#Socio-professionnel

"Je me suis installée quelques mois après ma thèse" Dr Anne-Sophie Rougeaux, médecin généraliste

Au 8ème Congrès de la Médecine Générale, qui se tenait à Paris début avril, nous avons rencontré le Dr Anne-Sophie Rougeaux, médecin généraliste exerçant depuis 18 mois dans un petit village au-dessus de Beauvais, dans l’Oise.

Nous l’avons interrogée sur ses motivations, son ressenti, ses difficultés, ou encore sa perception des "nouveaux patients".  
11 juin 2014 Image d'une montre4 minutes icon 9 commentaires
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VIDAL : Vous êtes jeune médecin généraliste et déjà installée dans l'Oise. Pourquoi ce choix ?
Dr Anne-Sophie Rougeaux : J'ai été thésée début 2012. Je me suis dit que j'allais commencer par faire des remplacements, pour me faire une idée sur les différents modes d'exercice (seul, en groupe). J'ai donc remplacé pendant un été des médecins seuls et des médecins en groupe : cela s'est très bien passé. Puis l'opportunité s'est présentée de reprendre le cabinet d'un médecin qui voulait partir à la retraite. Il ne connaissait pas le système de collaboration libérale, donc je lui en ai exposé le principe et il a été emballé par ce système : il a pris sa retraite, j'ai pris sa place et lui continue quand même, deux après-midi par semaine, à consulter, ce qui nous permet d'échanger. Je suis donc installée seule dans un cabinet médical, mais on collabore quand même un petit peu.
 

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VIDAL : Avez-vous bénéficié d'une aide à l'installation ? 
Dr Anne-Sophie Rougeaux : J'ai frappé à la porte "aide à l'installation", mais derrière il ne s'est rien passé... Cela reste pour moi quelque chose d'inexistant : j'ai été du côté de l'Assurance Maladie, puis au niveau des Agences Régionales de Santé. Ces dernières m'ont dit que des cartographies allaient être effectuées mais n'étaient pas encore déterminées... Enfin je ne devais pas tomber au bon moment. Donc quelque part on pousse les jeunes à s'installer mais lorsqu'ils s'installent, ce n'est pas le bon moment… Il faut attendre, il faut patienter… c'est toujours un peu contradictoire. J'ai été dans les villages, au niveau des mairies, mais après ça dépend aussi de chaque ville ou village, des possibilités de chacun… Ce n'est pas évident.

VIDAL : Pourquoi n'avoir pas choisi d'exercer dans une maison de santé pluridisciplinaire ?
Dr Anne-Sophie Rougeaux : C'est certes intéressant parce que l'on peut échanger au quotidien, mais il faut savoir aussi s'entendre.. Mon père étant cardiologue et ayant exercé bien avant moi, je l'ai souvent entendu parler d'associations qui ne fonctionnaient pas très bien… Donc je préfère être seule et bien travailler plutôt que d'aller m'installer en Maison de santé et  me "prendre parfois la tête" avec certains collègues ou autres.

VIDAL : Qu'est-ce que vous a apporté cette installation rapide ?
Dr Anne-Sophie Rougeaux : Lors des remplacements, ce qui m'a vite manqué, c'est le suivi : on ne revoit pas les patients, on ne sait pas si la prise en charge a été efficace… Même si après je revoyais les médecins que j'avais remplacés et qu'ils me disaient qu'il n'y avait pas eu de souci derrière, j'avais aussi envie de suivre les patients atteints d'une maladie chronique ou autre, de voir un petit peu les retours que l'on n'a pas forcément en tant que remplaçant.

VIDAL : La transition avec les patients du médecin auquel vous avez succédé s'est-elle bien passée ?
Dr Anne-Sophie Rougeaux : C'est vrai qu'au départ il y a eu quand même une petite barrière… Les patients se sont dits "ah mince, notre médecin part, c'est quelqu'un d'autre qui prend sa place". De plus, comme mon prédecesseur a continué à consulter, beaucoup de patients voulaient n'avoir des consultations qu'avec lui. Mais il a tout fait pour passer quand même la main. Je le remercie beaucoup d'ailleurs. Mais c'est vrai qu'il y a eu un cap à passer au départ. Il y en a même qui m'ont dit "ah oui en fait ça va, vous êtes bien, vous expliquez bien", mais je sentais une réticence à changer de médecin. Mais maintenant qu'ils ont passé le cap justement, la confiance s'est installée petit à petit.

VIDAL : Avez-vous déjà dû faire face à des exigences particulières de patients ?
Dr Anne-Sophie Rougeaux : C'est arrivé. J'ai une patiente qui m'a dit lors de sa première consultation : "je veux changer de médecin" et m'a donc choisie comme médecin traitant : elle était très enjouée, cela c'est bien passé la première fois. La deuxième fois, elle arrive en consultation avec une simple rhino-pharyngite et me dit : "vous ne me prescrivez pas d'antibiotiques ?" Je lui dis : "non, parce que ce n'est pas automatique"… et il n'y en avait pas, pour moi, la nécessité. Elle s'est alors emportée : "oui, si c'est pour ne rien me prescrire, je change de médecin !" Et j'ai vu ensuite sur la missive des Médecins Traitants qu'elle était effectivement partie. Je me dis qu'après tout, des patients comme cela, s'ils peuvent aller ailleurs, cela ne me dérange pas du tout.
 
VIDAL : Avez-vous l'impression qu'internet joue un rôle sur l'exigence de certains patients ?
Dr Anne-Sophie Rougeaux : C'est vrai que c'est un petit peu agaçant pour le médecin, parce que l'on se dit qu'ils vont chercher des éléments ailleurs, nous ne sommes plus "Le Savoir unique". Certes, on trouve de tout sur internet et c'est vrai que lorsque les patients se mettent à chercher, ils trouvent de la plus petite chose à la pire des catastrophes. Mais nous pouvons justement les aider en essayant de faire un petit peu le tri, en discutant avec eux de ce qu'ils ont trouvé.

VIDAL : Arrivez-vous à concilier votre vie personnelle avec les exigences horaires de ce métier ?
Dr Anne-Sophie Rougeaux : C'est vrai que ça aussi c'est difficile, déjà parce qu'il faut habituer les patients : le médecin avec lequel je collabore est un homme médecin généraliste âgé, il y avait sa patientèle qui était là 24 heures sur 24 on va dire, il était joignable tout le temps. Or j'ai réduit les horaires, je ne suis pas disponible 24h sur 24. J'ai des patients qui m'ont demandé mon portable, au cas où, et je leur ai dit "non, je ne peux pas, moi aussi j'ai une vie de famille à côté, j'ai des petites filles, elles m'attendent aussi à la maison en rentrant donc pour moi ce n'est pas concevable de faire des consultations à 23h et puis 7 jours sur 7, 24h sur 24". Il faut que cela rentre petit à petit dans les mentalités de chacun, ce n'est pas forcément évident.

Propos recueillis au 8ème Congrès de la Médecine Générale France (CMGF), Paris, avril 2014

En savoir plus :
La collaboration libérale, Ordre National des Médecins, octobre 2012 
Sources

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JJ Il y a 9 ans 0 commentaire associé
C'est exactement ce qu'il faut faire .Vous étes dans le juste.Mais au fure et à mesure que vous avancez, vous allez avoir des petites obligations vis à vis des grands malades s'approchant de la fin de vie.Une organisation intermédiaire serait obligatoire ....si vous vous attachez à votre malade...Selon votre coeur..(40 ans de medecine générale)
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