#Santé publique

Mediator : amendement législatif pour le réexamen des dossiers d'indemnisation ayant fait l'objet d'un rejet

Le ministère de la santé a déposé un amendement au projet de loi de finances rectificative pour 2014 pour permettre un ré-examen des demandes d'indemnisation déposées par des patients ayant été traités par MEDIATOR (benfluorex) et ayant fait l'objet d'un rejet.

Le ministère explique le dépôt de cet amendement "par le progrès significatif des connaissances scientifiques des préjudices cardiaques susceptibles d’être induits par ce médicament". 
David Paitraud 16 décembre 2014 Image d'une montre3 minutes icon Ajouter un commentaire
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Echographie cardiaque (illustration).

Echographie cardiaque (illustration).


Le 10 décembre, le Gouvernement a donc déposé l'amendement 31 quinvicies pour permettre le réexamen de certaines demandes d'indemnisation déposées par des patients ayant été traités par benfluorex, et rejetées par le collège d'experts de l'ONIAM (Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales).

L'origine médicamenteuse des valvulopathies aurait été largement sous-estimée depuis 33 ans
Cette prise de position en faveur d'un ré-examen a été précédée, il y a quelques semaines, par la publication d'une mise au point sur les valvulopathies médicamentseuses dans la revue de cardiologie Cardinale. Cette mise au point, écrite notamment par Pierre-Vladimir Ennezat, cardiologue au CHU de Grenoble et membre du collège benfluorex de l'ONIAM, explique que, depuis 33 ans, certaines valvulopathies ont été attribuées à tort aux conséquences du rhumatisme articulaire aigu (RAA). 

Le RAA est en effet en déclin alors que, depuis les années 60, des "coupe-faim" amphétaminiques (fenfluramine, dexfenfluramine, benfluorex) ont été vendus dans le monde entier : en France, "plus de 10 millions de personnes ont été exposées à une fenfluramine ou dérivé comme le benfluorex entre 1963 et 2009", précisent les auteurs. Or ces dérivés amphétaminiques ont un métabolite actif commun, la norfenfluramine, dont la toxicité valvulaire a été mise en évidence par Rothman et al. en 2000.

Cette toxicité a été confirmée récemment et cliniquement avec les résultats de l'étude REGULATE qui a mis en évidence une survenue trois plus fréquente d'insuffisances aortiques légères chez les patients sous benfluorex, comparés à des patients non exposés. Beaucoup de valvulopathies, attribuées au RAA, seraient donc plutôt liées à la prise de dérivés amphétaminiques. Les auteurs de la revue Cardinale parlent ainsi de "valvulopathies rhumatismales-like".

Une amélioration des connaissances qui impose le ré-examen des dossiers rejetés
Les résultats de l'étude REGULATE, ainsi que ceux d'autres études compilées par les auteurs de la mise au point pré-citée, confirment donc les risques de valvolupathie après la prise de benfluorex ou de fenfluramines. Pierre-Vladimir Ennezat et ses collaborateurs en concluent que "toute valvulopathie restrictive chez un patient ayant été exposé au benfluorex doit faire évoquer une toxicité valvulaire médicamenteuse", et non un RAA. 

Considérer a priori que le benfluorex est en cause) est une évolution récente, ce qui pourrait expliquer la prise de position du ministère : "
Les connaissances scientifiques des préjudices cardiaques susceptibles d'être induits par le benfluorex ont significativement progressé de telle sorte que certaines situations rejetées par le collège d'experts en 2012 et 2013 pourraient aujourd'hui être estimées imputables au MEDIATOR par la même instance", argumente le ministère de la santé, qui souligne sa volonté d'indemniser de la manière "la plus équitable et rapide possible des victimes de ce drame de Santé publique". 

Conditions de ré-examen des dossiers initialement rejetés  
Le ministère de la santé précise les conditions qui pourront conduire le collège d'experts à revoir sa position initiale :
  • éléments nouveaux susceptibles de justifier une modification du précédent avis ;
  • dommages constatés susceptibles, au regard de l'évolution des connaissances scientifiques, d'être imputés au benfluorex alors qu'ils ne pouvaient l'être à l'époque où la demande d'indemnisation avait été rejetée.

En savoir plus : 
Marisol Touraine propose une évolution législative permettant un réexamen de certaines demandes d'indemnisation des victimes du MEDIATOR, ministère de la santé, 10 décembre 2014
Projet de loi de finances rectificative pour 2014, assemblee-nationale.fr, 15 décembre 2014
Les valvulopathies médicamenteuses, Ennezat PV et coll., Cardinale, 26 novembre 2014
Evidence for possible involvement of 5-HT(2B) receptors in the cardiac valvulopathy associated with fenfluramine and other serotonergic medications, Rothman RB et coll., Circulation, décembre 2000
Adverse effects of benfluorex on heart valves and pulmonary circulation, Szymanski C et coll., Pharmacoepidemiology and drug safety, juillet 2014

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