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Iatrogénie médicamenteuse chez les personnes âgées : enquête, campagne de sensibilisation et actions annoncées du Leem

Afin de contribuer à la lutte contre la iatrogénie médicamenteuse, qui serait responsable de plus de 100 000 hospitalisations par an, le Leem (Les entreprises du médicament) a présenté le 14 avril les résultats d’une enquête réalisée auprès de 3 173 personnes de plus de 50 ans, enquête qui confirme l’importance de leur consommation quotidienne de médicaments et met en évidence des leviers d'amélioration.
 
Le Leem a également présenté une campagne de sensibilisation et un programme de lutte contre la iatrogénie médicamenteuse chez les plus âgés. Ce programme s'inscrit dans le cadre des mesures de lutte contre la iatrogénie définies par le ministère de la santé lors de la fixation de l'ONDAM (Objectif national des dépenses d'assurance maladie) 2015.

Ce programme, destiné au grand public et aux professionnels de santé, comporte un volet "prescription" et sera lancé en mai 2015. 
David Paitraud 16 avril 2015 Image d'une montre7 minutes icon Ajouter un commentaire
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Eléments de la campagne d'information du Leem, destinée au grand public, sur les risques iatrogéniques.

Eléments de la campagne d'information du Leem, destinée au grand public, sur les risques iatrogéniques.


L'enquête sur la "perception de la consommation des médicaments par les seniors" confirme la polymédication et ses risques potentiels
L'Institut français des seniors a réalisé, pour le Leem, une enquête par questionnaire auprès de 3 173 personnes de plus de 50 ans sur leur consommation de médicaments.

En synthèse, cette enquête menée en mars 2015 confirme, sans surprise, que plus l'âge avance, plus les prises de médicaments de prescription se multiplient, prises auxquelles s'ajoutent des produits d'automédication ou de conseil. Cette consommation expose à des risques dont la plupart des utilisateurs sont conscients et se disent prêts à tenter de les minimiser, avec l'aide des professionnels.  

Plus en détails, les résultats de cette enquête montrent :
- la fréquence de la polymédication chez les Français les plus âgés : 71 % des + de 50 ans et 86 % des + de 75 ans interrogés prennent quotidiennement plusieurs médicaments (en moyenne, 3,2  par jour après 50 ans, et 4 par jour après 75 ans). Ces résultats rejoignent ceux de la cohorte Paquid (suivi sur 23 ans de 3 777 sujets de plus de 65 ans), qui a permis de constater à la fin des années 90 que 40 % des plus de 75 ans vivant à domicile prenaient au moins 5 médicaments par jour. Début 2015, l'IRDES (Institut de Recherche et Documentation en Economie de la Santé) a constaté, en analysant plus de 60 000 prescriptions, une consommation d'au moins 5 médicaments par jour chez 14 à 49 % des plus de 75 ans, selon les indicateurs retenus (voir notre article) ;
- la longue durée de cette polymédication : ces médicaments sont pris quotidiennement depuis plus de 10 ans dans la moitié des cas ;
- la relative fréquence des oublis et erreurs rapportés : 19 % disent qu'il leur arrive d'oublier de les prendre, 16 % d'arrêter un traitement par eux-mêmes et 2 % de se tromper de dose ou de les confondre.
- la perception des éventuels risques liés aux médicaments : seuls 18 % approuvent l'assertion "les médicaments ne peuvent pas faire de mal", et 33 % "s'en passeraient bien" ;
- L'importance de l'automédication : 63 % des personnes interrogées disent prendre des médicaments par eux-mêmes, en plus de ceux prescrits par leur médecin. Plus précisément, 39 % disent prendre des médicaments "que j'avais chez moi", 45 % des médicaments achetés sans ordonnance, et 41 % des médicaments conseillés par le pharmacien ;
- le souhait de lutter contre les risques iatrogéniques avec l'aide des professionnels de santé : 90 % accepteraient par exemple que leur médecin révise leur ordonnance pour vérifier sa pertinence, et même, pour 51 %, à chaque consultation. Contrairement aux idées reçues, les personnes interrogées accepteraient aussi qu'une consultation ne se termine pas systématiquement par une ordonnance : seulement 2 % y verraient un manque d'attention à leur souffrance. Enfin, 74 % suivraient "de façon certaine" le conseil de leur pharmacien s'il leur recommandait de ne pas prendre tel ou tel médicament susceptible d'entraîner "un effet nocif sur [leurs] autres traitements". 

La diminution du risque iatrogénique, une préoccupation affichée dès 1998
La polymédication des seniors et ses éventuels conséquences négatives (effets indésirables, interactions, erreurs) a donc déjà été objectivée depuis longtemps, notamment par la cohorte Paquid à la fin des années 90.

En 1998, le secrétaire d'Etat à la Santé Bernard Kouchner a demandé un rapport sur la iatrogénie médicamenteuse. Ce rapport avait permis d'identifier les risques iatrogéniques et préconisait 3 grands axes d'amélioration pour prévenir leur partie "évitable" (erreurs, surdosages, interactions non prises en compte, etc.), axes toujours pertinents aujourd'hui :
  1. Mieux connaître. 
  2. Mieux éduquer, mieux former, mieux informer. 
  3. Mieux organiser.

Ces dernières années, dans le prolongement de ces intentions éducatives et formatrices, l'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) a édité plusieurs brochures pour renforcer le bon usage de certains médicaments couramment employés, tels que le paracétamol ou l'aspirine. La HAS (Haute Autorité de santé) a par exemple aussi émis des recommandations afin de maîtriser la consommation des benzodiazépines et de réduire les effets indésirables qui sont liés à ces médicaments (somnolence, chutes, etc.).

D'autres initiatives ont également été développées, comme la mise en place en 2009 du Dossier Pharmaceutique (DP) pour sécuriser la délivrance des médicaments dans les pharmacies. 

La lutte contre la iatrogénie médicamenteuse est donc aussi un des axes identifiés par la 
LFSS (Loi de financement de la Sécurité sociale) 2015 pour générer les économies "nécessaires pour assurer la pérennité de l'Assurance maladie". Une orientation que le Leem s'est engagé à soutenir en accord avec le gouvernement, comme l'a souligné Patrick Errard, président du Leem, lors de la conférence de presse de présentation de l'enquête et du programme résumé ci-dessous. 

Un programme de lutte contre la iatrogénie misant sur le renforcement de l'accompagnement des patients les plus âgés
Le Leem a présenté plusieurs mesures destinées à renforcer l'accompagnement des usagers, dans l'optique de diminuer, si possible bien sûr, le nombre et volume de médicaments délivrés aux patients les plus consommants :
- renforcement des aides à la prescription pour les médecins : l'objectif est de renforcer les capacités des LAP (logiciels d'aide à la prescription) pour identifier l'ensemble des médicaments prescrits quelles que soient leurs sources, détecter les prescriptions inappropriées et interactions ;
- optimisation du conseil pharmaceutique pour les pharmaciens : le Leem souhaite notamment s'appuyer sur le DP pour la détection plus systématique des interactions. A travers un document intitulé "mémo iatrogènie", le programme du Leem prévoit également une sensibilisation des équipes officinales pour permettre de reconnaître les signes d'alerte évoquant un accident médicamenteux.

Le Leem annonce que l'ensemble du programme fera l'objet d'une évaluation sur la base des modifications de comportements de prescription, de suivi et d'utilisation des médicaments.

Une campagne de communication destinée aux grand public et aux professionnels de santé
La communication prévue auprès du grand public repose sur le slogan "Les médicaments sont là pour vous aider mais… ils ont parfois du mal à vivre ensemble".

Elle va se matérialiser pour le grand public par :
- des affiches dans les pharmacies et les cabinets médicaux ;
- un livret de 8 pages intitulé "Le guide du bon usage des médicaments", téléchargeable sur le site du Leem, qui sera aussi inséré dans les principaux titres de presse (notamment la presse à destination des seniors)  et mis à disposition dans les salles d'attente. Ce document fournit des informations sur la iatrogénie médicamenteuse sous forme de messages de prudence et d'alertes, de tests (quiz) et de témoignages de patients, de médecins et de pharmaciens.

Pour les professionnels de santé, la campagne du Leem prévoit : 
- une publicité titrée "Ayez le réflexe iatrogénie", diffusée dans la presse professionnelle ;
- un site dédié intitulé reflexeiatrogenie.com (en construction), où seront mises à disposition toutes les informations essentielles sur la iatrogénie médicamenteuse, l'offre de DPC (développement professionnel continu), les renseignements utiles sur les LAP ainsi que les outils de la campagne grand public (affiche,  guide, quiz, etc.) libres de droits.

A ce jour, cette campagne est financée uniquement par le Leem. Elle est soutenue par les organisations professionnelles (Ordres des médecins et des pharmaciens), l'Assurance maladie, les complémentaires santé et les éditeurs de solutions interfacées avec les LAP, dont VIDAL.

En savoir plus : 
Sur les actions annoncées par le Leem contre la iatrogénie médicamenteuse chez les plus âgés : 

Perception & consommation de médicaments par les seniors - Enquête réalisée par l'Institut Français des Seniors entre le 23 et le 29 mars 2015, Leem, avril 2015
Communiqué de presse : « Médicaments… et si on changeait de comportement ? », Leem, 14 avril 2015
Dossier de presse « Médicaments… et si on changeait de comportement ? » Programme de lutte contre la iatrogénie médicamenteuse chez les personnes âgées, Leem, 14 avril 2015 (questionnaire et réponses p 18-22)
Le guide du bon usage des médicaments, Leem, 10 avril 2015

Documents en ligne sur la iatrogénie médicamenteuse chez les plus âgés : 

Rapport de mission sur la iatrogénie médicamenteuse et sa prévention P. Queneau, P. Grandmottet, La documentation française, 1998
Évolution des traitements médicamenteux des personnes âgées vivant à domicile, Salles-Montaudon N et coll., La Revue de médecine interne 2000, vol. 21, n°8, pp. 664-671
Consommations et prescriptions pharmaceutiques chez les personnes âgées, un état des lieux, Laurence Auvray et Catherine Sermet, Fondation Nationale de Gérontologie | Gérontologie et société 2002/4 - n° 103
Fréquence et nature de la polymédication chez la personne âgée en médecine générale, Joël Vionnet–Fuasset, SFMG (Société Française de Médecine Générale), mars 2003
Consommation Médicamenteuse chez le Sujet Agé -  Consommation, Prescription, Iatrogénie et Observance, Professeur Sylvie Legrain, HAS (Haute Autorité de Santé), 2005

Sur VIDAL.fr : 
Prévalence de la polymédication chez les personnes âgées en France : enquête de l'IRDES (février 2015)
Le 1er Prix VIDAL Hôpital attribué au programme MEDISIS d'accompagnement thérapeutique des seniors (février 2015)
Médicaments et personnes âgées : "il faut arriver à être prudent" Dr Christophe Trivalle, gériatre (avril 2014)
Bon usage des médicaments : résumé des recommandations du rapport remis à Marisol Touraine (septembre 2013)
Sources

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