°1, sur des souris
Fluorescent nanodiamonds as a relevant tag for the assessment of alum adjuvant particle biodisposition, Housam E et al., BMC Med. 2015; 13: 144.

L'étude n°2, sur des souris
Highly delayed systemic translocation of aluminum-based adjuvant in CD1 mice following intramuscular injections, Crépeaux G et al., Journal of Inorganic Biochemistry Volume 152, November 2015, Pages 199-205

L'étude n°3, sur des souris
Non-linear dose-response of aluminium hydroxide adjuvant particles: Selective low dose neurotoxicity, Crépeaux G et al., Toxicology Volume 375, 15 January 2017, Pages 48-57

L'interview du Pr Gherardi dans le Nouvel Observateur
Vaccins : "Nous ne savons pas grand-chose sur les effets de l'aluminium" (septembre 2017)
 

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Dr Ph MOREL Il y a 6 ans 0 commentaire associé
L'aluminium est-il naturellement présent dans le corps? Je crois que non selon mes sources. Il se pose alors la question de pourquoi l'utiliser en injectable: c'est prendre un risque d'où ,à mon avis, l'utilité du principe de précaution. On peut faire le parallèle avec le plomb ou d'autres métaux.
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