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L'OMS alerte sur une flambée de cas de peste à Madagascar

L'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a publié le 21 novembre un bulletin d'information sur une augmentation de cas de peste à Madagascar, où 40 personnes en sont décédées.

Cette maladie, d'origine bactérienne est pourtant traitable par antibiotiques, à condition qu'ils soient administrés précocemment, en particulier en cas de forme sévère d'emblée. La lutte contre les puces vectrices de l'infection est également essentielle. 

Afin d'endiguer ce début d'épidémie, le gouvernement malgache, soutenu notamment par l'OMS, l'Institut Pasteur de Madagascar, la Commune urbaine d’Antananarivo et la Croix Rouge, se mobilise. 
Stéphane Courbois 11 Décembre 2014 Image d'une montre4 minutes icon Ajouter un commentaire
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Le bacille responsable de la peste, Yersinia pestis (illustration).

Le bacille responsable de la peste, Yersinia pestis (illustration).

Entre 2000 et 2009, plus de 20 000 personnes dans le monde ont été atteintes de la peste
La peste, cette maladie considérée à tort comme une maladie d'un autre temps et sujet d'un roman d'Albert Camus, est encore présente, à Madagascar mais aussi dans de nombreuses parties du monde.

Entre 2000 et 2009, 21 725 personnes auraient été affectuées et 1 612 sont décédées, selon le recensement effectué en 2013 par la Société américaine de médecine tropicale et d'hygiène. Les pays les plus touchés ont été la République démocratique du Congo et Madagascar. Des cas ont également été confirmés en Chine, et même aux Etats-Unis. 

La peste n'a donc jamais été éradiquée et reste sous surveillance de l'OMS. En France, la peste fait l'objet de surveillance au sein du Plan Biotox (Plan Vigipirate) pour une vigilance accrue face à une menace terroriste bactériologique.

A Madagascar, une flambée préoccupante
Le 4 novembre 2014, le ministère de la Santé de Madagascar a notifié à l'OMS une flambée de peste. Au 16 novembre, 119 cas de peste, dont 40 mortels, avaient été confirmés. Seuls 2 % des cas notifiés étaient des cas de peste pulmonaire, forme la plus rapidement mortelle (cf. infra). 

Avec le soutien de plusieurs partenaires, dont l'OMS, l'Institut Pasteur de Madagascar, la Commune urbaine d'Antananarivo et la Croix-Rouge et celui de la Banque africaine de développement, le gouvernement malgache a mis en place des mesures de lutte : des équipements de protection individuelle, des insecticides, des pulvérisateurs, et surtout des antibiotiques ont été mis à disposition.

La peste, une maladie bactérienne transmise par des puces ou par voie aérienne
puce du rat Xenopsylla cheopisCette maladie infectieuse est due à un bacille, Yersinia pestis, découvert en 1894 par Alexandre Yersin. Cette infection touche principalement les rongeurs, notamment les rats et les écureuils. Cette bactérie est ensuite transmise aux animaux et aux hommes par l'intermédiaire des piqûres de puces du rat (Xenopsylla cheopis, cf. photo ci-contre, © Centers for Disease Control and Prevention/Wikimedia), ou par consommation de viande d'animaux infectés.

La respiration de gouttelettes infectées expulsées lorsqu'une personne atteinte tousse peut également déclencher l'infection. 

Formes et symptômes de la peste
Lorsqu'un être humain est porteur de cette bactérie, il peut développer la peste sous 3 formes cliniques différentes pouvant se succéder : la peste bubonique, septicémique ou pulmonaire.

peste bubonique - bubonLa forme bubonique de la maladie fait majoritairement suite à la piqûre d'une puce infectée, c'est la forme la plus répandue. Après une incubation de 2 à 8 jours, les symptômes de la maladie s'apparentent à une grippe (fièvre élevée, frissons, douleurs musculaires...), accompagnés d'un bubon (hypertrophie d'un ganglion lymphatique) apparaissant sur la peau au niveau de la piqûre, généralement au pli de l'aine ou en haut de la cuisse. En l'absence de traitement adapté, la peste bubonique peut évoluer vers une forme septicémique (dissémination sanguine de l'infection), rapidement mortelle.

La forme pulmonaire est la forme la plus rare mais est extrêmement contagieuse et dangereuse. Elle survient après inhalation du bacille dans les poumons (transmission par voie aérienne). Après une incubation de quelques heures à 6 jours, le malade tousse, a des difficultés à respirer. En l'absence de diagnostic et traitement précoces, cette forme est très souvent  mortelle (œdème pulmonaire aigu et défaillance respiratoire). Le décès peut survenir 24 heures seulement près l'infection.

Un diagnostic avant tout symptomatique
En zone à risques, comme Madagascar et la RD Congo, les professionnels de santé mettent rapidement en application les protocoles de traitement de la peste au regard des symptômes identifiés chez les patients infectés, sans attendre le diagnostic biologique. 

La confirmation diagnostique de la peste s'effectue à partir de l'analyse d'échantillons de sang, expectorations ou ponctions de bubons  :
- détection de l'antigène capsulaire F1 de Yersinia pestis par bandelettes de diagnostic rapide ;
- isolement et identification à partir d'hémoculture (mais la présence de la bactérie est inconstante) ;
- amplification en chaîne par polymérase (PCR).

Administrer des antibiotiques le plus tôt possible 
La streptomycine, le chloramphenicol et les tétracyclines sont les antibiotiques de référence pour le traitement de la peste, précise l'Institut Pasteur. Les fluoroquinolones sont une alternative possible. Ces antibiotiques sont le plus souvent efficaces, à condition qu'ils soient donnés suffisamment tôt. 

Concernant l'entourage des personnes atteintes, la chimioprophylaxie au moyen de tétracyclines ou de sulfamides utilisés précocement est en général efficace.

Des résistances à ces antibiotiques ont cependant été identifiées par l'Institut Pasteur à Madagascar dans les années 90 (résistance plasmidique), ce qui inquiète les autorités sanitaires. 

Comment se protéger de la peste aujourd'hui ?
Le principal vecteur de cette maladie étant la morsure par une puce infectée, le meilleur moyen de s'en protéger est donc de ne pas se rendre dans les zones où la peste sévit, ou à défaut d'éviter tout contact avec les rongeurs et de porter des vêtements couvrants.

La mise au point et la diffusion d'un vaccin efficace et bien toléré serait bien sûr une solution préventive de choix. Le premier vaccin, composé de germes tués et élaboré dès1897 par Waldemar Haffkine, n'était pas efficace. D'autres tentatives ont eu lieu depuis (bacilles tués par la chaleur ou vivants atténués), mais se sont avérées soit inefficaces, soit efficaces mais très brièvement, ce qui nécessite une multiplication des injections, soit mal tolérées. A ce jour, malgré les efforts de la recherche internationale, aucun vaccin efficace et bien toléré n'est donc disponible

En savoir plus :
Peste à Madagascar, OMS, 21 novembre 2014
Plague Gives Surprises in the First Decade of the 21st Century in the United States and Worldwide, Thomas Butler, The American Journal of Tropical Medicine and Hygiene, août 2013
Guide Biotox Peste, InVS, novembre 2001
Fiche information sur la peste, Institut Pasteur, février 2007
Diagnostic biologique de la peste, pasteur.fr
Résistance aux antibiotiques de Yersinia pestis, Suzanne Chanteau, Atlas de la peste à Madagascar, p 80-81, 2006
Resistance of Yersinia pestis to Antimicrobial Agents, Marc Galimand, Elisabeth Carniel et Patrice Courvalin, Antimicrobial Agents and Chemotherapy, octobre 2006

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