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CÅ“ur artificiel "total" : caractéristiques et premiers résultats du prototype CARMAT

Le cÅ“ur artificiel a pour but de représenter une alternative fiable à la greffe cardiaque, lorsque cette dernière est impossible. La mise au point d’un cÅ“ur artificiel "total", autonome, pourrait permettre, à terme, de remplacer  le cÅ“ur biologique tout en maintenant l’autonomie du patient (pas de dispositif externe fixe et lourd, empêchant la mobilité).

Depuis 2008, la société CARMAT, créée par l'équipe du Pr Alain Carpentier et Matra Défense, travaille sur un tel système, miniaturisé,  biocompatible et auto-régulé.

Deux cÅ“urs CARMAT ont été pour le moment implantés : le premier patient est décédé, mais le deuxième , implanté début août 2014, semble pour le moment très bien le tolérer, alors "qu’il était mourant", selon le Pr Carpentier interrogé par Les Echos.

Retour sur cette recherche, encore très préliminaire mais prometteuse pour les patients souffrant d’insuffisance cardiaque très sévère, terminale.
07 novembre 2014 Image d'une montre5 minutes icon Ajouter un commentaire
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Le coeur artificiel développé par le Pr Carpentier et son équipe est implanté sur les oreillettes (© Carmat SA)

Le coeur artificiel développé par le Pr Carpentier et son équipe est implanté sur les oreillettes (© Carmat SA)


Une recherche qui dure depuis la fin des années 60
Des scientifiques du monde entier tentent de mettre au point un cÅ“ur artificiel depuis la fin des années 60, en complément de la transplantation d'un cÅ“ur issu d'un donneur, initiée en 1967 par le Pr Christiaan Barnard, transplantation qui nécessite un greffon disponible et présente des contre-indications (elle n'est pas proposée après 65 ans par exemple).

Les premiers prototypes de ventricules artificiels ont été greffés sur des veaux. En 1982, un cÅ“ur artificiel provisoire, le Jarvik 7, mis au point par le Dr Robert Jarvik, a été pour la première fois posé sur un humain, Barney Clark. Il s'agissait d'une machine en plastique et aluminium, dont les "ventricules" était remplis et vidés par de l'air comprimé, propulsé par un compresseur externe de plusieurs dizaines de kilos. Plus de 350 patients ont été équipés de ce système d'assistance ventriculaire, pour une durée de vie moyenne de 10 mois, comme l'a précisé le Dr Jarvik.

En 2001, un premier prototype de cÅ“ur "total" en plastique et titane, l'AbioCor, est implanté à un patient américain, Robert Tools. Si l'AbioCor présente de nombreux avantages (batteries incluses évitant un câble externe et les risques d'infection, pas de compresseur externe), il est relativement encombrant (dans le thorax), expose à des risques hémorragiques et a une durée de fonctionnement limitée à 18 mois, 2 ans. Un Abiocor II, plus léger et prévu pour durer 5 ans, est en cours de développement.

Depuis 2008, le même type de cÅ“ur artificiel que l'AbioCor, mais moins encombrant et, en théorie, biocompatible et donc moins risqué, est développé par le Pr Carpentier et ses équipes.

Un cœur artificiel biocompatible, mimant l'organisation et le fonctionnement du cœur humain
Selon le site de Carmat, le Professeur Carpentier a demandé, en 1993, aux ingénieurs spécialisés dans l'aéronautique et le spatial du Groupe Matra de développer, avec lui, une solution physiologique, efficace et durable, pour les patients condamnés à très court terme par le manque de greffons cardiaques disponibles ou par une contre-indication à la transplantation.

Leurs efforts ont abouti à la mise au point du "cÅ“ur Carmat" , destiné à fonctionner pendant au moins 5 ans, soit 320 millions de "battements" :
- Cette prothèse implantable pèse 900 grammes (cÅ“ur humain : 250 à 300 g), comporte deux ventricules artificiels et des valves implantées (valve d'origine bovine traitée chimiquement pour éviter tout rejet). Les parties en contact avec le sang (intérieur des ventricules) sont recouvertes de "biomembranes" hémocompatibles (péricarde animal traité chimiquement). La prothèse comporte aussi un système électronique embarqué comprenant un micro-processeur, une prise d'alimentation électrique  et 7 capteurs. Ces derniers vont permettre une adaptation physiologique à la vie quotidienne en mesurant la tension artérielle, en détectant la position du corps, la vitesse (lorsque le patient court, le cÅ“ur artificiel va accélérer pour augmenter le débit sanguin), le sommeil (ralentissement de la fréquence), etc.  
- La prothèse est implantée dans la cage thoracique et raccordée aux oreillettes naturelles grâce à un dispositif d'interface, également biocompatible. Elle est moins "encombrante" que l'AbioCor et peut donc être posée, en théorie, chez 86 % des hommes (mais seulement 14 % des femmes). Pour assurer la fonction cardiaque, deux motopompes aspirent et injectent, alternativement, de l'huile de silicone dans les cavités ventriculaires déplaçant les membranes de pulsion. Lorsque le compartiment hydraulique se vide, le retrait de la membrane aspire le sang dans le ventricule : c'est la diastole.  Lorsqu'il se remplit, la membrane pulse le sang dans les artères : c'est la systole.
- Le système externe d'alimentation, de contrôle et de suivi comporte un dispositif de surveillance porté à la taille par une ceinture, permettant d'informer le patient et de suivre en permanence, à distance, le fonctionnement de la prothèse. Il comporte également deux batteries rechargeables qui vont alimenter la prothèse en énergie via deux fils externes qui se rejoignent derrière l'oreille gauche, où une "prise" est implantée. L'énergie est transmise à la prothèse par un fil sous-cutané.

Pour visualiser ces éléments et leur fonctionnement, voici une animation réalisée par Carmat :
 

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Le deuxième patient équipé du CÅ“ur Carmat "trouve son cÅ“ur parfait"
Un premier patient en insuffisance cardiaque terminale, Claude Dany, a été opéré par Pr Daniel Duveau le 18 décembre 2013 à l'hôpital européen Georges-Pompidou. Après 75 jours, il est brutalement décédé, suite un arrêt de son cÅ“ur artificiel. Selon le Pr Carpentier, interrogé le 4 novembre par Les Echos, il n'aurait pas fallu tenter de restaurer une fonction cardiaque normale immédiatement : "je fais assez souvent le parallèle avec ces pauvres gens qui revenaient de camps de concentration, auxquels on voulait donner du jour au lendemain des rations trop nourrissantes. Maintenant, on sait qu'il ne faut pas commencer par faire en sorte que le cÅ“ur artificiel donne au malade le débit théorique auquel il a droit, cela doit se faire progressivement".

Un deuxième patient en insuffisance cardiaque terminale et ne pouvant bénéficier d'une greffe a été opéré au CHU de Nantes le 5 août, à nouveau par le Pr Daniel Duveau. Selon le Pr Carpentier, qui a échangé à son sujet avec le Pr Duveau, "avant l'intervention, ce patient qui a une soixantaine d'années était mourant, je pèse mes mots, à quelques semaines près (…) Après une douzaine de jours en réanimation, le malade a récupéré un état général très satisfaisant et a retrouvé son autonomie. Il assure lui-même son hygiène corporelle, se déplace seul dans sa chambre, où il fait régulièrement du vélo d'appartement. A l'épreuve d'effort, il a atteint le niveau maximal sans anomalie respiratoire, ce qui est un critère d'efficacité du cÅ“ur, pour nous, les cliniciens".

Ce patient mourant a donc vu sa vie transformée, même si cela ne fait que 3 mois qu'il a été implanté et que l'expérience précédente incite à la prudence : "notre malade trouve son nouveau cÅ“ur parfait. Il ne le sent pas. Ce cÅ“ur lui a changé la vie, dit-il lui-même".

Ces résultats prometteurs devraient permettre à la société Carmat de prolonger ces expérimentations avec d'autres patients, en France et probablement en Pologne, toujours selon le Pr Carpentier.

En savoir plus :
Jarvik 7 Total Artificial Heart, Texas Heart Institute, novembre 2011
Robert Jarvik on the Jarvik-7, jarvikheart.com
AbioCor®, Abiomed.com
Présentation du cÅ“ur CARMAT, carmatsa.com
"La première implantation nous a fait progresser", interview du Pr Carpentier par Chantal Houzelle, Les Echos, 4 novembre 2014
Sources

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